CHÂTEAUROUX (36)
Dr CHRISTIAN DELTEIL
Que deviennent les rapports des médecins avec leur patients (clients)?
Une femme de 70 ans découvre fortuitement une petite masse dans l’un de ses seins. Inquiète à juste titre,mais pas trop cependant, elle va passer une mammographie de contrôle (la précédente remontant à un an). Le radiologue lui annonce tout de go qu’elle a une tumeur, sans plus de détails, et qu’elle doit voir un cancérologue. Ce qu’elle fait. Ce dernier lui confirme le diagnostic aprés ponction et lui dit " on va vous opérer et vous aurez de la radiothérapie". Pas d’autres explications, en particulier sur les résultats de la ponction.
Elle voit donc un chirurgien et un anesthésiste dans un établissement réputé pour sa prise en charge des tumeurs malignes. On lui precrit un bilan biologique. A la question "est-ce grave, docteur" le chirurgien lui répond qu"il ne peut rien dire. Pas le moindre mot de réconfort, pas la moindre explication, si ce n’est que "ce n’est pas moi qui vous opérerai".
Le jour de l’intervention arrive. Elle est donc opérée par un autre chirurgien que celui consulté précedemment qui, le lendemain dans sa chambre lui dit simplement que tout c’est bien passé, qu’il lui a enlevé la tumeur et le ganglion sentinelle et qu’il faut attendre 15 jours pour avoir les résultats des prélèvement et savoir quelle suite donner. Et les extempos, alors qui sont une premiére indication et peuvent permettre de donner quelques détails sur son avenir à l’opérée sous réserve du résultat définitif ?
Les suites sont sans problème et elle va revoir un troisième chirurgien dans quelque temps pour la suite du traitement.
Tout au long de ces multiples et variées consultations, personne ne lui a donné le moindre renseignement sur ce dont elle souffrait, la moindre explication sur ce qu’il fallait lui faire et pourquoi, ni le moindre résultat d’examen (ponction biopsique, extempo, marqueurs tumoraux, radios, échos...) sur la suite, sur son état d’esprit, son moral, sa détresse, son angoisse.
Je connaissais, pour l’avoir vécu professionnellement, cette cascade d’intervenants successifs en anesthésie, qui donne au malade, à l’opéré, cette impression d’être pris dans une spirale infernale, où rien n’est reconnaissable pour s’y raccrocher, mais j’étais loin de penser que les chirurgiens que les gens vont voir pour justement avoir un point de repère dans ce labirynthe des soins, en qui ils font confiance, en étaient , eux aussi, arrivés à ce point de négligence et de détachement vis à vis de la détresse des personnes qu’ils prennent encharge et dont dont ils détiennent d’un certaine façon l’avenir physique et mental. J’ai toujours pensé que le rôle du médecin dépassait de loin le simple fait de poser un diagnostic et de prescrire des soins. Il doit aussi, et ô combien, expliquer, rassurer, comprendre, aider son patient à accepter ce qui lui arrive, ce que l’on va devoir lui faire subir pour tenter de le soulager et de le guérir, le faire participer et l’aider à surmonter l’épreuve. Cela s’appelle je crois, l’empathie, c’est à dire le contaire de cette histoire .
SI c’est ça la médecine de maintenant, je suis content de ne plus en être.
Mais ce cas est certainement un cas isolé. Rassurez-moi...
PARIS
DR ALAIN CHOUX
Téléconsultation : la meilleure... mais surtout la pire des choses
Après la grippe H1N1, nous apprenons avec force publicité la création de la
médecine par internet, dernière trouvaille de notre (ancienne) ministre de tutelle.
Comme la langue d’Esope qui pouvait à la fois être la meilleure et la pire des
choses.
Ce décret est très complexe pour ne pas dire inapplicable. Il comporte
quelques très bonnes choses et beaucoup de mauvaises.
Pour ce qui est du meilleur, il faut sans doute l’accompagner et l’encourager,
même s’il a un coût trop élevé pour un Etat qui a les poches vides.
Il permettra de confronter les avis thérapeutiques, aidera sans doute sur des
diagnostics difficiles, raccourcira les hospitalisations, favorisera l’enseignement postuniversitaire,
voire encadrera l’essor des nouvelles technologies. La liste est très loin
d’être exhaustive.
Pour ce qui est du pire, la position pour le moins ambiguë de l’Ordre, semble
encourager sans le dire, cette médecine sans examen donc vraisemblablement sans
honoraires.
Sur le berceau de cette belle idée, quelques bonnes fées, comme les oracles de
naguère, nous prédisent un essor de cette nouvelle technique très “up to date??.
C’est pourtant sans compter sur la dure réalité qui montre que malgré l’augmentation
du numérus clausus en quatre ans, le nombre d’installations est passé d’environ
33% à moins de 15%.
Les déserts médicaux se sont étendus inexorablement, et ce ne sont pas les
danses du scalp des politiques de tout bord qui vont éteindre l’incendie.
Le constat est portant clair: les jeunes diplomés ne veulent plus d’un paiement
à l’acte soustendu par le racket des organismes de sécurité sociale qui ne leur
assurent, comme l’arlésienne, que des chimères.
Le remplacement est le seul salut, mais il n’assure pas la continuité des soins.
Bien entendu nos puissants penseurs (de Rodin) ont sans doute oublié par
distraction que la couverture tant du téléphone portable que d’internet restait à revoir et
qu’elle avait un coût élevé.
Jean de la Fontaine dans ses fables et Alphonse Daudet dans la mûle du
Pape, doivent, si le ciel existe, se réjouir de telles dérives que le simple bon-sens
térrien aurait dû occulter.
Mais surtout, quel assureur va être assez fou pour prendre en charge cette sinistre parodie de médecine?
L’art de sauver la Sécurité sociale...
ANGOULEME
DR YVES DENIS LAMARRE
Une des mesures phare du plan de sauvetage de la sécurité sociale est le remboursement à 15 % de certains médicaments. Mesure extraordinaire, la première du genre, et dont l’effet réel n’a encore été exposé par personne. Prenons un quelconque médicament concerné par la mesure, et dont le coût unitaire par boite est inférieur à 3,35 euros. Par exemple, un médicament à 2,30 euros par boite. La sécurité sociale rembourse donc maintenant 34 centimes d’euro qu’elle donne de la main droite en même temps, elle récupère de la main gauche une taxe de 50 centimes d’euro, (franchise médicale NDLR) donc elle fait un bénéfice de 16 centimes d’euro.
Ainsi, pour la première fois de son histoire, la SS gagne de l’argent quand elle rembourse un médicament ! il fallait oser, ils ont osé.
Serons-nous tous salariés demain ?
LE HAVRE
Dr DOMINIQUE JOURDAIN
J’ai lu récemment dans vos colonnes, l’ébauche du programme du parti socialiste en matière de santé visant à supprimer le paiement à l’acte.
Ceci entraîne quelques réflexions et interrogations. Nous subissons déjà quelques forfaits :
1/ Le remboursement d’une quote-part de nos ordonnances. A ma connaissance le montant est le même depuis plus de 15 ans.
2/ Forfaits pour les gardes de nuit ou week-end. Mon expérience montre que nous sommes payés quelquefois dans le mois, quelquefois au bout de 3 mois, quelquefois pas du tout car le courrier a été égaré.
3/ Forfait pour les patients en ALD dont aucune revalorisation annuelle n’est prévue. Ce forfait est pernicieux car les modalités d’attribution des ALD sont de plus en plus resserrées. Les montants perçus sont donc de moins en moins élevés. Pour exemple concret : une patiente encore suivie annuellement pour un néo du sein s’est vue refuser la demande de renouvellement d’ALD sous prétexte qu’elle n’était plus en soin.
4/ Le CAPI non obligatoire, qui ressemble plus à une loterie de fin d’année puisque même en prescrivant selon les recommandations, si vos patients ne les suivent pas, vous n’êtes pas rémunérés.
Plusieurs interrogations auxquelles j’aimerais qu’un juriste me réponde :
Si nous sommes rémunérés par un système de forfaits, nous serons donc payés par l’assurance maladie, nous ne serons donc plus libéraux.
De ce fait, pourrions-nous prétendre aux 35 heures, aux RTT, aux congés payés ?
Nos confrères médecins salariés de la CPAM ou du travail seront-ils obligés comme nous d’intégrer les tableaux de gardes afin d’assurer la continuité des soins ?
Le coût de nos secrétariats sera-t-il pris en charge par nos CPAM ?
Le salaire de nos remplaçants sera-t-il honoré par notre sécu ?
J’aimerais sincèrement éclaircir notre statut, si le paiement à l’acte disparaît.
Je souhaite que la médecine libérale ne soit pas assassinée en 2012.
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