Edition spéciale Cancérologues Hématologues

EDITORIAL - Le futur au présent

Publié le 28/11/2013
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Crédit photo : BSIP

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Crédit photo : PHANIE

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Crédit photo : BSIP

Nous ne nous étendrons pas sur les constatations des bilans partiels des précédents Plan Cancer et les objectifs du Plan Cancer III, ils sont déjà très largement connus et diffusés. Relevons seulement trois points qui montrent bien que, au-delà de la volonté, il faut instaurer des moyens et une responsabilité organisationnelle pour faire bouger les choses :

• La stagnation, voire la perte d’efficacité de la prévention du tabagisme en France comparée par exemple à l’Angleterre

• Les difficultés rencontrées par les systèmes de dépistage, qu’il s’agisse du col utérin – il y a toujours 3 000 cas invasifs par an – ou des cancers du sein ; avec une part notable laissée au dépistage individuel : souvent avec dépassement d’honoraires. L’accès à une imagerie contemporaine et moderne (prenons l’exemple de l’IRM) ne s’est pas amélioré.

• Le Pr Vernant insiste très largement sur les moyens de réduire ces inégalités, extrêmement choquantes en effet. Gageons qu’ils seront pour une part – et la plus grande possible – efficaces !

Plus étonnante est la structure pyramidale au sommet de laquelle se situe l’INCa. Elle s’articule sur les sept cancéropôles, qui eux-mêmes s’appuient régionalement sur les organisations existantes : réseau de santé, groupement coopératif de santé, convention…

Enfin notons – et à titre personnel avec une très grande satisfaction – la volonté de maintenir le DESC de Cancérologie. En effet, le risque est bien, alors que la complexité des cancers est progressivement élucidée, d’avoir dans l’avenir des spécialistes qui n’auraient pas une formation suffisante.

Deuxième grand thème de ce numéro : les réseaux. Toutes les réalisations montrées en exemple ont apporté un surcroît d’efficacité, rapproché les équipes soignantes et les patients, simplifié le trajet de soins, et probablement rendu beaucoup plus lisible la démarche auprès des généralistes, mais ceci n’est pas prouvé.

Au plan scientifique, cinq sujets sont abordés. Celui des antiangiogéniques, et de leurs échecs en matière de traitement adjuvant des cancers colorectaux. Celui des cancers bronchopulmonaires, du découpage des adénocarcinomes selon leurs anomalies moléculaires. Elles constituent pour la plupart des cibles et permettent un traitement, efficace chez 60 % des patients mais de durée de réponse limitée.

Les cancers de l’ovaire posent également le problème d’une très grande diversité moléculaire et de cibles très variables, dont PARP, que certains inhibiteurs adressent directement, au moins dans les formes porteuses d’une mutation d’un gène BRCA1 ou A2.

Enfin, nous évoquons le séquençage à très haut débit (NGS) et les bénéfices qu’on peut souhaiter en obtenir. Il est clair qu’il demande des équipes biomathématiques et statistiques extrêmement structurées, très peu nombreuses en France. Leur possibilité technique et leur sensibilité sont indispensables en matière de recherche cognitive, mais peut-être pas s’agissant de détecter les anomalies ciblables présentes dans la majorité des cancers humains. En revanche, le NGS permettrait d’accélérer le débit d’études qui, pour le moment, a été remarquablement rempli par le réseau des plateformes de génétique somatique mise en place par l’INCa et qui nous est fortement envié.

Ce n’est donc que dans le dernier thème, l’immunothérapie, qu’on aborde ce qui à notre avis sera leprochain tournant cognitif et/ou opérationnel. En l’espèce, avec trois modalités : la vaccinothérapie ; la vaccinothérapie et le transfert de lymphocytes ; et, surtout, l’augmentation de la cytotoxicité T, par inhibition des relations de freinage rencontrées entre tumeur et lymphocytes, comme le montrent à l’heure actuelle les inhibiteurs de CTLA4 et de PD1. En effet, on garde l’impression d’une pensée « tout moléculaire » alors que, précisément, des progrès majeurs sont accomplis dans la connaissance des cellules souches ou à potentiel totipotent dans les différents cancers, de leurs plasticités, de leurs adaptations à différents tissus et de leurs résistances à la majorité des agents existants ; progrès aussi dans la caractérisation d’ADN circulant, qui peut permettre d’établir des signatures beaucoup plus simples que le NGS.

On peut d’ailleurs noter qu’il s’agira d’un des principaux thèmes des conférences plénières du Congrès de la Société Française du Cancer qui est, en soi, un événement créateur et incitatif pour les cancérologues et chercheurs en cancérologie. Quoi qu’il en soit, on ne peut que se féliciter de la dynamique qui ne se dément pas une seconde dans le domaine de l’organisation du diagnostic, des soins et de la recherche mise en place depuis le 1er Plan Cancer.

 Pr Michel Marty

Source : Bilan spécialistes