Historique
La gale est une affection connue depuis l’Antiquité. Elle avait quasi disparu à la fin de la Seconde Guerre mondiale, pour réapparaître dans les années 1960.
Dans les institutions (maison de retraite, essentiellement), il est difficile de faire une différence entre un prurit sénile et une gale.
L’immunodépression de certains de ces sujets, associée à l’altération des téguments, sont des facteurs pouvant expliquer la survenue d’épidémies au sein des collectivités.
Caractéristiques
La gale est une maladie contagieuse à « éclipses » (elle réapparaît périodiquement).
Le seul réservoir du parasite (Sarcoptes scabiei) est l’homme. Sa survie est brève (de un à quatre jours).
Des températures élevées ainsi qu’une hygrométrie faible augmentent considérablement sa mortalité ; il est éliminé à des températures supérieures à 55 °C durant 10 min. Ce sont les femelles nouvellement fécondées qui assurent la transmission de la maladie.
La transmission directe est responsable de 95 % des contaminations (soit par contact d’un sujet à un autre ou par voie sexuelle : la gale est une maladie sexuellement transmissible). La transmission indirecte est plus rare car les parasites retrouvés dans l’environne ment du sujet malade sont affaiblis et nécessitent plus de temps avant de pénétrer sous la peau. Cependant, dans certaines formes cliniques, la richesse parasitaire de l’hôte infectant explique tout à fait la contamination d’une collectivité par le linge ou la literie.
Eléments cliniques
Après une phase d’incubation silencieuse de trois ou quatre semaines, il y a une phase d’état :
– un prurit intense à recrudescence nocturne débutant sur les cuisses, puis se généralisant en épargnant le cou, le visage et le dos. Ce prurit s’aggrave avec les bains chauds, la tiédeur du lit et le déshabillage ;
– les sillons scabieux. C’est le signe pathognomonique de la gale . Il représente le tunnel que la femelle creuse dans la couche cornée tout au long de sa vie. Parfois peu visible du fait de la saleté cutanée, il peut se terminer à une extrémité par une vésicule perlée, laquelle correspond à l’éminence acarienne ;
– le chancre scabieux génital est un signe fondamental du diagnostic sous la forme de lésions papulo-prurigineuses du gland et des bourses ;
– chez la femme, on retrouve des lésions prurigineuses papulo-croûteuses des mamelons ;
– l’ éruption cutanée dans la paume des mains, la plante des pieds (localisation préférentielle du bébé), les espaces interdigitaux, la région ombilicale, la face interne des cuisses et la région lombaire basse. Elle peut avoir un aspect nodulaire correspondant à un infiltrat pseudo-hématodermique.
La découverte du sillon assure le diagnostic de gale.
La notion de prurit familial ou collectif est également un élément prépondérant.
Formes cliniques
Plusieurs formes sont décrites :
– la gale profuse secondaire à une immunosuppression locale, générale, ou à un état de dénutrition. Les lésions deviennent très étendues ;
– la gale croûteuse ou «norvégienne». Il s’agit d’une forme hyperkératosique due à l’infestation massive du parasite chez des sujets grabataires, cachectiques ou immunodéprimés. Il s’agit d’une forme très contagieuse et non prurigineuse ;
– la gale des gens propres qui se caractérise par un prurit uniquement ;
– la gale des nourrissons ; elle se caractérise par une éruption palmo-plantaire de type vésiculaire. L’enfant est souvent irrité et insomniaque (du fait du prurit).
Certitude
Elle repose sur la mise en évidence du parasite au sein d’un sillon et de son recueil grâce à un vaccinostyle.
Malheureusement, le diagnostic est souvent affirmé en l’absence de cette découverte ; notamment dans le cadre d’un contact avec une personne atteinte, d’éléments cliniques révélateurs, comme les papules ou les sillons, ainsi que le prurit.
Néanmoins, il ne faut pas oublier que tout prurit n’est pas une gale et éliminer une origine métabolique (cholestase, insuffisance rénale), une autre parasitose (pédiculose notamment), les acariens ou, enfin, des causes psychiques.
Le traitement
Les deux types de traitement (local et général) doivent être appliqués de façon simultanée chez les sujets atteints et ceux en contact direct.
1) Le traitement local
Parmi ces traitements, l’Ascabiol se révèle celui qui est le plus efficace. La personne traitée doit prendre une douche avant le traitement. Il faut insister sur l’hygiène des ongles (courts et brossés).
Après séchage, le sujet est badigeonné avec un pinceau plat sur l’ensemble du corps à l’exception du visage, en frottant en cas de pilosité abondante.
A J1, deux badigeons successifs sont réalisés, le second étant fait dès que la peau est sèche (on laisse appliqué 24 heures).
A J2, la peau est rincée au savon doux de manière abondante.
A J8, une nouvelle application est recommandée (comme à J1, mais en une seule fois) en fonction du contexte clinique.
2) Le traitement général
Il repose sur l’utilisation de l’ivermectine (Stromectol) en prise unique de 200 µg/kg.
Dans les formes avec de très nombreux parasites, une deuxième prise est préconisée, associée ou non à un traitement topique.
On utilise parfois une antibiothérapie antistaphyloccocique ou antistreptococcique. Elle doit être débutée de vingt-quatre à quarante- huit heures avant le traitement antiscabieux.
Une évaluation thérapeutique est nécessaire. Le prurit doit rétrocéder au bout de dix jours ; il peut être amélioré par l’utilisation de crèmes hydratantes ou en associant des antihistaminiques. Les traitements locaux peuvent générer une dermite d’irritation (notamment lors des applications multiples).
La conduite
Tout cas suspect doit être signalé à l’autorité compétente de l’institution.
1) L’hygiène élémentaire
Un nettoyage simple et systématique dans la chambre après tout contact avec le patient ou les objets « contaminés » ; se laver les mains et porter des gants lors d’un contact avec une personne contaminée.
2) Le linge
Il doit être manipulé avec précaution et ne doit pas être posé à terre.
Il doit être recueilli dans un sac plastique et transporté à la blanchisserie en respectant le protocole local d’évacuation du linge contaminé.
Un lavage est par la suite effectué. Si le linge ne permet pas un lavage à 60 °C, il faut vaporiser dans une poche hermétique avec un acaricide (A-PAR), et laisser les habits en contact durant trois heures au moins. En l’absence d’acaricide, le linge doit rester hermétiquement fermé durant une semaine avant d’être acheminé suivant le protocole de nettoyage du linge.
3) Le matelas et les tenues
Les tenues doivent être préférentiellement à usage unique.
Le matelas est vaporisé avec un acaricide ; la durée de décontamination est de quarante-huit heures.
4) Les équipements «collectifs»
La personne contaminée n’utilise pas les toilettes communes. Si cela n’est pas possible, il faut désinfecter après chaque utilisation. Le mobilier est désinfecté au moyen d’un produit scabicide. Le matériel de nettoyage est systématiquement jeté ou passé en machine (température de 60 °C).
5) Le déplacement du sujet infecté
Il reste limité durant les quarante-huit premières heures. Il faut prévenir les personnes en contact avec le sujet.
Conclusion
Cette description montre la difficulté de prendre en charge ce problème au sein d’institutions, comme les centres d’hébergement de SDF. Outre l’aspect financier (la prise en charge des traitements par la Sécurité sociale est inexistante se pose le problème de la certitude diagnostique souvent difficile à établir. Aussi, il arrive souvent, du fait d’une impossibilité de réponse pour un individu infecté, de le rejeter de ces structures de démunis. Il se retrouve seul avec un sentiment de honte et de culpabilité devenant ainsi «exclu des exclus».
Bibliographie
Réseau franc-comtois de lutte contre les infections nosocomiales. La gale dans les établissements de soins, éditions Rfclin 2001. Centre de coordination de lutte contre les affections nosocomiales du Sud-Ouest. Recommandations concernant la gestion de la gale dans les établissements de soins et médico-sociaux, éditions Cclin Sud-Ouest 2000.
Grosshans E. Gale sarcoptique : épidémiologie, diagnostic, principes du traitement. « Revue du Praticien », 1994, 41 : 1958-1960.
Chosidow O. Scabies and Pediculosis. « The Lancet », 2000, 355 : 819-826.
Currie B. Ivermectin for scabies, « The Lancet », 1997, 350 : 1551.
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