Dépistage du cancer colorectal

Le généraliste en première ligne

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Publié le 23/11/2017
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DEPISTAGE

DEPISTAGE
Crédit photo : SEBASTIEN TOUBON

Longtemps silencieux, le CCR est accessible à un dépistage. En France, la HAS recommande selon le niveau de risque : - un dépistage individuel opportuniste, pour les patients à risque élevé (signes fonctionnels ou ATCD personnels ou familiaux de surrisque de CCR) ou très élevé (syndrome de Lynch, polypose adénomateuse familiale), - un dépistage organisé communautaire ciblé sur l’âge (50 à 74 ans), pour les patients à risque moyen. Il repose depuis 2015 sur le test immunologique quantitatif (FIT), plus simple à réaliser et plus performant que le gaïac (il dépiste 2,5 fois plus de CCR, 3,7 fois plus d’adénomes avancés), même s’il reste limité à la détection d’adénomes qui ont « parlé ».

Oui à une consultation de prévention dédiée 

Les taux de participation au dépistage organisé du CCR restent loin des 45 % nécessaires pour observer une baisse de la mortalité. En 2017, deux études en médecine générale tentaient d’y remédier :

- À Nantes, une étude (1) randomisée a réparti en 3 groupes les 1 446 médecins généralistes de 33 044 patients relevant du dépistage organisé. Un groupe recevait la liste des patients n’ayant pas répondu à l’invitation au dépistage (10 476 patients), un autre le chiffre de participation régionale au dépistage, le 3e rien (groupe témoin). « La participation à 1 an a augmenté de façon significative mais discrète (+5 %) dans le groupe avec liste de patients n’ayant pas répondu versus témoin. Le chiffre de participation régionale n’a eu aucun effet », résume le Dr Jean-Michel Nguyen, épidémiologiste au CHU de Nantes.

- À Vals-les-Bains (cabinet du Dr Isabelle Fay, médecin généraliste), une étude (2) menée par Clémentine Gandilhon (interne de niveau 1) en collaboration avec le CHU de Lyon, a montré qu’un appel du médecin traitant aux 234 patients concernés augmentait la participation au dépistage organisé de 25,6 % à 49,6 % (64 % si le Dr Fay appelait, 35,7 % si c’était l’interne). « Nous avions le même argumentaire (il faut détecter les petites tumeurs et les traiter par simple résection), mais le patient se sent plus concerné si son médecin l’appelle », note le Dr Fay, soulignant l’immense intérêt qu’aurait « une consultation de prévention dédiée ». Son interne, Clémentine Gandilhon, témoigne de « l’implication très inégale des médecins généralistes dans le dépistage organisé ». Sa thèse porte « sur le devenir des patients à test FIT positif car environ 10 % de ces patients à haut risque de lésions prénéoplasiques ne font pas la coloscopie recommandée », s’alarme-t-elle. Rappelons qu’un FIT test positif, c’est dans 57 % des cas un cancer ou un polype avancé ! (vs 41 % si gaïac +). Il faut explorer : coloscopie ou si refus sigmoïdoscopie souple ou coloscopie virtuelle ; la peau du patient est en jeu ! (des hémorroïdes ne doivent pas rassurer).

Et aux USA

Les recommandations 2016 de l’United States Preventive Services task Force (USPSTF) préconisent en population générale : un dépistage du CCR de 50 à 74 ans (voire plus si en bonne santé et jamais dépisté) ; une participation massive de la population cible au dépistage pour réduire la mortalité par CCR.

À cette fin, l’USPSTF reconnaît diverses techniques de dépistage, chacune a ses avantages et ses inconvénients, aucune n’est parfaite : gaïac ou FIT/an, FIT-ADN/an ou 3 ans, sigmoïdoscopie souple/5 ans (10 ans si avec FIT annuel), coloscopie virtuelle/5 ans ou coloscopie/10 ans. En population à risque, l’USPSF recommande un dépistage plus précoce, plus fréquent et par coloscopie. Retenons l’idée : le meilleur dépistage est celui que le patient effectue, à la fréquence préconisée et pendant toute la période à risque… Un sacré défi au long cours pour le médecin traitant.

 

1.Rat C et al., JAMA 2017 ;318-824. Doi:10 0001/jama.2017.11387
2.Gandilhon C et al., Poster n° 295, JFHOD 2017
3.JAMA. 2016;315(23):2564-2575. doi:10.1001/jama.2016.5989


Source : Le Quotidien du médecin: 9621