Un correspondant de Russie a publié dans la « Medizinische Klinik » de Berlin, en octobre dernier, une étude sur les conditions de la médecine dans la Russie actuelle.
Comme toutes les autres classes cultivées, les médecins ont beaucoup souffert de l’apparition du bolchevisme. Ils étaient classés parmi les bourgeois et, dans les accusations lancées contre eux, se trouvait celle-ci : « Seules les classes riches bénéficiaient de leur traitement médical ».
Les premiers médecins qui eurent à souffrir du bolchevisme furent les officiels, médecins d’usines, de prisons, etc. ils furent chassés et supplantés par des assistants médecins ou des médecins militaires. Dans les maisons de santé particulières, seul le personnel inférieur réclama une augmentation de salaire, mais, dans les hôpitaux du gouvernement ou dans les hôpitaux militaires, tels qu’ils existent encore, il y eut des conflits sérieux et les médecins furent journellement assaillis et emprisonnés. Dans les hôpitaux militaires, la position des médecins devint dépendante de celle de leurs subordonnés. La gestion cessa de fonctionner et elle fut remplacée par une Commission siégeant dans le Soviet local.
Le praticien eut aussi à souffrir : ses honoraires restèrent au même taux et le nombre de malades particuliers diminua considérablement. Durant l’hiver de 1918, il y avait des médecins qui ne recevaient que deux ou trois roubles par visite.
Des professeurs très connus n’eurent pas ce genre d’ennuis car ils continuaient à toucher leur traitement ; mais , plus tard, les bolcheviks les cataloguèrent aussi « grands bourgeois ».
Les classes cultivées, comme les ouvriers, refusèrent de reconnaître la nécessité d’une rémunération plus élevée du travail médical. Les salaires des médecins fonctionnaires s’élevèrent, quand les salaires des ouvriers et des fonctionnaires s’élevèrent graduellement. Cela, joint à l’augmentation des rations des médecins fonctionnaires, attira au camp bolcheviste des médecins en grand nombre, même des vieux médecins.
Durant le printemps de 1918, bien des membres des classes cultivées prirent part aux affaires communales et de nombreux médecins s’enrôlèrent dans l’Armée Rouge nouvellement formée ; enrôlement pour lequel on n’exigeait pas la déclaration de solidarité ; on leur demanda seulement de se déclarer neutres. L’apparition du choléra à ce moment obligea le gouvernement à augmenter le nombre des médecins fonctionnaires ; mais la rareté des aliments qui obligeaient les pauvres à trouver leur vie dans les tas d’ordures, empêcha d’arrêter efficacement la maladie.
Les bolcheviks et les médecins vivaient en paix ensemble, quand il s’agissait exclusivement de questions médicales, mais la lutte commençait quand on les obligeait à se réunir en comités. Lorsqu’on classait les habitants d’une ville, le gouvernement mettait les médecins dans la troisième classe, celle des gens peu utiles à la communauté. On les rangeait ainsi dans la même catégorie que les hommes de loi et les artistes. Les personnes de troisième classe recevaient une ration alimentaire dite hebdomadaire qui, en réalité, suffisait à peine pour un jour. Par suite, les médecins étaient très heureux d’être payés en nature.
Quand, en octobre 1918, on mit en vigueur la mesure qui logeait les prolétaires dans les maisons des riches, on accorda aux médecins deux pièces pour l’exercice de leur profession.
(« British Medical Journal, traduction du Dr Menier pour « La Chronique médicale »)
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