ANGOISSE DE L’ERREUR médicale, burn-out, stress, gardes difficiles, épuisement, conduite addictive, mais aussi harcèlement, deuil, divorce… À qui en parler, et comment ? À partir de demain, 1er octobre, tous les médecins et infirmiers spécialisés (IADE) en anesthésie-réanimation ainsi que leur entourage pourront bénéficier d’une oreille attentive et professionnelle grâce à l’ouverture d’une ligne d’écoute* anonyme et gratuite. À l’autre bout du combiné, 15 psychologues peuvent, selon le besoin exprimé, orienter le praticien en souffrance vers un psychologue de ville, un médecin traitant, un réseau d’addictologie, un médecin du travail, un contact syndical. Ou simplement l’écouter.
40% des anesthésistes en burn-out.
Cette initiative est le résultat d’une réflexion de la commission « santé au travail » du Collège français des anesthésistes-réanimateurs (CFAR) qui a pris conscience en 2007 de la réalité de la souffrance professionnelle après trois suicides consécutifs d’anesthésistes en Alsace. Trois ans plus tard, une enquête menée par la commission démontrait que 65 % des anesthésistes déclarent ne pas avoir les moyens d’aider un collègue en difficulté ; 70 % acceptent volontiers une aide extérieure pour approcher un confrère en souffrance ou pour eux-mêmes ; 80 % estiment qu’une structure de santé devrait aussi être accessible aux médecins libéraux. Enfin, 40 % confessent être victimes de l’une des trois dimensions du burn-out : dépersonnalisation, épuisement émotionnel (absence de motivation) et manque d’accomplissement personnel (sentiment d’inaptitude à faire face à sa tâche ou à ses missions).
Vol de dope.
Pour le Dr Max-André Doppia, anesthésiste du CHU de Caen, vice-président du CFAR et secrétaire général adjoint du syndicat SNPHAR-E, ce nouvel outil « n’est pas une psychothérapie en ligne, mais un moyen de rompre l’isolement et de clarifier le type de souffrance auquel font face les médecins pour mieux les orienter, voire trouver des solutions ». Que la conversation dure cinq minutes ou cinq heures, à partir du moment où un médecin décroche son combiné, il peut appeler jusqu’à cinq fois par an la plateforme. « La culture médicale élève les médecins dans l’étouffement de la souffrance, analyse encore le Dr Doppia. Il faut du temps pour avouer qu’on picole, qu’au bloc on a connu un moment de faiblesse, etc. » Le praticien a aussi accès à la plateforme par un service de chat (fenêtre de discussion en ligne). « Écrire qu’on pique de la dope à l’hôpital est parfois plus simple que le dire » explique l’anesthésiste.
Tests d’autoévaluation.
Le CFAR a aussi développé sur son site Internet un ensemble de services. Le collège met à disposition un annuaire de ressources, une base bibliographique, des autotests (sur le burn-out, la fatigue, les dépendances à l’alcool, au tabac, à l’Internet, etc..). Les visiteurs de ce site peuvent également y trouver un livret d’information pour les responsables académiques et les internes, particulièrement exposés aux facteurs de risques psychosociaux au travail (isolement familial, gardes à répétition, privation de sommeil). « Avec tout cela, si on arrive à éviter ne serait-ce qu’un suicide de professionnel de l’anesthésie par an, on aura gagné », conclut le Dr Doppia.
* Numéro vert 0 800 00 69 62, ouvert 24 heures/24, gratuit depuis un poste fixe.
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