Les inquiétudes des praticiens hospitaliers

Publié le 27/10/2011
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Les instructions récentes du ministère aux Agences régionales de santé (ARS)* séparent, dans un artifice redoutable, les malades déjà hospitalisés et requérant des soins urgents nocturnes ou de week-end (« continuité des soins », sans budget spécifique) des malades nouvellement pris en charge la nuit et le week-end (sauf samedi matin) et les jours fériés (« permanence des soins »). Seule cette « permanence des soins » sera dotée d’un budget spécifique. Il est clair dans le texte ministériel qu’il s’agit d’un « outil majeur de la réorganisation de l’offre de soins ». Or, notamment en hépato-gastroentérologie, les malades les plus lourds (cirrhoses, maladies inflammatoires intestinales en poussée, pancréatites, etc..) sont essentiellement hospitalisés dans le secteur public, et la permanence des soins qu’ils exigent, si elle n’est pas rémunérée par le système actuel d’astreinte et de garde, nécessitera des récupérations horaires diminuant la présence diurne. Pour les nouveaux malades, le rôle de l’hépato-gastroentérologue ne se limite pas à l’endoscopie thérapeutique, mais à un conseil diagnostique et thérapeutique spécialisé spécifiquement hospitalier pour les malades graves. Associer des hépato-gastroentérologues hospitaliers et des libéraux volontaires sur un plateau technique commun, pourquoi pas, mais déplacer des malades d’un établissement à l’autre serait déraisonnable.

Prendre de l’argent dans le budget des hôpitaux publics pour financer des astreintes dans le secteur privé ne peut qu’appauvrir les praticiens hospitaliers : accroître le différentiel de revenu avec les libéraux (qui ne sont pas rémunérés pour l’astreinte, mais sont payés à l’acte lorsqu’ils se déplacent en urgence), est-ce vraiment une action qui favorise la prise en charge « hors heures de jour » des urgences, qu’elles soient internes ou externes ? Ou est-ce encore un moyen pervers d’affaiblir l’hôpital public, en diminuant nécessairement la prise en charge et la sécurité des malades dans un but exclusivement comptable ?

*Circulaire DGOS/R5 n° 2011-74 du 24 février 2011, relative au guide méthodologique d’élaboration du schéma régional d’organisation des soins (SROS-PRS).

 Dr ALEXANDRE PARIENTE

Source : Bilan spécialistes