Stéroïdes sexuels et sclérose en plaques

Les résultats de l’étude POPARTMUS sont négatifs

Publié le 30/06/2014
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On sait depuis l’étude PRIMS (Pregnancy in Multiple Sclerosis) en 1998 que la fréquence des poussées diminue pendant la grossesse chez les femmes atteintes de SEP et qu’elle augmente dans le premier trimestre du post-partum. Un tiers des femmes développe une poussée pendant cette période, ce qui équivaut à une multiplication du risque de 2 à 2,5 par rapport au risque de base. La question s’est alors posée de savoir si cette poussée pouvait être évitée en sachant que les traitements dont on disposait au moment de l’étude ne pouvaient pas être prescrits pendant la grossesse et que, même s’ils étaient pris juste après l’accouchement, ils ne permettaient pas d’éviter la survenue d’une poussée étant donné que leur délai d’action variait entre 3 et 6 mois. L’hypothèse physiopathologique selon laquelle les stéroïdes sexuels fabriqués à des taux élevés par la femme pendant la grossesse la protégeraient et que leur chute brutale après l’accouchement entraînerait un phénomène de rebond a alors fait son chemin. C’est pour vérifier ce concept que l’étude POPARTMUS a débuté en 2005.

L’inclusion a duré 6 ans, jusqu’en octobre 2011. Les femmes enceintes étaient incluses dans l’étude avant la trente-sixième semaine d’aménorrhée, elles devaient présenter une SEP selon les critères diagnostiques de Mac Donald 2001, avoir une forme à poussées, rémittente ou secondairement progressive avec poussées. Les principaux critères d’exclusion étaient la volonté d’allaiter, le souhait de prendre un traitement immunomodulateur immédiatement après l’accouchement sans attendre les 6 mois de l’étude et le refus de prendre une contraception non hormonale dans le premier trimestre après l’accouchement. 202 femmes ont participé à l’étude. 102 d’entre elles recevaient du nomegestrol acétate (Lutényl) dès le lendemain de l’accouchement à la dose de 10 mg/j et de l’estradiol percutané à partir du quinzième jour à raison d’un patch par semaine de Dermestril Septem75 µg. 100 femmes recevaient des placebos équivalents. La période de traitement des trois premiers mois du post-partum fut suivie par une phase de trois mois sans traitement. L’objectif principal était d’évaluer le taux annualisé de poussées dans la période des trois mois suivant l’accouchement.

Pas de différence significative entre les deux bras de l’étude. Le taux de poussées dans le groupe traité (0,90) et dans le groupe placebo (0,97) n’était pas significativement différent. De même, il n’y avait pas de différence dans l’activité IRM du sous-groupe de 28 femmes suivies mensuellement en IRM, ce qui est cohérent avec l’observation clinique.

"On peut se poser la question de savoir si l’effectif était suffisant, souligne le Pr Sandra Vukusic. Mais on peut raisonnablement estimer qu’une tendance aurait du se dégager avec 200 femmes incluses. Je ne pense pas qu’on se soit trompé sur le rôle des hormones sexuelles. Peut-être fallait-il choisir une autre hormone, de plus fortes doses ? Quoi qu’il en soit, un autre travail basé sur cette même hypothèse n’est pas prévu pour l’instant, d’autant que nous disposons aujourd’hui dans les situations d’urgence de médicaments à délai d’action plus rapide. L’équipe du Professeur Jérôme De Sèze à Strasbourg a élaboré un protocole destiné à évaluer l’effet préventif des corticoïdes par voie intraveineuse mensuelle en post- partum, ce qui ne contre-indiquerait ni l’allaitement ni la reprise d’un traitement de fond. Cela me semble une bonne stratégie mais cette étude n’a pas de financement pour l’instant". À signaler également que des travaux américains présentés en avril 2014, évaluant l’efficacité de l’estriol versus placebo chez des femmes atteintes de SEP se sont également révélés négatifs sur la fréquence des poussées à 2 ans.

D’après un entretien avec le Pr Sandra Vukusic, Hôpital Pierre Wertheimer, Bron

Dr Brigitte Martin

Source : Bilan spécialistes