MSP, Réseaux de soins:  l'Institut Montaigne propose d'aller plus loin

Publié le 19/06/2016
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La campagne pour les présidentielles n’a pas encore commencé que les propositions de réforme du système de santé affluent de toute part. Après le think tank « Économie santé » des Échos, c’est au tour de l’Institut Montaigne de publier un rapport pour « réanimer le système de santé ». Une feuille de route « pour sortir de l’impasse dans laquelle notre système de santé se trouve aujourd’hui », précise le think tank libéral. Pour la rédiger, l'Institut, qui se veut « laboratoire d’idées », a notamment réuni, au sein d’un groupe de travail présidé par l’économiste Claude Le Pen, l’ancien président de l’Assurance maladie, Frédéric Van Roekeghem, Michel Chassang, l’ancien chef de file de la CSMF désormais président de l’Unapl, ou encore Guy Vallancien.

"Des atouts hétérogènes"

C’est un système aux « atouts hétérogènes » qu’analyse l’Institut Montaigne. Reconnu pour sa qualité et ses performances, ses innovations médicales et le « socle de valeurs solides » qui le sous-tend, le modèle français « fait face aujourd’hui à des défis essentiels » que pointe le rapport. En effet, le système de santé français, auquel 11 % du PIB a été consacré en 2015, affiche « un déficit budgétaire persistant » qui ne devrait pas aller en s’améliorant : « l’augmentation des dépenses de santé (…) continue d’aggraver le déficit de l’Assurance maladie ». Il offre une « qualité des soins hétérogènes » car, si l’espérance de vie moyenne des Français figure parmi les plus longues au niveau mondial, se cachent derrière de « fortes disparités entre hommes et femmes ainsi qu’entre catégories professionnelles ». L’Institut Montaigne relève également une « offre de soins mal adaptée aux besoins » et déplore une « une érosion de la recherche biomédicale ».

À cet état des lieux, les auteurs du rapport ajoutent « le désenchantement des professionnels de santé ». Ils « sont aujourd’hui touchés par une véritable crise », de confiance notamment, et « les trois quarts se déclarent même inquiets pour l’avenir de leur profession », assure le groupe de travail.

5 axes de réforme

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Fort de ce constat, l’Institut Montaigne suggère « 5 axes majeurs » pour l’évolution du système de santé. Et souligne que « la qualité et l’information » devront être « au cœur de la réforme ». Ainsi, avant toute chose, « si le besoin de changement est compris du plus grand nombre, citoyens et professionnels de santé », Thomas London, responsable Santé chez McKinsey et rapporteur du groupe de travail, considère que « la première étape pour les décideurs doit donc être un effort de pédagogie et un discours de vérité sur les marges de progrès de notre système (…) pour ancrer dans les esprits la nécessité de la réforme ».

Parmi ses recommandations, l’Institut Montaigne accorde une petite place à la médecine de ville, au titre de son « axe 2 : renforcer la pertinence, la qualité et l’efficience de l’offre de soins autour du patient ». Et fait quelques propositions qui, sans être révolutionnaires, ont l'originalité de s'inspirer d'exemples étrangers.

À cet égard, il est question d’ « organiser des parcours de soins intégrés entre ville et hôpital ", ce qui revient à "mettre en adéquation l'offre de soins avec les besoins nouveaux créées par cette transition épidémiologique", des épisodes aigus aux risques chroniques. Pour se faire, l'Institut Montaigne recommande "de construire localement une organisation nouvelle du système qui intègre les différents acteurs du soin". Et de faire reposer l'animation des parcours sur "un coordonnateur": généraliste, établissement de santé, assurance maladie ou encore "case manager dédié", le " choix pourra varier selon les cas et les parcours".

Une ROSP avec des objectifs cliniques

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Au-delà d'une meilleur coordination ville-hôpital, le think tank souligne la nécessité de « favoriser la consolidation de la médecine de ville » mais reste assez classique dans ses propositions. Affirmant que "l'extrême fragmentation de la médecine générale en France est un frein à la productivité", il plaide pour la mise en place de "dispositifs d'incitation au regroupement" et, nouveauté, suggère des aides au financement "au niveau individuel (par exemple au travers de dispositifs fiscaux incitatifs), ce qui permettrait de stimuler et de s'appuyer plus directement sur l'initiative des praticiens eux-mêmes".

Autre idée intéressant les médecins de ville: « faire évoluer les modalités tarifaires pour valoriser la performance, la qualité et la coordination des soins ». Là encore, il s'agit d'une évolution qui doit répondre à l'importance prise par les pathologies chroniques. Les nouvelles règles devront "renforcer la rémunération à la performance, plutôt qu'au volume, et créer des incitatifs transversaux à l'optimisation des parcours". Plus concrètement, cela pourrait passer par l'intégration "dans la ROSP des objectifs formulés en termes de résultats cliniques et pas seulement de moyens".

Revoir la gouvernance 

Les membres du groupe de travail proposent également de « transformer la gouvernance de la politique de santé ». Partant du constat que "l'Etat a du mal à assumer à la fois ses responsabilités en matière de politique de santé et de garant de la qualité et de l'accessibilité, et son rôle technique d'opérateur", les auteurs du rapport proposent "de séparer très clairement ces deux fonctions". Dans ce schéma, "le rôle de l'Etat serait recentré sur la définition et la conduite de la politique de saté, la fixation des grandes orientations du système, des équilibres économiques et des arbitrages macro-économiques". Par ailleurs, un établissement public indépendant, opérateur issu de la fusion de l'Assurance maladie et de services du ministère de la Santé, conduirait "la mise en oeuvre de la politique et la gestion du risque".

Réseaux de soins et bouclier sanitaire

Abordant la mixité du système d'assurance maladie français, l'Institut Montaigne souligne que, si elle génératrice de coûts de gestion dédoublés, "elle peut être vue comme un atout car elle permet de diversifier la prise en charge et d'offrir des choix de couverture adaptés". 

La vingtaine d’auditions réalisée par le groupe de travail l’a également conduit à proposer de « clarifier les places respectives de l’Assurance maladie et des complémentaires santé ». Il s’agit, d’une part, de distinguer ce qui relève de la première de ce qui incombe aux secondes. Les experts du think tank suggèrent de réflechir à un bouclier sanitaire qui, "s'il pose de nombreuses questions, a l'avantage de substituer à toutes les exonérations de participations existantes un plafond unique et général d'exonération" ainsi qu'au "contenu du panier de soins de base".

Ils défendent, en revanche, plus rigoureusement la mise en place de véritables réseaux de soins, "appuyés sur des négociations tarifaires et des relations contractuelles avec les professionnels de santé". Et faire des complémentaires « des acteurs au service de l’innovation », l’Institut Montaigne n’envisageant rien de moins que « faire de la France un leader du numérique en santé ».


Source : lequotidiendumedecin.fr