"Non substituable" : une thèse de médecine générale énonce la réalité des chiffres

Publié le 25/05/2014

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Source de tensions entre médecins et Caisses d'Assurance Maladie, la mention « non substituable » sur les ordonnances a fait l'objet d'un travail de thèse du DUMG de Toulouse - d’une année antérieure à la polémique actuelle - présenté au dernier congrès de la Médecine Générale (3-5 avril, Paris) comparant sa perception par les médecins généralistes et les pharmaciens.

Un questionnaire, concernant la mention « non substituable » sur leurs ordonnances, a été adressé à 2 194 médecins de la région Midi Pyrénées et 351 réponses ont été retenues. Le même questionnaire a été envoyé à 1088 pharmaciens d'officine et 236 ont été retenus. Une des questions a porté sur la proportion de la mention « non substituable » portée sur les ordonnances pour les médecins et les pharmaciens. Une autre sur les raisons de cette mention lors de la prescription et sur leur confiance dans l'efficacité du générique par rapport au médicament princeps (bioéquivalence), une autre encore sur les classes de médicaments les plus souvent « non substitués » et pourquoi. Enfin la fréquence de demande des patients pour ne pas substituer les médicaments prescrits a été étudiée.

On sait que certaines classes médicamenteuses sont moins fréquemment substituées en raison de doutes sur l’équivalence d'efficacité des génériques par rapport au médicament princeps. Les prescriptions pour les personnes âgées sont aussi moins souvent substituées du fait de leurs propres réticences et du risque de confusion dans la prise de médicaments.

Sur l’ensemble de leurs prescriptions, les médecins évaluent à moins de 5 % la part des lignes d’ordonnances suivies de la mention « non substituable » alors que les pharmaciens l’estiment entre 5 et 10 %.

La demande exprimée par le patient est le premier déterminant évoqué par les médecins pour justifier cette mention. Pour les pharmaciens, cette présence sur l’ordonnance est la principale raison qu’ils énoncent pour justifier la non substitution ; la demande du patient ne vient qu’en second.

La mention « non substituable » est rare pour certaines classes thérapeutiques (antibiotiques, antihypertenseurs, inhibiteurs de la pompe à neutrons, hypocholestérolémiants, antidépresseurs), mais très fréquente pour d'autres qui sont l'objet de polémiques sur l'efficacité de leurs génériques (lévothyroxine, antiépileptiques). Les réticences à la substitution sont plus fréquentes chez les personnes âgées (plus de 80 %). Enfin les pharmaciens ont davantage confiance dans la bioéquivalence du générique (86,4 %) par rapport au princeps que les médecins (67 %)

En conclusion, les médecins déclarent avoir peu recours à la mention « non substituable » alors que les pharmaciens d’officine, au plus prêt de la délivrance, estiment que celle ci est plus fréquemment utilisée. Cette différence de perception entre médecins et pharmaciens, est peut-être attribuable à la part d’ordonnances où l’apposition du « non substituable » est inscrit seconde intention, soit que les patients retournent consulter son médecin à cet effet, soit qu’ils l’inscrivent eux mêmes sur l’ordonnance. Lorsqu’un patient ne désire pas se voir délivrer de générique, il va plus volontiers le demander à son médecin qu’à son pharmacien. Enfin, médecins comme pharmaciens restent sensibles aux données de la science quand un doute existe du fait d'études sur la moindre efficacité du générique par rapport au princeps pour certaines classes de médicaments.

1- Vincent Magnaval. Perception de l'utilisation de la mention "non substituable" par les médecins généralistes et les pharmaciens d'officines. Communication orale. 4 avril 2014. Palais des congrès. Paris.
Dr Jean-Pierre Rageau

Source : lequotidiendumedecin.fr