D ANS toutes les fonctions qu'il a occupées jusqu'à présent, Jack Lang, qui, par ailleurs, a été un remarquable ministre de la Culture et a ramené la paix à l'Education nationale au prix d'une réforme avortée, nous a habitués à ses provocations.
Il faut toujours qu'il aille plus loin. Comme il est à peu près impossible de trouver la réforme qui fera de son ministère l'instrument performant de la formation des générations à venir, M. Lang a cherché ailleurs. Et il a découvert que ce serait drôle de donner droit de cité aux différents dialectes dont la France est généreusement pourvue. Il aura fait des heureux en Bretagne, en Corse ou dans le Languedoc, et à tous ceux de nos concitoyens qui ont droit à leur particularisme. Mais il n'a pas rendu service au français. En effet, il propose que, dès la maternelle, les tout-petits soient d'abord éduqués dans leur langage vernaculaire, et n'apprennent que plus tard le français. Jack Lang applique ainsi ce que nous appellerons le principe de microdémocratie, qui consiste à donner satisfaction à chaque individu avant de contenter les groupes ou mieux encore l'ensemble de la communauté nationale.
La mise en œuvre d'une telle politique est contraire à tout ce que nous enseignent les crises de la société française contemporaine. On n'en finit plus, dans toutes les tribunes offertes par les médias, de dénoncer le communautarisme, le corporatisme et le recul de l'intégration des minorités. Le meilleur remède à ces maux nouveaux ne serait-il pas le principe républicain de l'assimilation ? Car, si on donne au Breton préséance sur le français, au nom de quoi ne permettrait-on pas aux enfants maghrébins d'apprendre l'arabe avant le français ? Et pourquoi ne pas accepter que cet étrange langage des banlieues, incompréhensible pour celui qui est allé à l'école laïque et républicaine, ait une primauté sur le français ?
Bien entendu, c'est dans les milieux nationalistes ou républicains que l'on entend les critiques les plus véhémentes du projet de Jack Lang. Mais ce n'est pas seulement la république qui est en jeu. C'est d'abord le choix de société que nous voulons faire, c'est savoir si nous voulons tisser entre nous tous, et quelles que soient notre religion et notre origine, des liens qui effacent nos différences. C'est ensuite de savoir si nous allons renforcer le français face à la concurrence de l'anglais ou si nous allons diluer sa vigueur dans quelques douzaines de dialectes ou patois.
Il ne faut pas toucher à la langue, il faut au contraire la servir, en la lisant, en la parlant et en l'écrivant bien. Il faut que l'école soutienne ce dessein essentiel. Le pire serait qu'elle fît exactement le contraire.
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