Depuis 2 ans la rémunération sur objectifs se fait attendre

Plus de 900 jeunes médecins privés de primes

Publié le 24/04/2014
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Crédit photo : PHANIE

Le Regroupement autonome des généralistes jeunes installées et remplaçants (REAGJIR) a le premier tiré la sonnette d’alarme, indiquant que le règlement de la rémunération sur objectifs de santé publique (ROSP) pour les jeunes généralistes était très en retard.

« Plus de 900 nouveaux installés sont toujours en attente du paiement d’une éventuelle rémunération au titre de l’année 2012, principalement des généralistes médecins traitants », reconnaît la CNAM dans un courrier adressé à l’Union nationale des omnipraticiens français (UNOF-CSMF). « Pour la plupart, il s’agit de praticiens installés depuis moins de deux ans », précise le Dr Lucas Beurton, président de REAGJIR.

Installé à Bazancourt (Marne) en janvier 2012, le Dr Renaud Miller est de ceux-là. Il attend toujours le paiement de sa ROSP pour 2012 et 2013. « Nous sommes neuf dans ce cas dans mon département », indique-t-il au « Quotidien ». Le paiement relatif à l’année 2012 aurait dû lui être réglé le 15 avril 2013. Mais il n’a rien vu venir, la caisse se disant « dans l’incapacité à comptabiliser les patients » pour lesquels il est médecin traitant.

Le praticien reçoit pourtant un relevé trimestriel sur lequel figurent ces informations, mais sa CPAM lui a répondu qu’il s’agissait de deux systèmes informatiques indépendants ne communiquant pas entre eux. Renaud Miller a fait ses calculs. Il estime à environ 3 000 euros la somme qui lui est due pour 2012. « La caisse m’a prévenu que je ne pouvais prétendre à aucun intérêt de retard, mais m’assure chaque mois que je serai payé le mois prochain. J’attends toujours ». Pour l’année 2013, Renaud Miller estime sa rémunération à 5 000 euros. « Le côté immoral de cette affaire, ajoute-t-il, c’est que cela vise de jeunes médecins qui ont souvent besoin d’investir dans le cadre de leur installation ».

Des logiciels longs à adapter

D’où vient le blocage ? La CNAM n’a pas été en mesure de répondre à nos questions. Les syndicats ont leur idée sur la question. La ROSP, mise en place dans le cadre de la convention de juillet 2011, prévoit comme pour les médecins séniors une rémunération basée sur le nombre de patients déclarés ainsi que sur le respect d’un certain nombre d’indicateurs et sur leur évolution entre le 1er janvier et le 31 décembre de l’année considérée. Problème : pour un médecin installé en cours d’année, le ratio est impossible à chiffrer. L’avenant 10 signé en février 2013 a modifié le mode de calcul pour ces jeunes installés en tenant compte notamment de leur patientèle à la fin de l’année (et non plus au début) afin qu’ils ne soient pas pénalisés. Selon le Dr Claude Leicher, président de MG France, il était impossible à la CNAM, jusqu’à la signature de l’avenant, de calculer la ROSP des jeunes installés. Après la signature, il a fallu adapter les logiciels pour prendre en compte cette nouveauté. Ces modifications viennent seulement d’être faites, a indiqué récemment la CNAM au cours d’une réunion de la commission paritaire nationale (CPN). Ce qui explique le retard pris. « On attendait plus de professionnalisme des caisses », commente sobrement le patron de MG France qui dit « partager la colère des jeunes médecins ».

Une solution à l’été ?

À la CSMF, on n’est pas plus tendre vis-à-vis de la CNAM. Son nouveau président, le Dr Jean-Paul Ortiz, juge cette situation « d’autant plus intolérable que les jeunes installés cumulent des besoins d’investissements importants et une patientèle encore modeste ».

Même tonalité à la FMF. Le Dr Jean-Paul Hamon, qui signale aussi de « nombreuses contestations des montants versés au titre de la ROSP pour des médecins seniors » (voir ci-contre), juge « dramatiques » les retards de paiement de la ROSP 2012. « On voudrait dégoûter les rares jeunes qui s’installent qu’on ne s’y prendrait pas autrement ».

Dans un courrier adressé aux syndicats, la CNAM a promis que ces dysfonctionnements appartenaient désormais au passé, et que « les montants dus aux 900 jeunes médecins seraient réglés au plus tard à la fin du mois de juin ». Mais pour la ROSP de l’exercice 2013, ils devront attendre « le courant de l’été 2014 ».

Henri de Saint Roman

Source : Le Quotidien du Médecin: 9321