E N attendant de connaître, à l'issue de l'étude SU.VI.MAX (dans deux ans), l'impact d'une supplémentation de l'alimentation (à doses nutritionnelles) en vitamines et en minéraux sur les maladies de civilisation (cardio-vasculaire et cancer), la formidable banque de données que constitue ce travail, portant sur 14 000 volontaires adultes pendant huit ans, fournit des informations inédites sur l'alimentation des Français.
Comme l'a rappelé le Pr Serge Hercberg (CNAM), il est d'ores et déjà possible de situer les consommations alimentaires des Français par rapport aux apports nutritionnels conseillés (ANC). On note ainsi que 64 % des hommes et 55 % des femmes ne mangent pas suffisamment de fruits, et que, concernant les légumes, c'est le cas de 78 % des hommes et de 64 % des femmes. L'apport en hydrates de carbone est insuffisant (38,7 % de la ration calorique quotidienne pour les hommes et 40,4 % pour les femmes, au lieu des 50 à 55 % souhaitables) ; celui en lipides est trop élevé (36,3 % pour les hommes et 38 % pour les femmes, au lieu de 30 %). La répartition des différents acides gras (saturés, monoinsaturés et polyinsaturés) au sein de la ration lipidique est elle-même déséquilibrée, puisque les graisses saturées représentent près de la moitié des lipides consommés (alors qu'ils devraient être inférieurs au tiers). Enfin, si la consommation en acides gras essentiels n-6 paraît correcte, celle en n-3 (huile de colza, soja et poisson gras) devrait être sensiblement augmentée.
Une des plus riches en polyphénols
La richesse des données fournies par SU.VI.MAX permet, en outre, d'analyser, non plus les apports en tel ou tel nutriment, mais les consommations alimentaires des Français. Une telle approche peut être intéressante pour mesurer l'impact d'un aliment en particulier et pour confirmer ou infirmer un bénéfice potentiel. Ainsi, on disposera à l'issue de cette vaste enquête épidémiologique des données précieuses sur le thé ; boisson qui retient de plus en plus l'attention des chercheurs.
En effet, différents arguments expérimentaux et épidémiologiques suggèrent le bénéfice de la consommation régulière de thé en prévention cardio-vasculaire. Le thé, deuxième boisson la plus consommée dans le monde (après l'eau), est aussi une des plus riches en polyphénols (après le vin). 50 % des polyphénols contenus dans la feuille de thé sont solubilisés dans l'eau après une ou deux minutes d'infusion. Vert ou noir, le thé provient de la même plante : les feuilles de thé vert, après une étape de fermentation humide, puis dessication, donnent le thé noir, forme la plus consommée en Europe et dans le monde occidental. Cette transformation est responsable de la polymérisation des catéchines (épigalacatéchines) du thé vert en polymères de catéchines, théaflavine et théarubigine. Ces polymères sont métabolisés par la flore intestinale avant d'être absorbés à travers l'épithélium digestif, alors que les catéchines du thé vert sont absorbés directement au niveau de l'intestin sans transformation préalable.
Quoi qu'il en soit, l'ingestion de thé (vert ou noir) est suivie chez des volontaires sains d'une élévation des propriétés antioxydantes du plasma ; cette observation est moins marquée après l'ingestion de jus d'orange et elle n'existe pas après consommation d'eau.
Thé et maladie ischémique
En outre, un travail conduit chez le lapin a montré que l'ingestion de thé vert (comparée à la consommation d'eau) était capable de réduire significativement la constitution d'athérome ; la même observation était retrouvée à un moindre degré avec le thé noir.
Enfin, une étude hollandaise (Hertog, « Lancet » 1993) a montré, dans une population d'hommes coronariens, que le groupe de sujets ayant un taux plasmatique de flavonoïdes élevé avait une mortalité cardio-vasculaire plus basse que le groupe ayant un taux de flavonoïdes bas. Dans cette population, 65 % des flavonoïdes provenaient de la consommation de thé.
« Les travaux explorant les propriétés des flavonoïdes du thé se poursuivent et s'amplifient, a précisé le Dr Denis Malvy (Bordeaux). On s'intéresse non seulement à leur action antioxydante, mais aussi à leurs effets antithrombotiques et anti-inflammatoires. A côté de la prévention cardio-vasculaire, des recherches sont également menées dans le domaine du cancer ; les flavonoïdes du thé auraient une action sur la prolifération cellulaire, l'apoptose et les réactions inflammatoires ».
Symposium organisé par le centre d'Informations scientifiques Thé et Santé de Lipton (Unilever).
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