Réunis à Marseille, les spécialistes de l’hémostase envisagent une mise à jour des recos du bilan de trombophilie

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Publié le 20/11/2018

Le 2ème congrès européen d’hémostase et thrombose (ECTH), organisé à Marseille, a entériné de véritables révolutions thérapeutiques et annoncé la rédaction de nouvelles recommandations. 900 spécialistes venus de tous les pays d’Europe sont venus y présenter leurs travaux, dans une discipline qui « agrège de nombreuses spécialités, souligne le Pr Pierre Morange, directeur du Laboratoire d'hématologie biologique (Hôpital de la Timone - Hôpital Nord, Marseille).

« L’hémostase est une discipline de l’hématologie qui s’intéresse aux désordres de la coagulation du sang, note le Pr Morange. Il y avait au congrès, en plus des hématologues, des cardiologues, pneumologues, des pédiatres intéressés notamment par les avancées sur les nouveaux traitements de l’hémophilie et de la thrombose. Cette discipline est intéressante car elle fait le continuum entre la recherche fondamentale et la prise en charge médicale des malades. »

A ce sujet, il n’hésite pas à évoquer le cas de l’hémophilie pour laquelle « de véritables révolutions thérapeutiques se profilent, avec l’apparition de médicaments anti-hémophiliques à demi-vie longue et d’autres qui corrigent l’hémostase sans nécessiter la transfusion du facteur manquant. Ces derniers pourraient permettre à des hémophiles même sévères d’avoir une injection tous les 15 jours sous cutanée au lieu de plusieurs injections par semaine en intraveineuse. On est vraiment sur de l’innovation avec des outils révolutionnaire pour l’hémophilie. Et c’est sans compter sur la thérapie génique où les premiers essais chez l’homme sont concluants. On est passé à une phase d’essais ultérieurs qui vont probablement transformer radicalement la pathologie ».

Un équilibre à identifier pour chaque malade

L'hématologie avance à pas de géant, autour des anticoagulants oraux directs et de leur utilisation notamment dans le cadre de l’embolie pulmonaire et de la phlébite. « On doit arriver à trouver un équilibre, précise le Pr Morange, entre la neutralisation du caillot et l'évitement de saignements trop importantsOn dispose d’anticoagulants efficaces et cette efficacité ne doit pas être contrebalancée par un risque de saignement supérieur. »

Lors de ce congrès, le groupe français d’études sur l’hémostase et la thrombose a décidé de mettre à jour les recommandations du bilan de trombophilie qui est utilisé chez un patient pour estimer les risques de trombose. « On se remet au travail car il faut remettre à jour les recommandations qui datent de 2009. Nous avons besoin d’outils pour prévenir, chez les jeunes femmes en âge de procréer, les risques notamment liées à la pilule contraceptive. Il y a encore 20 décès par an et de nombreuses embolies pulmonaires et phlébites et on est toujours incapable, avant la mise sous pilule, d’avoir des outils biologiques afin d’estimer ce risque. Il est nécessaire d'avancer car les recommandations de la HAS ne sont pas satisfaisantes sur ce point. »

Au-delà des avancées médicamenteuses et thérapeutiques, l’accent a été mis dans ce congrès sur le facteur humain. « On doit arriver à positionner le médicament pour chaque malade. Pour l’instant on n’y arrive pas toujours. Mais nous travaillons à réussir à faire la balance entre les différents traitements, à savoir comment les encadrer et les utiliser en terme d’efficacité et de tolérance. »

Cet équilibre délicat à trouver demande l’intervention d’experts et de spécialistes. Et il est conseillé aux médecins généralistes, dès qu’il y a suspicion de problèmes d’hémostase, de renvoyer ce type d’examen sur des centres spécialisés. 

De notre correspondante, Hélène Foxonet

Source : lequotidiendumedecin.fr