Céphalées chroniques quotidiennes par abus médicamenteux

Sevrage et éducation du patient s'imposent

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Publié le 20/03/2017
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cephalee

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Crédit photo : PHANIE

En France, environ, 1 % de la population générale adulte souffrirait de céphalée chronique quotidienne (CCQ) par abus médicamenteux. La céphalée chronique quotidienne est définie selon les critères de l’IHS 2013 par le nombre de jours de céphalées mensuelles.

Il s’agit d’une céphalée présente plus de 15 jours par mois depuis au moins trois mois. « On peut très bien la retrouver en dehors d’un abus médicamenteux chez un patient qui ne prend pas d’antalgique ou de triptan », précise le Dr Caroline Roos (neurologue, Centre d’urgence des céphalées, hôpital Lariboisière, Paris). La définition de l’abus médicamenteux repose sur le nombre mensuel de jours avec une prise d’antalgiques ou d’antimigraineux de crise, évalué sur une période de 3 mois. « La surconsommation médicamenteuse est ainsi définie par la prise d’antalgiques non opioïdes au moins 15 jours par mois ou par la prise de triptans ou d’opiodes au moins 10 jours par mois », explique le Dr Caroline Roos. Dans tous les cas, il faut alors déterminer par l’interrogatoire la nature de la céphalée primaire sous-jacente : s’agit-il d’une migraine ou d’une céphalée de tension ? Dans la migraine, la céphalée dure de 4 à 72 heures, elle est à prédominance unilatérale et/ou de nature pulsatile, et/ou d’intensité modérée ou sévère et/ou aggravée par l’activité physique de routine (marche, montée d’escaliers), associée à des nausées et/ou des vomissements, et à une phono- et une photophobie. La céphalée de tension, quant à elle, dure de 30 minutes à 7 jours, elle présente au moins deux caractéristiques suivantes (localisation bilatérale, à type de pression ou de serrement, d’intensité légère à modérée, non aggravée par l’activité physique) et l’absence de nausées, la présence d’une photophobie, ou d’une phonophobie.

« Chez un patient présentant des céphalées, il ne faut pas prescrire d’antalgiques de façon trop systématique et se poser la question de l’indication d’un traitement prophylactique de fond pour éviter les abus », rappelle le Dr Caroline Roos. En cas de migraine, selon les recommandations de la SFEMC le traitement de fond de première ligne fait appel aux bêta-bloquants et en deuxième intention plusieurs molécules peuvent être proposées dont l’oxétorone, le candesartan, la flunarizine ou le topiramate. En cas de céphalée de tension, l’amitriptyline, voire le topiramate sont indiqués. Il faut également éduquer et sensibiliser le patient en lui demandant de tenir un agenda de ses céphalées.

Sevrage à domicile ou hospitalier

Il s’agit du traitement de référence de la céphalée avec abus médicamenteux. Le sevrage peut être réalisé en ambulatoire mais aussi lors d’une hospitalisation. Le choix est adapté en fonction du patient. Le sevrage médicamenteux ambulatoire consiste à arrêter tout antalgique et/ou antimigraineux. Un antidépresseur tricyclique (amitriptyline à doses progressives) peut être prescrit. Lorsque le patient est sevré et après analyse de la céphalée sous-jacente, le traitement prophylactique antimigraineux est ajusté. Dans certains cas, le sevrage à l’hôpital (7 jours) est nécessaire avec administration d’amitriptyline par voie parentérale. Il permet une prise en charge multidisciplinaire complète. Dans tous les cas, le sevrage médicamenteux doit être accompagné d’une démarche éducative. Il faut faire prendre conscience au patient que la prise médicamenteuse n’est pas la seule réponse possible à la céphalée. Si le sevrage médicamenteux est impératif, il doit être associé à une prise en charge correcte des céphalées initiales tant sur les crises que sur le fond. « Une prise en charge psychologique est également importante à mettre en place, notamment en cas de céphalées de tension qui sont souvent liées à des problèmes psychologiques (anxiété, dépression…) », souligne le Dr Caroline Roos. Dans le cas particulier d’une authentique dépendance, notamment aux opioïdes, une prise en charge addictologique peut être nécessaire.

Christine Fallet

Source : Le Quotidien du médecin: 9565