Jeudi après-midi, les députés doivent se prononcer sur une proposition d’amendement à la loi Évin « visant à concilier la préservation de l’intégrité des œuvres culturelles et artistiques avec les objectifs de lutte contre le tabagisme ». Adopté le 19 janvier en commission des affaires culturelles de l’Assemblée nationale, le projet de loi soutenu par le groupe socialiste radical citoyen (SRC) vise à exclure de l’application de la loi Évin les œuvres artistiques et culturelles (ainsi que leur reproduction) où figure « une image ou une référence liée au tabac ».
Pour le rapporteur du texte Didier Mathus (SRC), cette proposition de loi a « peu à voir avec la politique, peu à voir avec la lutte contre le tabagisme, mais beaucoup à voir avec la protection des œuvres de l’esprit et des œuvres culturelles ». Selon le député, il s’agit, au nom de la liberté d’expression artistique, de créer un garde-fou à la législation antitabac en vigueur pour ne pas dénaturer les œuvres. Didier Mathus justifie cette initiative législative en énumérant plusieurs exemples de « censure hygiéniste » sur des œuvres qui comportent une représentation du tabagisme. Le cas le plus emblématique demeurant « l’affaire » de la pipe de Monsieur Hulot, dissimulée derrière un moulinet-à-vent dans le cadre d’une campagne publicitaire diffusée dans le métro parisien. À l’époque, en 2008, la régie publicitaire de la RATP « avait procédé à cette substitution pour se protéger contre d’éventuelles poursuites menées par les associations de tabac », considère Didier Mathus.
Pour l’association Droits des non-fumeurs (DNF), ce type d’exemple relève d’un « récit médiatique construit de toutes pièces depuis 2 ans et dont l’objectif est de présenter la loi Évin comme liberticide ». De son côté, la Société française de santé publique (SFSP) voit en cette proposition de loi « un cheval de Troie destiné à créer une brèche pour autoriser, à nouveau, la publicité (sur le tabac) au nom de l’exception culturelle ». Tandis que de nombreuses associations s’élèvent contre le projet de loi, le Haut Conseil de santé publique (HCSP), saisi par le ministre de la Santé Xavier Bertrand, « alerte le gouvernement sur le fait que cette proposition de loi ouvre la voie à un détournement de la loi Évin ». Dans son avis, le HCSP rappelle que « toutes les affaires dites de censure présentées dans l’exposé des motifs de ce projet de loi sont des initiatives propres d’organismes publicitaires ou d’entreprises et n’émanent ni des pouvoirs publics ni des associations de lutte contre le tabagisme ». De plus, depuis la promulgation de la loi Évin en 1991, « aucune action en justice pour non-respect de la loi n’a jamais été engagée s’agissant de la représentation de cigarettes ou de tabac dans un contexte artistique », souligne le HCSP.
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