L'essor des thérapies innovantes offre de nouveaux espoirs pour la prise en charge des maladies rares neuromusculaires. Mais du chemin reste à parcourir pour rendre ces traitements accessibles au plus grand nombre de patients.
« Le traitement des maladies neuromusculaires, malades et médecins en ont rêvé ; nous allons désormais passer à la réalité », déclare le Pr Jean Pouget, coordonnateur de la filière de santé maladies rares FILNEMUS. En pleine expansion, les thérapies innovantes (thérapie génique, cellulaire ou médicamenteuse) devraient permettre de passer d'une prise en charge symptomatique à un début de prise en charge curative de ces pathologies. Mais « l’impatience que nous avons de voir aboutir ces thérapies ne doit pas nous faire méconnaître certaines difficultés », ajoute-t-il.
Évaluation complète et continue
En premier lieu, ces thérapeutiques ont une durée relativement courte, pour des pathologies dont la courbe évolutive est longue. « On a un reflet très partiel de l’effet du traitement qui peut gêner l’évaluation par les commissions ad hoc et donc le parcours réglementaire », précise le Pr Pouget. De plus, certains traitements offrent une stabilisation de la pathologie et non une amélioration, « un élément non pris en compte par la commission de la transparence de la HAS », souligne le Pr Bruno Eymard, coordonnateur adulte du centre de référence des maladies neuromusculaires (CRMNM) de la Pitié-Salpêtrière et coordonnateur du CRMNM Nord/Est/IdF. Enfin, ces traitements sont délivrés à un petit nombre de patients, sur un temps court. Or, « l’expérience montre que l’on va découvrir des effets secondaires lorsqu’on les donnera à un plus grand nombre de malades, sur un temps plus long », ajoute le Pr Pouget. Une évaluation continue de ces traitements et la création de registres par pathologie puis par traitement s'avèrent donc indispensables.
De plus, les essais cliniques n'évaluent pas toujours toutes les formes d'une maladie. Or, « l'efficacité d'un traitement dans une forme donnée n'implique pas nécessairement son efficacité dans une autre forme », fait remarquer le Pr Pouget. Pour le Pr Pascal Laforêt, coordonnateur adulte du CRNMN de Marseille, « il faut continuer à se battre pour que les laboratoires fassent des essais pour toutes les formes d'une maladie ».
Questions éthiques
Ces thérapies innovantes posent également des questions éthiques, « notamment savoir dans quelles conditions ces malades vont évoluer », souligne le Pr Serge Braun, directeur scientifique de l’AFM-Téléthon. Ou bien, « lorsqu'un traitement induit un arrêt, voire un ralentissement de l’évolution d'une maladie, discuter de sa pertinence en pédiatrie anté et néonatale dans les formes cliniques les plus graves », précise le Dr Christian Richelme, coordonnateur pédiatrique du CRNMN de Nice. Des questions « qui doivent se discuter avec les malades », estime le Pr Braun.
Contraintes médico-économiques
La mise en place de ces traitements innovants nécessite également de disposer de locaux adaptés, accessibles aux patients quel que soit leur lieu de résidence, et de personnels formés à ces pathologies et à la mise en place des traitements. Ce qui implique une bonne coordination entre professionnels et « un partage d'information entre les médecins, les cliniciens, les patients et les services régionaux », souligne le Dr Géraldine Honnet, directrice du développement clinique au Généthon.
Enfin, ces traitements ont un coût de développement très important, combiné, dans le cas des biothérapies, à un coût de production très élevé. « C'est principalement par l'amélioration des rendements que nous parviendrons à réduire le coût de production » , précise le Pr Braun. En revanche, l’enveloppe des dépenses de santé, elle, est définie.
« Il y aura donc des problèmes de choix à faire, auxquels notre société n’est pas encore prête et qui nécessitent un courage politique dans les choix stratégiques au niveau économique », estime le Pr Pouget.
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