L'ASTHME est une maladie multifactorielle, complexe et hétérogène. Et surtout mystérieuse : le mécanisme de l'hyperréactivité bronchique en réponse à une variété de stimuli ne s'explique pas complètement.
Geoffrey Chupp, Carole Ober et coll. apportent une contribution à la compréhension de l'asthme avec un nouveau travail sur la participation génétique d'une protéine chitinase-like, YKL-40.
L'équipe de chercheurs (à laquelle participaient les Français Martine Grandsaigne, Marie-Christine Dombret, Michel Aubier et Marina Petrolani) avait précédemment montré que le niveau de l'expression de YKL-40 s'élève dans les poumons et la circulation de patients ayant un asthme sévère (« New England Journal of Medicine », 15 novembre 2007, lire « le Quotidien » du même jour). Ils émettaient l'hypothèse que YKL-40 pouvait être soit un élément causal, soit un marqueur de l'asthme.
Les Hutterites, descendants d'Européens.
Maintenant, ils présentent une étude menée chez 753 membres d'une communauté de 3 028 personnes, issues de 62 fondateurs à travers 13 générations, qui vivent dans des fermes communales du sud du Dakota : les Hutterites, descendants d'Européens. L'idée est de réduire les effets confondants de l'hétérogénéité génétique et environnementale, grâce au nombre réduit des génomes fondateurs et au mode de vie remarquablement uniforme, où le tabagisme est quasi inexistant.
Il a été réalisé une étude d'association entre un SNP promoteur (-131C -> G) sur CHI3L1, le gène codant YKL-40, l'asthme et la fonction respiratoire. Les résultats plaident en faveur d'un rôle causal de YKL-40, suggérant que la protéine influe directement sur le processus de l'asthme.
Ober et coll. trouvent chez les Hutterites que les taux sériques de YKL-40 sont 15 % plus élevés chez les personnes ayant un asthme, 10 % plus élevés chez ceux ayant une hyperréactivité bronchique et 15 % plus élevés lorsqu'il y a une altération pulmonaire, comparativement à des témoins.
YKL-40 lie la chitine, mais il ne possède pas d'activité enzymatique. Cette protéine est produite sur des sites inflammatoires ; elle est sécrétée par des cellules musculaires lisses et des macrophages.
Surtout, on constate une importante régulation positive de YKL-40 dans l'épithélium des voies aériennes et les macrophages alvéolaires de patients ayant de l'asthme.
Il est clair que les chitinases ont un rôle dans la pathogénie de l'asthme et d'autres maladies inflammatoires chez les humains. Ainsi, YKL-40 a été impliquée dans divers processus pathologiques, aussi variés que la polyarthrite rhumatoïde, les maladies inflammatoires digestives, la schizophrénie et le diabète de type 2.
Par ailleurs, certains SNPs d'une autre chitinase, CHIA, ont été associés à un asthme chez des enfants en Allemagne.
Si l'implication de la chitinase dans l'inflammation est évidente, son rôle exact est difficile à comprendre.
Les mammifères ne font pas de chitine. La chitine est très présente chez les crustacés (composant de l'exosquelette), les insectes, des champignons, des moisissures et des nématodes. Les infections parasitaires ou fungiques ne figurent pas parmi les caractéristiques de l'asthme.
«D'un point de vue épidémiologique, les résultats d'Ober et coll. suggèrent qu'ils pourraient avoir identifié un important facteur de risque génétique d'asthme, qui reste toutefois à confirmer», soulignent les auteurs d'un éditorial associé.
Par ailleurs, les auteurs n'ont pas mis en évidence de relation significative entre le SNP de CHI3L1 et l'atopie et indiquent que l'atopie pourrait être, selon leurs observations, plutôt un processus secondaire.
L'allèle -131G pourrait être protecteur contre l'asthme et le déclin de la fonction respiratoire. Son effet est indépendant des voies de l'atopie et l'effet de ce SNP sur le taux de YKL-40 est déjà présent à la naissance, écrivent les auteurs.
Cette étude, mise en ligne le 9 avril, sera publiée dans le « New England Journal of Medicine » le 17 avril 2008, pp. 1682-1691, éditorial, pp. 1725-1726.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature