Tumeurs de l’humérus proximal

Une chirurgie toujours problématique

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Publié le 12/11/2018
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Crédit photo : SIRVEAUX Francois

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Remise au cœur de l’actualité par le décès, cet été à Zurich, du patron de Fiat Chrysler, la pathologie oncologique du squelette scapulaire reste grave et de prise en charge chirurgicale particulièrement délicate. Ces tumeurs ne sont pas rares : l’humérus proximal est la troisième localisation en fréquence pour les tumeurs osseuses primitives. Environ 15 % des tumeurs osseuses malignes y sont localisées.

La mobilité et la stabilité articulaires de l’épaule sont conditionnées par les structures osseuses et surtout par les éléments tendinomusculaires représentés par la coiffe des rotateurs et le deltoïde. La reconstruction d’une articulation stable et mobile en présence d’une tumeur est un véritable défi thérapeutique, qui impose le recours à une équipe spécialisée associant des compétences en chirurgie oncologique et prothétique de l’épaule, notamment pour la gestion des complications.

Dès la suspicion du diagnostic, la prise en charge sera multidisciplinaire et spécialisée. Les modalités de la biopsie sont décidées en réunion de concertation multidisciplinaire (RCP), à partir des bilans clinique et d’imagerie, qui permettent de préciser l’extension de la tumeur au niveau de l’os, de l’articulation, des tendons de la coiffe des rotateurs, du deltoïde et de la bourse sous-acromiale. Une attention particulière sera portée au nerf axillaire, au plexus et aux vaisseaux.

Dans la chirurgie des tumeurs malignes, l’objectif est d’obtenir une résection monobloc de la tumeur avec une marge suffisante de tissu sain. C’est la RCP qui définit collégialement la stratégie chirurgicale et positionne l’intervention dans un objectif curatif ou palliatif. Aucune concession ne doit être faite à ce sujet. Les modalités de la reconstruction dépendent essentiellement des structures anatomiques et fonctionnelles épargnées lors du geste de reconstruction, mais aussi des traitements adjuvants et du pronostic de la maladie.

La prothèse inversée, une option de nécessité

Le plus souvent, la résection de la tumeur impose un sacrifice de la coiffe des rotateurs, mais permet de conserver le deltoïde. Dans cette situation, la prothèse inversée représente un progrès considérable, car elle permet de redonner de la mobilité à l’épaule. Elle est donc indiquée quand le nerf axillaire est épargné, quand le deltoïde reste fonctionnel et quand il existe suffisamment d’os au niveau de la glène pour implanter la sphère.

Suivant la longueur de la résection humérale, on utilise une prothèse inversée standard, massive sur mesure ou manchonnée sur une allogreffe. Pour rétablir la rotation externe active est associé un transfert du grand dorsal, fixé sur l’allogreffe ou sur la prothèse. L’application des logiciels de planification 3D pour l’implantation des prothèses inversées pour tumeur est une piste de développement pour l’avenir.

Un des problèmes rencontrés actuellement est le manque de disponibilité des allogreffes osseuses massives en France, et il est important de sensibiliser la population sur l’importance des prélèvements de tissu (l’os en particulier) dans le cadre des prélèvements multiorganes.

Quant aux prothèses anatomiques, on ne les utilise que dans les rares situations où la coiffe peut être conservée, ou lorsqu’il n’est pas possible de mettre un implant dans la glène. Les prothèses anatomiques massives donnent des résultats cliniques très inférieurs à ceux de la prothèse inversée, et leurs indications sont aujourd’hui très limitées.

Quand l’option prothétique est disqualifiée

Lorsque l’extension tumorale impose un sacrifice du nerf axillaire et/ou du deltoïde, il n’y a aucun moyen de redonner une épaule mobile. Dans ce cas, on peut être amené à faire une arthrodèse glénohumérale, avec différents procédés de greffe : autogreffe vascularisée ou non, allogreffe associée à une ostéosynthèse entre la scapula et l’humérus.

La mobilité résiduelle s’effectue au niveau de l’articulation scapulothoracique pour permettre l’utilisation de la main. Développée pour l’enfant, une technique originale utilise la clavicule pour reconstruire l’humérus, mais elle reste exceptionnelle pour l’adulte.

Dans certaines situations où la tumeur est étendue à la scapula, il est nécessaire de réaliser une résection extra-articulaire large de l’épaule en fixant l’humérus restant à la clavicule ou aux côtes (intervention de Tikhoff-Lindberg). Il reste des indications d’amputation du membre supérieur quand il existe un envahissement du plexus ou des axes vasculaires sans espoir de garder une main fonctionnelle.

 

D’après la conférence d’enseignement du Pr François Sirveaux, PUPH au centre chirurgical Émile-Gallé (CHRU de Nancy)


Source : Le Quotidien du médecin: 9701