Syndromes parkinsoniens atypiques

Une prise en charge en pleine mutation

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Publié le 22/02/2018

Issue de travaux débutés en 2005, la redéfinition de nouveaux critères diagnostiques dans la paralysie supranucléaire progressive (PSP) aboutit cette année à l’inclusion de différents sous-types reconnus comme faisant partie intégrante du spectre de la maladie. « Cela va augmenter le nombre de patients atteints de ces maladies (aujourd’hui 80% de maladie de parkinson [MP] pour 20% de SPA). On déborde sur d’autres cadres cliniques, avec la description de nouvelles formes de PSP : formes comportementales de démences fronto-temporales, forme PSP-P (PSP parkinsonisme) avec un tableau parkinsonien proche de la MP classique mais une moins bonne réponse au traitement (auparavant considérée comme une MP malgré l’apparition tardive de troubles oculomoteurs et de chutes), … On est en train d’élargir les concepts et d’augmenter la prévalence de la PSP », explique le Pr Alexandre Eusebio, hôpital de la Timone à Marseille. Ainsi, chez des patients sans aucune alternative thérapeutique en dehors de la levo-dopa (peu efficace) et de la rééducation, il sera possible de proposer une participation aux essais thérapeutiques et, dans les années à venir, des solutions de traitements efficaces sur le long terme.

De multiples essais prévus

Comme la maladie d’Alzheimer et la démence fronto-temporale, la PSP est une tauopathie se caractérisant par l’accumulation de protéine tau dans le cerveau des patients. Essentielle pour le transport axonal, le fonctionnement du neurone et des microtubules, la protéine tau est également anormalement phosphorylée dans ces tauopathies. Ainsi, deux essais thérapeutiques ont ces dernières années chercher à agir sur la protéine tau, soit en stabilisant les microtubulles, soit en agissant sur sa phosphorylation. « Ils ont été négatifs mais ont mis en évidence la faisabilité d’essais multicentriques internationaux, avec 300 patients, dans une maladie aussi rare que la PSP. Ils ont aussi montré la mobilisation de la communauté médicale, des réseaux de ville et des associations de patients autour de cette pathologie méconnue et difficile à diagnostiquer et à prendre en charge  ».

Grâce à ces essais pionniers, débutent actuellement deux études d’immunothérapie de phase II dans la PSP, dont l’objectif est de chélater la protéine tau pour éviter son accumulation dans les neurones. « On devrait plutôt parler d’immuno-chélation. C’est de l’immunisation passive avec des anticorps monoclonaux qui vont aller se fixer sur la protéine tau. La chélation se fait majoritairement en périphérie, dans le sang circulant, et la majorité des anticorps utilisés ne passent pas la barrière hémato-méningée. Le mécanisme reste encore discuté », précise le Pr Eusebio. Les résultats sont escomptés en 2019. De même, dans les synucléinopathies telles que l’atrophie multisystématisée (AMS), un essai d’immunisation active (vaccination anti α-synucléine) est en attente de résultats et un essai d’immunisation passive est envisagé.

Des pistes thérapeutiques à explorer

Plutôt que de bloquer la protéine (tau ou α-synucléine), une autre piste consiste à éviter sa précipitation en modifiant la façon dont elle est conformée. « Avec cette approche, on peut utiliser de plus petites molécules qui passent la barrière, rentrent dans les cellules et interagissent avec les protéines ciblées ». Enfin, la 3e piste est d’agir directement sur la synthèse de protéine tau en ciblant l’expression génique du gène de cette protéine. Des études sur l’animal sont en cours. Ces approches, encore préliminaires, permettent aussi de mieux comprendre la physiopathologie de ces maladies, encore mal caractérisées.

Mieux structurer la prise en charge

Avec l’objectif du plan maladie rare de structurer les filières, il existe maintenant des centres de références pour les SPA, dans l’AMS, pour les maladies rares du mouvement et de la cognition (dont la PSP), …. « On est au stade débutant de la structuration de la filière. Un protocole national de diagnostic et de soin (PNDS) est rédigé pour l’AMS et un autre est en projet dans la PSP, … Si un effort est amorcé, il faut néanmoins arriver à une structuration plus optimale sur l’ensemble du territoire et pour la totalité des patients ». Les enjeux sont non seulement d’améliorer la prise en charge et de dépister les complications évolutives, mais aussi de communiquer et informer à travers un PNDS identifiable par tous les acteurs (médecin généraliste, neurologue libéral, …) en lien avec la filière hospitalière.

D’après un entretien avec le Pr Alexandre Eusebio, Service de Neurologie et Pathologie du Mouvement, hôpital de la Timone à Marseille

Karelle Goutorbe

Source : Bilan Spécialiste