Depuis que la vaccination pour le Cocid-19 a été mise « sur les rails », certains parlent de changer les modalités en ce qui concerne le rythme d’administration des doses. Le laboratoire Pfizer (c’est celui qui est actuellement le plus impliqué dans la vaccination) recommande expressément d’effectuer, pour obtenir une couverture immunitaire satisfaisante, deux injections à 20 jours d’intervalle. Or on paralit ces jours derniers d’éventuellement rallonger la date de la seconde injection (elle pourrait être réalisée au bout de 42 jours). En parallèle l’Académie de médecine confirme cette date butoir de 20 jours pour la deuxième dose, cela alors que la HAS comprend très bien le point de vue des politiques et propose d’effectuer une 2e dose 42 jours après la première.
Ce décalage aurait pu arranger tout le monde (Olivier Véran a finalement annoncé mardi qu'il renonçait à allonger le délai pour la deuxième injection, NDLR) , mais nous laisse perplexe. Peut-on donner raison au laboratoire qui peut chercher derrière ce choix une volonté de vendre plus de doses ? La HAS en tenant tête aux firmes pharmaceutiques a-t-elle un raisonnement hautement scientifique, et cache-t-elle derrière cette prise en compte la réalité d’une difficulté d’approvisionnement ?
En fait, derrière les propos contradictoires des uns et des autres, nous avons de grosses difficultés à avoir notre propre opinion sur ce sujet. Il faut reconnaître que l’arrivée du vaccin a donné beaucoup d’espoir aux Français qui se disent, pour la plupart, que cette aubaine va leur permettre d’avoir une qualité de vie meilleure.
Malheureusement mettre à la disposition de tous les Français ce vaccin est une opération quasi-impossible. Cette difficulté vient essentiellement du fait qu’un seul laboratoire est actuellement apte à assurer la vaccination de nos compatriotes (ce qui n’est pas facile), de l’Europe, des USA…
Aussi pour qu’un grand nombre de patients puissent recevoir le vaccin, et dans l’hypothétique idée que sur quelques jours la donne sur l’arrivée de vaccins sera modifiée (dans un sens positif bien entendu), l’exécutif a pensé à jouer les prolongations. Nous pouvons aisément comprendre cette attitude. Cependant plusieurs nuages doivent nous faire réfléchir sur les modalités de cette vaccination et son efficacité.
Beaucoup de questions sans réponse
Tout d’abord, le laboratoire qui commercialise le vaccin déconseille fortement un changement de calendrier vaccinal. Or il ne faut pas oublier que les études concernant l’efficacité du vaccin ont été effectuées par le laboratoire Pfizer. Or si cette firme pharmaceutique émet des réserves quant à l’efficacité du vaccin en cas d’injection retardée, il est important de l’écouter et de suivre ses recommandations. L’Académie de médecine a par ailleurs suivi le réquisitoire du laboratoire sur ce sujet, et a tout à fait compris la nécessité d’effectuer la 2e dose au bout de 20 jours.
Nous ne pouvons qu’être très interrogateurs, et critiques vis-à-vis de la HAS qui semble cette fois se ranger du côté des politiques. Comment un organisme qui devrait être indépendant de toute considération politique a-t-il pu accepter de donner un avis contraire à celui du concepteur du vaccin, mais aussi de l’Académie de médecine (elle est représentée par de grands scientifiques) ? La HAS a-t-elle la possibilité de donner aux médecins de manière fiable l’importance (en %) de la couverture immunitaire si le vaccin est administré au bout de 42 jours ?
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