L’article paru récemment dans le Quotidien du Médecin (cf. De l’Inserm aux covido-sceptiques, l'étonnante dérive de la généticienne Alexandra Henrion-Caude, le quotidiendumedecin.fr, 19 juin) sur Alexandra Henrion-Caude réclame un commentaire. Il s’agit en effet d’un article à charge qui la présente comme une exaltée mise au banc de toute la communauté scientifique. Quelques nuances auraient été cependant les bienvenues.
Tout d’abord, Alexandra est une scientifique de haut vol, spécialiste de l’ARN, respectée et écoutée dans son domaine. Cela explique sans doute pourquoi elle s’autorise à donner son avis sur le vaccin anti-covid. Elle est à l’âge où l’on est en même temps capable de se prononcer sur les sujets scientifiques les plus pointus et où l’on est en mesure de prendre du recul pour apprécier une situation sanitaire de manière globale. Son expertise, son expérience sont donc précieuses.
Sa démarche est celle d’une authentique scientifique qui observe, analyse, tâche d’interpréter les faits, émet des doutes et se garde de toute affirmation hâtive. Quoi de plus respectable ? Elle n’a aucun lien avec l’industrie pharmaceutique et ne déclare aucun conflit d’intérêt. Elle fait donc partie de ces rares scientifiques dont la parole est libre. Elle a fait sienne la maxime de Claude Bernard qui rappelait que : «les faits ont toujours raison».
Quels reproches ?
Sur le plan scientifique, on lui reproche principalement deux choses. La première est de s’interroger sur l’innocuité des vaccins ARN. N’est-elle pas dans son rôle d’alerter si, dans son for intérieur, elle pense que la portée négative de ce vaccin a été sous-estimée. Elle a parlé d’une possibilité de transformation de l’ARN en ADN par l’action de la transcriptase inverse. On le lui reproche, arguant que cette enzyme n’existe pas pour le coronavirus, mais elle n’est pas la seule scientifique à soulever aujourd’hui ce problème d’importance cardinale. La deuxième est de s’interroger sur la pertinence de l’usage généralisé et systématique du masque et du confinement. Comment peut-on lui reprocher de s’intéresser à ces pratiques qui sont malheureusement à l’origine de dépressions nerveuses profondes et parfois de suicides chez les personnes âgées et isolées ?
Sur le plan de sa communication, on la blâme de se commettre avec l’humoriste Bigard. Il est vrai que, même si on peut comprendre que cet homme exprime sa colère, ses outrances sont préjudiciables à la cause qu’il entend défendre. La vulgarité ne sert pas la vérité scientifique ni la vérité tout court.
Bien que cela ne soit pas exprimé ouvertement dans les différents articles qui lui sont consacrés, on reproche aussi à Alexandra de s’opposer au projet de loi de bioéthique qui ouvre objectivement la porte à tous les abus. Elle fait partie de ces rares personnes qui osent dire que ce projet est inique et dangereux.
À ce sujet, elle a donné une conférence en plein air sur la bioéthique à Lyon le 15 mai dernier. Devant une foule de parapluies, car il pleuvait, elle a parlé de l’homme, de la femme, de la complémentarité homme-femme, de la fertilité, de l’humanité, du respect de la vie, de la tentation de la médecine de créer des hommes parfaits. Elle a aussi parlé des embryons congelés qu’elle a appelés «nos frères et soeurs en humanité» (elle a osé le dire). Ce fut une des plus belles conférences de bio-éthique qu’on ait entendue depuis longtemps.
Les cotisations sociales obligatoires génèrent des sommes considérables qui sont devenues la convoitise des laboratoires pharmaceutiques. Aujourd’hui la médecine est à un carrefour. Soit elle devient un instrument au service de l’État, de l’industrie pharmaceutique, et des lobbies de tout genre, soit elle reste au service des malades. L’enjeu de la loi de bioéthique est là. Le nouveau projet de loi asservit la médecine et les médecins au profit d’intérêts industriels et pseudo-philosophiques. Où voulons-nous aller ? Qui voulons-nous servir ?
Personnellement, je trouve merveilleux qu’une femme de la qualité d’Alexandra puisse s’exprimer librement sur des sujets aussi importants. Elle donne au débat fraîcheur et sincérité. Elle a des choses à dire. Laissons la parler. La reléguer dans la case des complotistes, réservée maintenant à tous ceux qui se permettent d’exprimer des doutes sur le bienfondé de la politique sanitaire, relève d’une malveillance déplacée. Écoutons ce qu’elle dit et débattons. C’est la manière la plus intelligente et la plus éthique de procéder.
N’oublions pas que le premier adage du médecin est : «Primum non nocere». Cela doit être notre obsession, à nous médecins. Si Madame Henrion-Caude lit ces quelques lignes, j’aimerais lui dire combien je serais heureux qu’elle rédige un article de fond résumant sa pensée sur la Covid-19.
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Exergue : Je trouve merveilleux qu’une femme de la qualité d’Alexandra puisse s’exprimer librement
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