Laissons de côté le pan économique de la « crise » pour nous attacher au seul domaine médical de cette pandémie et aux réactions hésitantes de nos gouvernants…
Il n’est pas question, dans le cas de pandémie, de brandir un choix personnel dicté le plus souvent par l’ignorance ou parfois par des idées idiotes ou politico-idéologiques émanant de doux imbéciles ou d’excités haineux dépourvus de la moindre base scientifique ni du plus simple bon sens… pollué en outre par leurs clans politiques et anti-gouvernementaux. On est évidemment libre de faire son propre choix égotique dans tout autre domaine, mais quand il s’agit de sauver des milliards de vies sur toute la planète, celles d’autrui et la sienne en plus…, l’impératif sanitaire est universel ; et c’est là que s’impose à tous le devoir d’assistance aux personnes (du monde entier) en danger de mort.
Quelle responsabilité ! Avoir une arme préventive magnifique, le vaccin anti-Covid-19, reconnu efficace à des taux jamais atteints par d’autres, et la refuser, c’est comme refuser de tendre le bras à quelqu'un qui se noie… accidentellement ; car celui qui se suicide volontairement c’est son choix et je le respecte. Mais… faut-il justement épouser le choix du suicidaire ?
En tant que médecin et de race humaine, je lui porterais évidemment secours d’autant qu’il aura peut-être changé d’avis demain… et me remerciera de lui avoir évité l’irréparable… Mon bras tendu pourra glisser et ne sera pas toujours salvateur, hélas ! De même, le vaccin n’agira pas à 100 %, mais j’aurais tenté en urgence absolue ce qu’il y a de mieux, quitte à être entraîné moi-même ou à souffrir pendant des années d’une rupture de la coiffe des rotateurs… Et, en ce qui concerne le nouveau vaccin, quitte à en subir à court ou long terme les effets secondaires forcément inconnus pour l’instant… ! Mais que représente ma petite personne en regard de la fourmilière humaine ?
Méfiance vis-à-vis du corps médical
La méfiance vis-à-vis des décisions du corps médical, qui pousse depuis longtemps le citoyen à faire plus confiance à son garagiste qu’à son médecin trouve sans doute son origine dans la mauvaise utilisation des « médias » : il est vrai qu’on voit rarement sur les plateaux télé des « experts » garagistes s’affronter sans fin au sujet des meilleures bougies ou plaquettes de frein ou de la façon de réparer un Delco… ! Je veux dire par là qu’au fil des mois de cette pandémie, les spécialistes médecins, virologues, épidémiologistes, pharmaciens et… journalistes dédiés, ont tellement défilé sur les « étranges lucarnes » et montré certaines divergences, compréhensibles par le milieu médical mais immédiatement interprétées comme contradictions scandaleuses par le vulgum pecus, qu’ils ont sans doute plutôt prou que peu contribué à l’installation d’une grande défiance dans la population… vis-à-vis du corpus medicalis, s’il en était besoin.
Je ne parle pas de la communication catastrophique du début… mais à longueur de « plateaux » TV, on a trop vu d’innombrables experts, trop heureux de « passer » à la télé, embrumer l’esprit des téléspectateurs par leur manque de clarté et de pédagogie. Qui a expliqué simplement le principe des vaccins ? Ce qu’est un génome ? Un ADN ? Un ARN ? Ce qu’est l’immunité humorale ET cellulaire ? Ce qu’on prend au chromosome dans l’anti-Covid « messager » et quel adéno-virus « vecteur » choisit-on (hou là-là, un virus…, heureusement qu’on n’en a pas parlé… !) dans un vaccin non ARN messager ? Comment on utilise bien un masque ? Etc.
Sans parler de la « vague Raoult contestataire » qui a augmenté d’un gros cran la défiance vis-à-vis des médecins et de leur thérapeutique en offrant un triste exemple de dissension entre célèbres professeurs ! Alors bien sûr tous les écoloclastes et les « doux poètes du Naturel à tout prix » lui ont emprunté le pas pour saper la médecine scientifique et l’expérience médicale…
Absence de communication lors du déconfinement
Un autre exemple de l’impéritie dirigeante nous est fourni par l’absence de communication lors du 2e déconfinement verno-estival qui – comme le premier, faute d’explications claires et inlassablement répétées — fut interprété par le peuple de France horriblement martyrisé…, comme l’autorisation d’une libéralisation totale, d’un retour à la vie normale… L’intelligence aurait été d’expliquer sans relâche, de rabâcher, d’argumenter, d’éduquer, de « médicaliser » les Français, au lieu de laisser fleurir les pires élucubrations, chacun se prenant pour le meilleur expert scientifique médical du département… Telle cette délicieuse réponse d’un auditeur à la question : « sur quoi vous fondez-vous pour être anti-vaccin ? » : « Sur moi… » !
Quant aux dernières mesures « Ukases » du pouvoir, « Gouverner c’est prévoir » ne semble pas avoir été son guide, mais plutôt « mieux vaut tard que jamais », malgré une facile anticipation de l’évolution pandémique… Après avoir longtemps hésité entre le « p'têt ben qu'oui, p'têt ben que non » normand ou mieux le Cantal de Salers « Entre-Deux », voilà enfin la pluie violente mais bien trop tardive des récentes mesures ! Il suffisait pourtant d’observer le comportement insensé et provocateur de la population nationale bravant les interdits, de regarder les autres pays atteints avant nous par le « Delta », lire les chiffres, pour prédire la 4e vague… Le temps perdu ne se rattrape pas… ! Mais, que voulez-vous, il faut bien, politiquement, ménager la chèvre populaire et les choux sanitaires…
On le sait, bien sûr, la tâche est rude pour les dirigeants quand on a affaire à la France ingouvernable aux 600 fromages et aux Français éternels râleurs qui n’ont ni mémoire longue ni discipline civique et sont à la fois des veaux et des moutons de Panurge… Et qui nagent dans une incessante choucroute politique, faite de clientélisme, d’électoralisme et d’idéologie. Laissons à nos hauts responsables au moins le bénéfice d’une adaptation relative bien que tardive à la pandémie… Finalement… « la leçon de tout cela vaut bien un fromage… sans doute… mais j’hésite encore « entre les deux… » !
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