Depuis des décennies de nombreuses structures privées ont trouvé une niche pour gagner beaucoup d’argent sur le dos des jeunes étudiants (certains prennent un emprunt pour payer les frais d’inscription), mais surtout de leurs parents qui se saignent aux quatre veines pour contribuer à la réussite de leur progéniture et ont donc recours aux écoles privées pour avoir l’idée d’être mieux classés.
C’est ainsi que de nombreuses écoles « de bachotage » se sont développées (elles sont très florissantes) pour permettre à ceux qui ont des ressources suffisantes d’avoir un complément d’enseignement (ce sont plutôt des colles), cela afin d’avoir plus de chances d’obtenir l’examen final (on ne parle plus de concours) lors du passage de la première à la deuxième année de médecine.
Tout irait pour le mieux si ces établissements intervenaient de manière désintéressée
Tout irait pour le mieux si ces établissements intervenaient de manière désintéressée. Or on se rend compte qu’ils réclament aux étudiants des sommes considérables (entre 7 000 euros et 8 000 euros pour obtenir la totalité du programme d’après un article lu récemment). Ce qui est cependant important de souligner, c’est le fait que la Cour des comptes s’est intéressée à cette situation en menant une enquête qui est quelque peu surprenante, car il est actuellement établi que 48 % des étudiants étaient inscrits dans ces écoles.
Ce constat m’attriste profondément, et ce d’autant plus que je suis médecin généraliste, boursier de l’État français, et j’ai fait le maximum pour arriver à obtenir mon diplôme au premier essai. Il m’a fallu beaucoup de volonté, et une nécessité de mettre ma propre existence « sous cloche » durant une année où j’ai travaillé d’arrache-pied. À cette époque il fallait réussir le concours pour pouvoir prétendre aux bourses l’année suivante (actuellement le versement des bourses est subordonné à la participation aux travaux pratiques).
Je me rappelle fort bien que les écoles privées de bachotage commençaient à se développer, et certains professeurs donnaient des colles (je ne dis pas qu’il s’agissait des questions qui étaient posées au concours) moyennant bien entendu des rétributions qui devaient être généreuses.
Bien entendu je n’ai jamais pensé choisir une telle option, d’autant plus que mes parents avaient la certitude que je n’arriverai jamais dans cette branche que j’avais choisie.
De plus je gardais à l’esprit que, même si certains étaient dans ces structures payantes réservées à « une élite ayant un certain train de vie », nous les boursiers avions la possibilité de réussir uniquement avec les cours dispensés par nos professeurs. Aussi par bravade, mais aussi par volonté de montrer que nous étions malgré tout des étudiants comme les autres, nous avons mangé de la vache enragée pour réussir le concours.
Au-delà de mon cas, je ne cesse de me poser la question de la régulière désinformation des étudiants (les parents ont également reçu ce lavage de cerveau) qui ont choisi de devenir professionnels de santé (par la voie de la LASS ou de la PASS). Ainsi sur les forums du bac, mais aussi lors des inscriptions universitaires, les écoles privées montent des stands, et souvent avec un certain cynisme recrutent des étudiants de seconde année qui reçoivent une petite obole pour leur contribution. De tels agissements me révoltent grandement, moi qui ne suis actuellement pas dans le besoin, mais qui milite pour que tous les jeunes bacheliers aient les mêmes chances de réussite.
Des solutions existent pour éviter la discrimination par l’argent !
Je ne suis pas le seul à avoir ce ressentiment vis-à-vis de ces écoles qui favorisent la sélection par l’argent. C’est ainsi que la plupart des doyens universitaires se sont émus de cette triste situation, et ont été à l’origine de la création des tutorats. Le ministère de l’Éducation conscient de cette problématique leur a apporté en 2017, pour qu’une égalité des chances puisse être observée, son soutien inconditionnel. Depuis cette date certains étudiants, et certaines associations regroupant des jeunes ayant réussi le concours, ont été à l’origine de mouvements associatifs.
À Marseille une prépa sociale et solidaire a été créée, et elle peut être fière de son recrutement, de son mode de fonctionnement, mais aussi des résultats obtenus par les jeunes qui ont décidé d’adhérer à ce principe. Ce qui fait chaud au cœur, c’est de voir que certains enseignants soutiennent, et donnent des cours supplémentaires pour que ces étudiants pas très argentés puissent obtenir un bon niveau.
Je suis très fier de voir que des solutions existent, car tous les étudiants quel que soit leur rang social doivent avoir les mêmes chances pour affronter les affres d’un examen qui s’apparente plus à un concours. Cela m’est d’autant plus cher qu’arrivé en 2e année j’ai été très surpris par le fait que notre groupe de boursiers était très peu fourni, et nous étions souvent discriminés par le reste de la promotion qui se targuait de ne pas être de la même condition sociale que la nôtre.
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