Gastro-entérologie

Brosser la langue contre la mauvaise haleine

Publié le 13/03/2009
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Neuf fois sur dix, l’halitose est d’origine buccale, gingivale ou périodontale. Certains bains de bouche et le brossage de langue permettent de lutter contre cet inconvénient. Aucun examen complémentaire n’est nécessaire.

Crédit photo : ©GARO/PHANIE

L’halitose n’est pas une indication à la fibroscopie oeso-gastrique en l’absence de symptomatologie digestive. Il n’existe pas d’étiologie digestive à l’halitose, hormis une sténose oesophagienne tumorale ou le très rare diverticule de Zenker de la partie supérieure de l’œsophage dont le diagnostic ne nécessite pas de fibroscopie digestive. Une étude parue en 2008 a mis en évidence une corrélation entre sévérité du reflux et halitose (1), mais il n’existe aucune preuve de disparition de l’halitose avec un IPP.

Le rôle de l'infection à Helicobacter dans l'halitose n'est pas établi. Cependant, une étude comparative sur 58 patients a montré que les bains de bouche à la chlorhexidine ne sont efficaces que lorsque l’éradication de H. pylori est effective(2).

L’avis du dentiste et de l’ORL

Dans la majorité des cas (90 %) (1), l’halitose est d’origine buccale et liée à l’existence d’une gingivite ou de périodontite. Un examen des gencives et des dents est impératif.

Lorsque l’examen dentaire et gingival est normal, un examen ORL est utile pour rechercher une sinusite chronique à l’aide d’un scanner, une amygdalite cryptique, un cancer ORL ou bronchique.

Nettoyer le dos de la langue

Les composés malodorants - composés sulfurés volatils, acides gras courts, diamine notamment – sont les principaux responsables de l’halitose. Ils proviennent de la putréfaction des composés organiques qui forment un enduit sur le dos de la langue. Le traitement qui consiste à racler avec douceur cet enduit avec des instruments comme des raclettes vendues en pharmacie est efficace (3). La langue doit être maintenue avec les doigts ou un linge puis brossée ou raclée plusieurs fois, d’aussi loin que possible en évitant les papilles du V lingual, de la partie postérieure vers la partie antérieure.

Ce nettoyage mécanique peut être associé à des bains de bouche à la chlorhexidine. Les bains de bouche ont une efficacité qui dure quelques heures. Cependant, ils ne peuvent être utilisés au long cours car ils peuvent être irritants (sensation de brûlure linguale) ou provoquer une coloration transitoire des dents.

Les chewing-gums sont des caches misères appréciés par les patients. Il importe cependant de les informer que les chewing-gums sans sucre augmentent la production de méthyl mercaptan un des principaux composés malodorants (4).

Un diagnostic simple

Le diagnostic consiste à sentir l’haleine du patient (diagnostic organoleptique). Néanmoins, il importe que l’examinateur n’ait ingéré ni alcool, ni thé, ni café, n’ait pas fumé ou utilisé des cosmétiques parfumés, afin de sentir correctement. Les précautions sont les mêmes pour le patient et il ne doit pas s’être brossé les dents ou nettoyé la bouche avant la consultation (5).

Par ailleurs, l’interrogatoire doit rechercher la prise de médicaments entraînant une sécheresse buccale pouvant être à l’origine d’une halitose, notamment les psychotropes, la trinitrine, les anticholinergiques, une chimiothérapie, sans oublier le tabagisme et l’alcool. Il est également utile d’informer les patients que le brossage des dents ne doit pas entraîner de saignement qui peut être à l’origine d’une halitose.

À noter que la mauvaise haleine après la nuit (haleine matinale) est physiologique.

L’avis du psy parfois

30 % des patients qui consultent n’ont pas mauvaise haleine, mais ils en sont persuadés, alors que personne ne leur a jamais fait de remarque sur leur haleine. Il s’agit d’une halitophobie qui peut gravement perturber la vie sociale, professionnelle et intime.

Ces patients modifient leur comportement et ont tendance à s’isoler : main devant la bouche, relations avec les autres respectant une distance hors d’haleine, hygiène buccale excessive, usage de chewing-gum, collutoires et pastilles sans discernement.

La prise en charge de ces personnes est difficile. Elle demande de l’empathie, du dialogue, une information et un soutien au long cours. Un avis psychologique est nécessaire afin d’éliminer une éventuelle dépression et la traiter.

Dr Emmanuel Cuzin (rédacteur, fmc@legeneraliste.fr) sous la responsabilité scientifique du Dr Thierry Vallot (Service d’hépato-gastro-entérologie. CHU, Hôpital Bichat Claude-Bernard. 46 rue Henri-Huchard. 75018 Paris. Courriel : thierry.vallot@bch.aphp.fr

Source : lequotidiendumedecin.fr