L’objectif est de prévenir la survenue de poussées, prévenir la progression du handicap, l’arrêter ou le freiner s’il est enclenché. Et l’espoir est de réparer.
> L’arsenal thérapeutique dans le traitement de fond de la SEP est aujourd’hui large avec des médicaments efficaces mais l’émergence de nouvelles thérapeutiques non sans risques, prescrites tôt dans la maladie et peut-être pour longtemps, rend indispensable de, en quelque sorte, « prévoir l’évolution » de la maladie et l'efficacité d'un médicament chez ces personnes jeunes.
Cela n’est pas simple et repose sur la pertinence de marqueurs cliniques (poussée, handicap, compliance), d’IRM (prise de gadolinium, nouvelles lésions T2…), de marqueurs biologiques (anticorps anti-interféron bêta…). Il est important de tenir compte du fait qu'au-delà de quelques années les effets cliniques de certains de ces traitements sont inconnus, ce qui est significatif pour une maladie durant 30 à 40 ans (10).
Quand instaurer un traitement de fond ?
> Un traitement doit être débuté tôt une fois le diagnostic posé, les avantages d’un traitement précoce résidant aussi bien dans la réduction de la fréquence des poussées (44 à 55 %) et de l’activité inflammatoire à l’IRM que dans l’allongement du délai avant l’apparition de signes de progression des séquelles de la maladie (7).
> Au tout début de la maladie, dès la première poussée avec un ou plusieurs symptômes neurologiques on évoque un syndrome cliniquement isolé (CIS). Un traitement de fond se justifie, mais seulement si l’IRM cérébro-spinale met en évidence de nombreuses lésions hyperintenses de la substance blanche ou une prise de contraste avec le gadolinium, d’autant plus que ces anomalies siègent en périventriculaire ou s’accompagnent de lésions profondes médullaires ou juxta corticales. En cas de doute une deuxième IRM est réalisée dans les 6 mois suivants pour déceler de nouvelles lésions. Le traitement diminue le risque de conversion vers une SEP.
Un traitement précoce est justifié d’emblée en cas d’événement démyélinisant inflammatoire initial sévère qui augmente le risque d’un événement suivant grave, de même une mauvaise récupération après un premier événement s’avère prédictive d’une mauvaise récupération pour le second (8).
> Les formes RR répondent nettement mieux aux traitements de fond que les formes PP, ces dernières progressives d’emblée, moins inflammatoires, présentent des particularités physiopathologiques (atteinte des oligodendrocytes ; démyélinisation caractéristique, infiltrats lymphocytaires), qui justifient les recherches en cours sur la neuroprotection.
> La découverte fortuite de lésions hyperintenses sur une IRM, en l’absence de symptomatologie évocatrice (syndrome radiologiquement isolé), ne doit pas faire débuter un traitement : une surveillance clinique et radiologique s’impose, 30 à 45 % seulement de ces cas verront dans les 2 à 5 ans apparaître des troubles neurologiques.
Traitements des formes RR
> Les immuno-modulateurs en première intention.
Ce type de traitement est proposé en première intention et le plus tôt possible une fois le diagnostic établi, ils diminuent notamment la synthèse des cytokines inflammatoires, l’expression de certaines molécules d’adhésion et du complexe majeur d’histocompatibilité et l’entrée des cellules immuno-incompétentes dans le SNC. Il en résulte un « climat » moins inflammatoire.
Il en existe deux types : les traitements injectables (connus depuis plus de 15 ans) et les traitements oraux, plus récents. Leur efficacité est sensiblement identique en ce qui concerne la réduction du nombre de poussées et de nouvelles lésions à l’IRM mais leur profil de tolérance diffère. (9) Leur efficacité a été parfaitement démontrée à court terme sur la fréquence des poussées (réduction de 30 % environ), les paramètres radiologiques de l’inflammation (charge lésionnelle en IRM) mais leur impact à long terme sur l’évolution du handicap neurologique reste incertain. La durée du traitement n’est pas définie, il est poursuivi tant qu’il permet un contrôle clinique et radiologique de l’affection.
Les traitements immuno-modulateurs injectables avec les Interferons bêta (Avonex, Betaféron, Extavia, Rebif, Plégridy) et l’acétate de glatiramère (Copaxone). Ces produits diffèrent selon leur mode d’administration (voie injectable SC ou IM) et la fréquence des injections. En cas d’intolérance à un médicament immuno-modulateur, un autre peut être proposé. Ce sont de traitements comportant peu d’effets indésirables et qu’il n’est pas nécessaire d’interrompre avant la conception d’un enfant. Une fois la grossesse certaine, ils sont arrêtés.
Les interférons, administrés par voie IM une fois par semaine (Avonex) ou sous-cutanée un jour sur deux (Betaféron, Extavia et Rebif) ou toutes les 2 semaines (Plegridy) n’ont pas de toxicité mais des effets secondaires essentiellement représentés par un syndrome pseudo-grippal (frissons, courbatures, céphalées et fièvre dans les heures suivant l’injection) qui peut être prévenu par la prise de paracétamol ou d’ibuprofène, et qui disparaît le plus souvent après 3 mois de traitement. Les réactions aux points d’injection sont moins fréquentes depuis l’utilisation d’auto-injecteurs… La possibilité d’une cytolyse hépatique ou d’une leucopénie impose un hémogramme et un dosage des transaminases tous les mois pendant 3 mois puis tous les 6 mois.
L’acétate de glatiramère (Copaxone 20 mg) s’administre quotidiennement par voie sous-cutanée. Ensemble de 4 acides aminés, cette molécule qui permet une induction des lymphocytes T suppresseurs d’antigéne-spécifiques a montré une efficacité comparable à l’interféron sur la fréquence des poussées. La Copaxone est responsable de rares réactions allergiques notamment cutanées et de sensations d’oppression thoracique désagréables de quelques secondes survenant après l’injection mais ne nécessitant pas l’arrêt du traitement. Aucune surveillance biologique n’est nécessaire. D’ici quelques mois, la Copaxone 40 mg devrait être disponible avec la réalisation de 3 injections sous-cutanées par semaine uniquement.
Les traitements par voie orale
Le tériflunomide (Aubagio) est un immunosuppresseur sélectif disponible depuis novembre 2014. Il n’a pas démontré d’avantage clinique par rapport aux traitements de référence (interférons, acétate de glatiramère) mais son mode d’utilisation (1 comprimé par jour) et sa bonne tolérance immédiate sont intéressants.
Cependant il faut être vigilant au risque de cytolyse (contrôle du bilan hépatique régulier toutes les 2 semaines puis tous les 2 mois), d’hypertension artérielle et surtout au risque tératogène (procédure d’élimination accélérée au Questran en cas de grossesse).
Le diméthyl fumarate (Tecfidera), 2 gélules/jour, immuno-modulateur est disponible depuis avril 2014. Son mécanisme d'action n'est pas complètement élucidé. Des troubles digestifs et des bouffées de chaleur peuvent survenir les premières semaines ce qui nécessite une augmentation progressive du dosage de la molécule. Puis une surveillance régulière, hématologique, rénale et hépatique, est nécessaire pendant le traitement.
> Les traitements de deuxième ligne
Ils sont utilisés en cas d’échec des médicaments immunomodulateurs ou dans le cadre de formes agressives : intervalle court entre deux poussées avec des séquelles, charge lésionnelle importante d’emblée, persistance de l’inflammation à l’IRM (lésions prenant le gadolium). Les formes agressives peuvent l'être d'emblée ou survenir secondairement chez des patients ayant une forme RR de la maladie.
Les résultats sont remarquables avec une réduction importante du taux de poussées et de l’évolution des lésions IRM (90 % des lésions rehaussées par le gadolinium) et une amélioration de la qualité de vie (performances cognitives, fonction physique, diminution des douleurs…). Ce sont des médicaments réservés à l’usage hospitalier, car ils exposent à des complications parfois graves. Ils doivent être interrompus 3 à 6 mois avant une grossesse.
Le natalizumab (Tysabri), en injection IV de 300 mg toutes les quatre semaines, est un anticorps monoclonal bloquant le passage des cellules immuno-incompétentes à travers la barrière hémato-encéphalique. Il est réservé aux formes très inflammatoires de la maladie, son efficacité sur la fréquence des poussées est nettement supérieure (68 contre 30 %). Il diminue considérablement les lésions IRM et peut améliorer le handicap lors des premières perfusions. Si dans l’ensemble il est bien toléré, il présente un risque d'infections opportunistes essentiellement cérébrales, clairement liées au mécanisme d’action du produit, ce qui restreint son utilisation.
Le fingolimod (Gilenya) est disponible sous forme de gélules. Il est nécessaire de débuter ce traitement à l’hôpital car une surveillance du rythme cardiaque doit être faite durant les 6 premières heures, en raison de la bradycardie qu’il entraîne à son introduction (à 4 heures de la 1re prise). Une surveillance sanguine régulière (lymphocytes et hépatique à 1 mois, 3 mois, puis tous les 3 mois) et de la vue à 4 mois sont aussi nécessaires (possibilité de diminution de l’acuité visuelle par œdème maculaire).
La mitoxantrone (Elsep, Novantrone) est généralement prescrite en cas d’échec ou d’intolérance au Tysabri et au Gilenya ou de SEP particulièrement agressive, pas plus de 6 mois compte tenu du risque de risque toxicité cumulative cardiaque et hématologique. Une NFS doit être demandée tous les mois pendant 6 mois puis tous les trois mois ensuite (le risque de leucémie aiguë est estimé entre 1 à 2 cas pour 1 000 patients traités). Il s’administre en 6 perfusions maximum, espacées de 1 mois. Une échographie cardiaque est donc réalisée avant de débuter le traitement puis tous les ans durant 5 ans. Un suivi sanguin est également nécessaire durant le traitement et sur cinq ans.
Les traitements à venir
L’alemtuzumab (Lemtrada) est disponible depuis cette année, en France dans des indications limitées, pour les patients avec une forme RR sévère. Ce traitement a une modalité d’action particulière avec l’administration d’un cycle de perfusions par an, pendant 2 ans. D’autres anticorps monoclonaux comme le daclizumab ou l’ocrelizumab devraient sortir dans les prochaines années.
> Traitements des formes progressives
Peu d’essais ont été réalisés dans les formes progressives. Un essai prometteur de phase 3 avec l’ocrelizumab (anticorps monoclonal anti-CD20) dans les formes PP pourrait changer l’état des lieux d’ici 1 à 2 ans.
Des immunosuppresseurs autorisés pour traiter certaines maladies auto-immunes sont utilisés dans le cadre de la SEP progressive. Il s’agit notamment du cyclophosphamide (Endoxan), de l’azathioprine (Imurel) et du mycophénolate mofétil (Cellcept). Des études sont en cours avec d’autres traitements (comme le siponimod…)
Les recherches portent en particulier sur la neuroprotection et la remyelinisation, notamment avec les cellules souches avec l’espoir de pouvoir enfin apporter des solutions aux formes PP peu sensibles aux traitements actuels. Actuellement, plus de cinquante essais thérapeutiques sont en cours dans le monde ce qui laisse présager un très large panel thérapeutique pour l’avenir mais il faut 15 ans pour un nouveau médicament et environ 1 million d’euros…
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