En cas de passage aux urgences pour douleur thoracique, une femme noire a près de 20 % de chance en moins qu’un homme blanc d’être considérée comme étant en urgence vitale. À symptôme identique et quelle que soit leur couleur de peau, les hommes sont davantage pris au sérieux que les femmes. C’est ce que révèle une récente étude du CHU de Montpellier publiée dans l’European Journal of Emergency Medicine et menée auprès de 1 563 médecins et infirmiers urgentistes exerçant en France, Suisse, en Belgique et à Monaco.
L’enquête, réalisée entre le 14 juillet et le 15 août 2023, s’appuie sur huit profils types de malades créés par une intelligence artificielle. Il s’agit de quatre femmes et quatre hommes arrivant aux urgences et se plaignant de douleur thoracique. Ils sont habillés des mêmes couleurs mais présentes des apparences ethniques différentes : asiatique, blanc, maghrébin et noir. Les répondants doivent interpréter et évaluer leur situation.
Au global, plus d’un patient sur deux (55 %) a été jugé en urgence vitale, respectivement dans 62 % des cas pour les hommes et 49 % pour les femmes. L’étude montre également que 61 % des personnes d’origine maghrébine sont aussi triées en urgence vitale, contre 58 % des patients blancs, 55 % des personnes asiatiques et 47 % des personnes noires. Enfin, les auteurs ont croisé les données de genre et d’origine ethnique. Verdict : 63 % des hommes blancs ont été placés en urgence vitale contre seulement 42 % des femmes noires.
Faut-il voir dans ces résultats l’expression d’un sexisme et d’un racisme larvés à l’hôpital ? Non, répond le Pr Xavier Bobbia, chef du service des urgences du CHU de Montpellier à l’origine de l’enquête. « Ma conviction, c’est que nous vivons dans un monde raciste et sexiste. Même si les soignants essaient d’être le plus équitables possible, ils ne sont pas détachés de ces préjugés. » Pour lui, cette même étude réalisée trente ans plus tôt aurait donné des écarts bien pires et les choses évoluent vers le mieux. « Nous sommes dans un continuum. L’enquête montre que nous ne sommes pas au bout du chemin », conclut le médecin.
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