Le Dr François Braun, président de Samu-Urgences de France, chef de service des urgences du centre hospitalier régional de Metz, analyse les répercussions de l’épisode caniculaire en cours sur l’organisation des services d’urgences.
Le Quotidien du médecin : Observez-vous une augmentation de l’activité des urgences liée à la canicule susceptible de mettre en difficulté les services ?
Dr François Braun : Des tensions sont apparues ce week-end sur des régions très spécifiques, situées dans le quart Nord-Est (sauf dans la Meuse, à Verdun, où la météo fut plus clémente). L’Alsace, la Franche-Comté, la Lorraine et le nord de la Bourgogne, ont accusé une très forte augmentation de l’activité du Samu-Centre 15, de l’ordre de 160 % en moyenne, avec des pics au-delà de 200 %, notamment la nuit !
Plusieurs Samu de la région ont dû renforcer leur personnel en fin de journée et la nuit, pour répondre aux appels supplémentaires.
Dans les hôpitaux, les services de médecine ont anticipé la situation en libérant des lits et en évitant des fermetures pour le week-end. En revanche, des tensions fortes sont apparues sur les lits de réanimation qui ont été rapidement occupés par des patients présentant par exemple des hyperthermies majeures, au-delà de 42 degrés. Ce lundi matin encore, la situation est un peu tendue sur les lits de réanimation.
À Metz, la régulation médicale a eu à traiter plus de 1 500 dossiers dimanche (contre un peu moins de 1 000 habituellement), tandis qu’il y a eu plus de 200 passages aux urgences, soit une augmentation de 20 %.
Quels sont les profils des patients s’adressant aux Samu et aux urgences ?
Nous avons vu très peu d’enfants : les mesures de prévention fonctionnent bien, c’est rassurant. Trois profils se dégagent : des personnes âgées vivant seules, victimes de déshydratation importante, aggravée par les traitements (neuroleptiques, notamment) ; des adultes jeunes pratiquant le sport dans des conditions absurdes, présentant des états de déshydratation et d’hyperthermie modérés. Ils nécessitent un rafraîchissement et une hydratation parfois en perfusion, mais pas d’hospitalisation.
Enfin, la partie la plus importante est constituée de personnes victimes de malaises, en particulier des pathologies chroniques qui décompensent.
A-t-on tiré les leçons de 2003 ?
Oui, très nettement. On n’est pas du tout dans une situation comparable, avec un afflux important de résidents d’EHPAD (établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes). Les EHPAD ont anticipé la situation, tout comme les hôpitaux qui sont de plus en plus rôdés aux crises (grippe l’hiver, canicule l’été). Les pouvoirs publics apportent une bonne réponse, et des conseils de prévention sont donnés. La problématique des âgés isolés, non repérés, demeure néanmoins.
Dans quel état d’esprit appréhendez-vous les prochains jours ?
Avec vigilance. Au CHR, nous avons réuni notre cellule de crise ce matin, on la réunit encore ce soir. Mais je ne suis pas inquiet : nous arrivons encore à faire face, nos capacités d’accueil sont certes en tension, mais pas débordées.
Au niveau national, la carte des tensions suit la carte des alertes "canicule", avec une incidence moindre dans les régions sud, habituées aux fortes chaleurs. Dimanche soir, la Vallée du Rhône et Lyon ont connu des situations semblables à la nôtre samedi. Mais selon les contacts que j’ai eus à Paris ou Lille, après quelques difficultés en milieu de semaine dernière, la situation est aujourd’hui revenue à la normale.
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