A l’heure où certaines voix commencent à se faire entendre pour défendre l’idée d’une sélection à l’entrée de l’université, il conviendrait d’y réfléchir dès maintenant pour l’appliquer aux facultés de médecine. Celles-ci pourraient enfin se consacrer pleinement à la formation des futurs médecins plutôt que de s’adapter aux conditions d’entrainement de leurs étudiants au meilleur classement possible et à laisser les officines privées assurer le bachotage.
Au passage, on jette un voile pudique sur l’équité démocratique brandie par les défenseurs du statu quo actuel. On peut en effet s’interroger sur les moyens utilisés par certains initiés pour optimiser leurs chances de réussite : outre les prépas privées, les redoublements volontaires de terminale, les années blanches post bac, les hébergements proches des facs, bref des conditions matérielles qui peuvent faire la différence pour ceux qui en ont les moyens, sans oublier ceux qui contournent l’obstacle en faisant un détour par la Roumanie ou la Belgique avant de revenir en France.
La France cultive sa singularité
Dans le paysage européen de la formation médicale, notre pays cultive sa singularité. A l’instar des grandes écoles, la médecine classe ses étudiants à la fin de la première année puis à la fin de la sixième année pour le choix des spécialités. Cette culture de l’élitisme de fin d’adolescence aurait pour but de désigner les meilleurs médecins. Or les critères utilisés pour le concours- essentiellement la restitution de connaissances déclaratives- n’ont rien à voir avec les compétences attendues du futur médecin et le raisonnement diagnostique, la prise de décisions, l’habileté technique ou la réflexion éthique sont probablement aussi utiles que la capacité mémorielle.
Dans la grande majorité des pays occidentaux, on rassemble un certain nombre de critères : notes du bac ou de son équivalent, tests d’aptitudes et psychotechniques, entretiens pour vérifier que l’étudiant a bien le niveau suffisant pour suivre des études médicales. Le nombre d’étudiants retenus chaque année est en accord avec les possibilités de formation de l’université. Cela s’appelle la sélection et en France c’est tabou !
La fin des amphis surchargés
Il semble pourtant évident que cette méthode finira par trouver sa place dans notre pays mais la question qui reste sans réponse est dans combien de temps ? Cette sélection permettrait de réduire considérablement le nombre d’étudiants en première année et donc les amphis surchargés. Elle permettrait d’éviter un traumatisme psychologique indélébile à l’étudiant qu’on a laissé se fourvoyer en première année. Elle permettrait d’éviter de perdre deux ans pour des milliers d’étudiants à un âge critique pour le choix de leur vie professionnelle. Elle permettrait de redéployer les crédits exorbitants actuellement captés par l’organisation de cette première année vers d’autres secteurs de l’université qui en auraient bien besoin. Elle permettrait de revenir à des techniques pédagogiques plus intéressantes comme les enseignements dirigés car le tout numérique ne sera pas la panacée. Elle permettrait l’apprentissage, les échanges et pourquoi pas l’évaluation par petits groupes aux dépens de l’individualisme compétitif pour mieux préparer à l’exercice futur dans les maisons de santé, à l’hôpital ou dans les laboratoires de recherche. Car la mission d’une faculté de médecine est d’abord de former et non pas de préparer à un concours.
Il est toutefois permis d’espérer au vu des expérimentations autorisées il y a peu dans certaines universités qui ont mis le pied dans la porte. L’augmentation du nombre des passerelles où les étudiants sont sélectionnés sur dossier et après entretien et surtout l’exemple du programme PluriPass de l’université d’Angers où une partie des étudiants est classée après plusieurs mini-entretiens vont dans la bonne direction. Cela montre qu’il est possible de sélectionner en médecine en partie grâce à l’oral. Il resterait maintenant à l’appliquer avant l’entrée à l’université.
Adapter aussi les critères de recrutement
Il conviendrait aussi de réfléchir sur le type de futurs professionnels que l’on souhaite pour notre pays. Il faut bien reconnaître que le profil actuel est assez uniforme. Si l’on veut plus de diversité sociale et si l’on souhaite demain non seulement des chercheurs, des spécialistes, des universitaires performants, mais aussi des praticiens soucieux d’une approche holistique de la santé, il sera nécessaire d’adapter les critères de recrutement.
Mais avant d’en arriver là, on pourrait peut-être avancer un peu plus rapidement en prenant deux décisions : - ne retenir en médecine que les étudiants ayant obtenu une mention au bac (l’absence de mention annulant quasiment toute chance de réussite et l’exception ne constitue pas un principe), - ouvrir largement les passerelles (20 à 25% des places) en donnant plus de libertés aux universités pour diversifier le profil de leurs futurs étudiants.
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