La faculté de médecine de Lille a décidé d'abandonner définitivement son DU d'homéopathie. Le Pr Didier Gosset, doyen, s'en explique au « Quotidien ». « Nous ne devons pas tromper les étudiants... », relève-t-il, soulignant qu'avec l'homéopathie, « on est dans le champ de la croyance ».
LE QUOTIDIEN : Vous aviez suspendu dès 2018 le diplôme universitaire d'homéopathie, avant de confirmer son abandon définitif il y a quelques jours. C'était une question de crédibilité pour l'Université ?
Pr DIDIER GOSSET. Oui bien sûr ! L'Université moderne se doit d'être exemplaire vis-à-vis d'une médecine scientifique fondée sur les preuves. Nous devons donc mettre ces principes en accord avec ce que nous enseignons. Depuis l'avis de la Haute autorité de santé, nous savons que l'homéopathie n'a pas d'efficacité particulière en dehors de son effet placebo.
Nous ne devons pas tromper les étudiants à qui nous enseignons depuis dix ans des lectures critiques d'articles. Ils sont demandeurs pour qu'on leur enseigne des choses prouvées par les données de la science et ils ne comprendraient pas – et beaucoup l'ont exprimé – qu'on continue à enseigner l'homéopathie. Par contre, cela n'exclut pas de faire des cours ponctuels sur ce qu'est un effet placebo et sur la façon de réagir face aux patients qui utilisent l'homéopathie.
Nous ne devons pas non plus tromper les patients. Notre responsabilité est de leur assurer une information claire, intelligible et loyale. Surtout, ne pas retarder un diagnostic, une thérapeutique du fait de l'usage de l'homéopathie.
Certaines facultés maintiennent pour l'instant cet enseignement. Pour eux, c'est une façon de contrôler cette pratique. Les comprenez-vous ?
Dans les années 80, on avait proposé de créer ce diplôme d'homéopathie car on ne savait pas très bien comment considérer l'homéopathie. Beaucoup proposaient de l'intégrer à l'Université pour pouvoir en effet la contrôler.
Mais aujourd'hui, les Académies de médecine et de pharmacie, puis la Haute autorité de santé, ont démontré que cette pratique est inefficace sur le plan thérapeutique. Dire aux étudiants que cela existe, oui, mais l'enseigner en tant que tel sûrement pas ! Ce n'est plus une discipline scientifique, ce n'est plus de la médecine. On est dans le champ d'une croyance, d'une pratique. Enseigner l'homéopathie serait une façon de la cautionner...
J'ai quand même l'impression que la majorité des facultés de médecine comme Angers ou Paris ont suivi Lille. Cela est en train de se faire naturellement.
Avant sa fermeture, cet enseignement attirait-il beaucoup de candidats ?
Non. Pour la dernière session 2016-2018, nous avons recensé environ une dizaine d'étudiants. Et le nombre d'étudiants n'a jamais dépassé ce chiffre. Cela n'attirait pas les foules. Finalement cela gêne personne qu'on arrête cet enseignement.
Mais je ne suis pas certain que la ministre de l'Enseignement supérieur se prononcerait sur cette question car les Universités et les doyens de facultés sont indépendants et doivent prendre leurs responsabilités.
Que deviennent les enseignants ?
Ce sont en général des enseignants vacataires qui venaient ponctuellement enseigner. D'ailleurs, c'était un des problèmes car personne ne pouvait contrôler précisément ce qui se disait.
Souhaitez-vous que l'Ordre supprime le droit au titre de médecin "homéopathe" ?
Il y a une logique d'ensemble. Mais cette décision appartient à l'Ordre national des médecins. En tout cas, nous nous réjouissons de la décision logique [de déremboursement total] prise par la ministre de la Santé qui reprend les décisions scientifiques.
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