Auto-monitoring, développement des diagnostics rapides, aide à la prescription, généralisation des téléconsultations, pharmacie en ligne, analyse du génome… La montée en puissance des nouvelles technologies et de l’intelligence artificielle (IA) dans le secteur de la santé va percuter les pratiques médicales et les métiers, questionnant au passage la formation initiale des praticiens.
« Un étudiant en première année de médecine aujourd’hui apprend des choses qui ne le préparent pas à la médecine qui se pratiquera dans 15 ou 20 ans », estime le Pr Jean Sibilia, PU-PH en rhumatologie au CHU de Strasbourg et président de la Conférence des doyens des facultés de médecine.
Selon la dernière livraison (2018) du baromètre BVA sur les tendances de la santé*, certaines évolutions sont inéluctables, comme le recours aux applications de santé : 70 % des médecins pensent que certaines sont utiles (à condition de faire le tri) et 43 % des praticiens libéraux ainsi que 52 % des hospitaliers en conseillent déjà à leurs patients. Les attentes a priori des Français apparaissent fortes en matière d'outils numériques : 83 % attendent le dossier médical partagé (DMP), 81 % comptent sur le développement de l’auto-monitoring et 76 % sur celui des tests de diagnostic rapide.
Pour le Pr Marion Leboyer, PU-PH, responsable du pôle de psychiatrie et d’addictologie de l’hôpital Henri-Mondor (AP-HP, Créteil), ces nouvelles technologies et en particulier la puissance de l'IA constituent un « espoir immense » et conduiront à une profonde « transformation de l’évaluation diagnostique et clinique » et à des « progrès sur le plan thérapeutique ».
Pas de médecine sans médecins mais une expertise différente
Une écrasante majorité des Français (84 %) et des médecins (86 %) considèrent à cet égard comme un progrès les systèmes d’intelligence artificielle pour aider la profession à « analyser plus vite et mieux ». Un Français sur deux (et également un praticien sur deux) considèrent que les programmes d’IA deviendront dans certains cas plus performants que les médecins eux-mêmes pour diagnostiquer les maladies et prescrire des traitements.
Pour autant, ces outils digitaux ne remplaceront pas les médecins (selon 89 % des Français et 94 % des médecins) car « ils présentent des biais et un contrôle humain sera toujours nécessaire ». C'est donc l'expertise médicale qu'il faudra valoriser dans chaque spécialité. À noter que 93 % des médecins soutiennent l’idée selon laquelle « dans le soin, il y a une dimension humaine qu’aucune IA, aussi performante soit-elle, ne pourra égaler ». Les Français sont un peu moins convaincus sur ce point (57 %).
Pour le Pr Sibilia (conférence des doyens), une prise de conscience rapide est nécessaire : « Il faut engager dès aujourd’hui une réflexion sur la médecine de demain et la mise en place d’une formation réactive. C’est un énorme défi d’autant que le temps de la réforme est un temps long ». Selon lui, le praticien du futur devra conserver ses « qualités humaines de compassion et de bienveillance », « être un peu geek » et travailler en « pluriprofessionnalité car un seul individu ne pourra pas tout faire ».
* Méthodologie qualitative et quantitative : sondages en ligne du 12 au 20 mars 2018 auprès d’échantillons représentatifs selon la méthode des quotas (1006 Français âgés de 18 ans et plus et 300 médecins)
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