Le Pr Jean-Luc Dubois-Randé, président de la conférence des doyens de médecine appelle à la vigilance après l'ouverture des inscriptions à une prépa privée en médecine basée à Orléans.
Baptisée MOZ (Médecine Orléans Zagreb), celle-ci propose pour 5 000 euros de préparer dès la prochaine rentrée des étudiants français à la première année de médecine puis d'intégrer 30 % d'entre eux à la faculté de Zagreb en Croatie pour le reste de leur cursus, contournant ainsi le numerus clausus. « Les 50 étudiants maximums recrutés auront la chance de suivre une formation de haut niveau en adéquation avec la médecine internationale », explique le bureau de la prépa MOZ dans un communiqué. À l’issue de l'année, seuls les quinze meilleurs élèves obtiendront leur passe-droit pour la faculté croate.
« La conférence est totalement opposée à ce genre de pratiques. C'est une escroquerie comportant des risques pour l'avenir de l'étudiant, un abus de confiance des jeunes et de leur famille », confie le Pr Dubois-Randé au « Quotidien ». Le doyen souligne par ailleurs que le promoteur de ce projet n'est pas un médecin et il s'étonne de l'absence de convention de partenariat entre l'université de Zagreb et le CHU de Tours. La Conférence des doyens a alerté le ministère de l'Enseignement supérieur du risque de voir éclore une formation illégale.
De nombreuses zones d'ombre
Cette offre soulève par ailleurs de nombreuses questions. Qui pilote cette formation ? Quels enseignants la dispenseront ? Où les cours auront-ils lieu ? Les matières d'enseignement énumérées dans le communiqué (anatomie, anglais, atomistique, biologie, biologie cellulaire, chimie des solutions, chimie organique, histologie, physique et statistiques) ne correspondent pas à celles décrites sur le site de MOZ.
L'admission à la prépa requiert une inscription à l'université, mais aucune précision n'est mentionnée. Joint par téléphone, le Pr Patrice Diot, doyen de la faculté de médecine de Tours affirme ne pas être partenaire de ce projet. « Ce site propose une prépa à la PACES mais cette structure est opaque. On peut se poser des questions sur le programme, le numéro de téléphone qui ne fonctionne pas et sur l'organisation », commente-t-il.
L'Association nationale des étudiants en médecine de France (ANEMF) abonde en ce sens. « Il y a une incompréhension sur l'inscription à l'université. Cela rappelle l'affaire du Clesi (ex-Pessoa N.D.L.R.) », indique Rémi Patrice, ex-responsable des études médicales de l'association. En 2012, une formation privée avait ouvert à Toulon et l'année suivante à Béziers et proposé des formations en odontologie et kinésithérapie, notamment, contournant le numerus clausus…
Selon l'ANEMF, les étudiants doivent être vigilants. Les solutions proposées pour contourner la PACES ne sont toujours pas les meilleures et n'amènent pas forcément à une équivalence de diplôme à la fin des études. « Il est possible que ces étudiants français ne réussissent pas le certificat de compétence clinique (CCC) à la fin du second cycle », prévient-elle.
Marie Reynier, rectrice de l'Académie Orléans-Tours a également saisi Thierry Mandon, secrétaire d'Etat à l'Enseignement supérieur. « Le site ne pourra pas ouvrir ses portes à la rentrée car l'association ne rentre pas dans les clous de la loi Fioraso », souligne-t-elle. En effet, cette loi impose une déclaration préalable à plusieurs acteurs dont le recteur académique. Dans le cas d'une formation médicale, un dépôt de dossier de demande d'agrément doit être fait au plus tard six mois avant la date d'ouverture de la structure. Ce n'est pas le cas de la prépa MOZ.
Contactée par le « Quotidien », la prépa MOZ n'a pas donné suite à notre demande.
Les études de médecine dévoyées, selon la CSMF
La Confédération des syndicats médicaux français (CSMF) a dénoncé, le 5 juillet cet institut de formation privé qui précipite le départ d'étudiants à l'étranger. « Ce système ressemble fort à ce qui existe en Roumanie ou d'autres pays européens où beaucoup d'étudiants contournent la sélection française puis reviennent en France et se présentent aux ECN pour faire leur 3e cycle », s'insurge le syndicat. Il appelle l'État à prendre « des mesures pour garantir à la population que leurs médecins de demain auront la même qualité de formation et partageront la même culture médicale. »
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