Moins d’une semaine après avoir mis dans la rue près de 10 000 jeunes, les syndicats d’internes accroissent la pression sur le gouvernement pour bannir toute forme de régulation. Ils réclament expressément à François Braun le retrait de l’article 23 du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), qui prévoit l’ajout d’une quatrième année à l’internat de médecine générale, à effectuer en « priorité » dans les zones sous-denses.
Malgré les protestations des juniors, soutenu par leurs aînés libéraux et hospitaliers, le gouvernement ne fléchit pas. L’Intersyndicale nationale des internes (Isni) appelle donc ses troupes à « la reconduction de la grève ». Elle lance un « appel massif à se déclarer gréviste du 28 octobre au 1er novembre inclus », détaille Olivia Fraigneau, présidente de l’Isni. Une contestation qui devrait être assortie d’une manifestation courant novembre.
« Communication maladroite »
Le 14 octobre pourtant, jour de la grève, François Braun avait reçu une délégation de jeunes venant de l’Isni, de l’Intersyndicale nationale autonome représentative des internes de médecine générale (Isnar-IMG) et de l’Association nationale des étudiants en médecine de France (Anemf). Devant les juniors, le ministre et urgentiste avait concédé « une communication maladroite », rapporte l’Isni, tout en restant droit dans ses bottes sur le fond. François Braun a notamment affirmé que l’allongement de l’internat de médecine générale était soutenu par l’ensemble des acteurs. Faux, répond Olivia Fraigneau qui fait valoir que cette réforme, en l'état et faute de garanties, est « rejetée, tant par les praticiens en exercice dans leur immense majorité » que par les jeunes. En témoigne la vague de soutien au mouvement du 14 octobre.
Retrait des mesures coercitives
Alors que l'examen du PLFSS en séance publique a commencé ce jeudi à l’Assemblée, les jeunes ont rédigé une lettre ouverte à l’ensemble des élus et aux ministres concernés (Santé, Enseignement supérieur). L’Isnar-IMG, l’Isni et l’Anemf rappellent leurs doléances : le retrait de toute mesure coercitive des agendas parlementaires.
« Ne tombez pas dans la démagogie des mesures de régulation à l’installation, ne cédez pas à l’obligation d’installation à la fin de nos études imposant un changement de médecin perpétuel qui dégradera leur suivi à long terme », exhortent-ils. Les jeunes appellent sénateurs et députés à leurs responsabilités : « Vous, qui avez aujourd’hui le pouvoir de sauver ou achever le système de santé : écoutez les premiers concernés ».
Assez de MSU ?
Les craintes sur la qualité pédagogique de cette année supplémentaire ne viennent pas de nulle part. Les internes de médecine générale font savoir aux élus que leur « formation sur trois ans est déjà dégradée ». Toujours en médecine générale « moins de 50 % des cours obligatoires sont assurés dans certaines subdivisions », affirment-ils, regrettant un manque d’encadrement chronique.
Le Syndicat national des enseignants en médecine générale (Snemg) prévient lui aussi que cette quatrième année de consolidation ne pourra pas se faire sans maîtres de stage pour l'encadrer. Et pour les enseignants, favorables à cette 4e année, toute coercition est à proscrire. « Nous constatons chez nos jeunes confrères une appétence grandissante à exercer dans les territoires depuis la réforme de 2017 laissant plus de place à l’ambulatoire. Ne leur coupons pas cet élan ! », avance le Snemg.
Soutien du cinéma
Le combat des internes bénéficie par ailleurs d’un soutien médiatique de poids. Généraliste de formation, le réalisateur Thomas Lilti a pris fait et cause pour les juniors. Dans une tribune publiée dans « Libération », il déclare que « faire peser le poids de 40 ans de carence des politiques de santé sur les épaules des étudiants est injuste ». Celui qui a dépeint avec justesse le quotidien des carabins à l’hôpital dans « Hippocrate » en 2014 craint que l’allongement de l’internat n’entraîne une fuite des médecins « vers d’autres carrières ». « Les internes et jeunes médecins sont déjà trop nombreux à arrêter, l’embolie pourrait grandir, imagine Thomas Lilti. Je suis bien placé pour le savoir, ayant moi-même cessé d’exercer comme médecin ».
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