Dijon délaissée par les internes de médecine générale

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Publié le 11/10/2018
CHU Dijon

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À l'issue du choix de spécialité d'internat, si la médecine générale n'a pas fait le plein d'internes dans plusieurs facultés, Dijon est la grande perdante. 35 des 81 postes (43 %) ouverts dans la spécialité n'ont pas trouvé preneurs dans la préfecture de Côte d'Or lors de la procédure informatisée de choix. Le désamour pour cet UFR qui faisait quasiment le plein l’année dernière peut surprendre.

Le Dr Martin Ambroise, généraliste à Dijon, qui a achevé son internat il y a trois ans n’est lui pas surpris par ce résultat. « Dijon n’a pas bonne presse », explique-t-il. « La Bourgogne est une belle région avec une bonne qualité de vie. Par contre, si vous voulez un internat de qualité et être entouré par des gens qui vous veulent du bien, il vaut peut-être mieux aller voir ailleurs », tranche le Dr Ambroise. Le généraliste décrit une formation théorique « très infantilisante », où l’on « punit » les internes qui manquent des sessions en leur en ajoutant des supplémentaires. Il dénonce aussi la répartition des stages, où « on ne se préoccupe pas trop de savoir si un interne a un projet professionnel pour s’implanter sur le territoire. Il faut mettre tant d’internes dans la Nièvre, tant dans l’Yonne de façon bête et méchante ».

Climat anxiogène

Le Dr Ambroise vient d’être écarté du département de médecine générale et ne peut plus prendre d’internes car son exercice – il travaille pour SOS médecins – est jugé comme incompatible avec cet encadrement. Mais il se défend d’en faire une croisade personnelle et dénonce un climat d’ensemble malsain dans le département. « Il suffit de discuter un peu avec les internes et de voir leur mal-être sur les réseaux sociaux. Les conditions de validation à Dijon sont telles que beaucoup font leur internat et s’en vont. Les étudiants ont la trouille au ventre à l’idée de passer pour valider un mémoire ou de se mettre en disponibilité parce qu’ils vont se faire saquer et que ça va apparaître dans leur dossier », décrit-il. Les internes dijonnais sollicités n'ont pas souhaité témoigner craignant des représailles pour la suite de leur cursus.

Le DMG dénonce un Dijon bashing

Le directeur du département de médecine générale, le Pr Jean-Noël Beis dément catégoriquement tout problème particulier dans sa ville. « Il y a trois ans déjà, des postes n'avaient pas été pourvus. Nous avions donc fait un travail de recherche pour déterminer ce qui guide le choix des internes, qu'il s'agisse des étudiants qui quittent Dijon pour l’internat, de ceux qui restent ou encore des jeunes qui viennent de l’extérieur. Dans les trois cas, il s'agissait avant tout d'un choix personnel », explique-t-il. Le Pr Beis affirme que son département est victime d’un « Dijon bashing », notamment sur les réseaux sociaux, et garantit la qualité de la formation proposée en Bourgogne. Selon lui, ces critiques sans bien-fondé s’apparentent davantage à une vendetta personnelle. « Quel est le but poursuivi de nous discréditer ? Certaines personnes m’en veulent, je ne sais pas pourquoi »« Je laisse à mes internes la liberté de s’exprimer et s’ils ont des soucis ils peuvent en parler. Il y a eu des évènements malheureux et c’est dramatique que cela puisse être utilisé à des fins de discrédit de la région. »

En juillet dernier, un interne en médecine générale à Dijon s’est suicidé. À l’époque, l’absence de communication sur cet évènement tragique avait choqué certains. « Je ne mets pas ce suicide sur le dos de la fac, mais il y a des internes qui ne sont pas bien et je suis sidéré qu’il y ait eu un silence de cathédrale de la faculté de médecine », souligne le Dr Ambroise. Le Pr Beis explique avoir préféré se « tourner vers la famille » du défunt dans cette situation difficile, même s’il reconnaît que c’était « peut-être une erreur de ne pas communiquer vers les internes ».

D'aucuns espèrent que la situation va évoluer l'an prochain avec le changement de direction au département de médecine générale. Le Pr Beis revendique un fonctionnement collégial et du DMG et assure que son successeur, qu'il connaît déjà, suivra « la même ligne » que lui.


Source : lequotidiendumedecin.fr