La première négociation conventionnelle visant à définir les missions et le financement des futurs assistants médicaux a réuni ce jeudi à l'Assurance maladie les cinq syndicats signataires (CSMF, SML, FMF, MG France et Le Bloc) ainsi que les représentants des jeunes médecins, présents pour la première fois. Pour l'heure, l'objectif « d'aller vite » pour arriver à un accord avant avril, compte tenu de l'urgence de la démographie médicale dans certains territoires, semble être le seul point de convergence entre la CNAM et les syndicats. En effet, les demandes de la profession, tant sur le profil de l'assistant que sur le financement, semblent très éloignées des lignes directrices adressées par Agnès Buzyn. « Cette réunion était une première approche mais on voit déjà qu'il y a un espace important entre ce que nous demandons et ce que nous présente la CNAM », a confirmé à la sortie le Dr Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF.
Dérogations
Les orientations présentées ce matin aux représentants de la profession montrent toutefois qu'une marge de manœuvre est possible sur les conditions à remplir pour bénéficier d'une aide à l'embauche d'un assistant. La ministre souhaitait contraindre cette aide aux seuls médecins exerçant en cabinet de groupe et s'inscrivant dans un exercice coordonné. Le directeur de la CNAM Nicolas Revel a intégré ce matin une nouvelle notion de « dérogation à déterminer pour les médecins exerçant dans les zones sous-denses ».
Les médecins prônent depuis le début une aide accessible à tous les médecins. « Qui a le plus besoin d'un assistant aujourd'hui ? Ce sont les médecins isolés », affirme le Dr Philippe Vermesch président du SML. Le SML et la FMF regrettent par ailleurs que les médecins en secteur 2 hors OPTAM soient exclus du dispositif. « Je suis un peu surpris de voir, vu l'état démographique dans lequel nous sommes, qu'on se passe des médecins du secteur 2 », a réagi le président de la FMF Dr Jean-Paul Hamon.
Dégressivité du financement
La dégressivité de l'aide financière privilégiée par la ministre sera aussi un des éléments de débat les plus contestés lors des réunions à venir. Petite nuance apportée par l'Assurance maladie, celle-ci est bien envisagée comme dégressive « sans pour autant conduire à un autofinancement intégral du dispositif ». « Les généralistes ont fait remonter au syndicat que si le financement est dégressif et si la condition est de travailler plus pour avoir un assistant médical, ils ne s'y engageront pas », martèle le patron de MG France Dr Jacques Battistoni.
La ministre de la santé, dans sa lettre de cadrage, souhaitait imposer la condition d'accroître la file active de patients en échange de l'aide financière. La CNAM propose aussi d'intégrer un indicateur d'augmentation de la patientèle médecin traitant. Là encore les syndicats sont vigilants. « Alors que tout le monde parle de qualité des soins il est difficile de demander aux médecins de prendre en charge toujours plus de patients », constate le Dr Vermesch. « Il va falloir faire preuve de plus de souplesse sur ce point », ajoute le Dr Ortiz.
Pour le Dr Jean-Paul Hamon, cette contrainte n'est pas raisonnable : « Demander d'augmenter notre productivité ? Je ne vois pas comment. Les généralistes sont déjà au taquet de leur patientèle médecin traitant. Même en Ile-de-France 50 % du territoire est en zone prioritaire », affirme le généraliste. Le président de ReAGJIR (jeunes médecins et remplaçants) Dr Yannick Schmitt estime que cette condition doit être précisée « Si on se base seulement sur les déclarations de médecin traitant, cela ne prend pas en compte les caractéristiques de la patientèle (personnes âgées, ALD…) ni les patients hors patientèle qui viennent consulter qui sont de plus en plus nombreux ».
Désaccord sur le profil des candidats
La définition du profil et de la rémunération des futurs assistants médicaux sera l'objet d'une prochaine séance de négociations le 20 février. Là encore, la vision des syndicats n'est pas celle de l'Assurance maladie. « Une modification règlementaire est en cours pour étendre le champ d'intervention des aides-soignants au millieu ambulatoire » affirme la CNAM. Les représentants de médecins plaident plutôt pour un profil plus administratif et militent plutôt pour former les secrétaires médicales qui le souhaitent. « Pour aller vite il faut s'appuyer sur ce qui existe déjà. Pourquoi pas leur proposer une formation en alternance pour être opérationnel tout de suite », demande le président du SML.
Aucune enveloppe financière n'a été avancée ce matin. Les syndicats planchent sur un montant annuel « d'au moins 40 000 euros » versés directement au professionnel qui souhaite bénéficier d'un assistant. Cette aide pourrait faire partie intégrante du forfait structure. À l’issue de cette première réunion, le doute quant à la signature d'un accord d'ici le mois d'avril s'installe tant les visions des participants à la négo sont différentes. À ce stade, la perspective d'un accord signé avant avril est difficile à envisager. L'Assurance maladie est-elle prête à lâcher du lest (et de l'argent ?), pour que les médecins s'engagent dans ce dispositif ? La prochaine réunion aura lieu le jeudi 7 février et sera consacrée aux conditions d'éligibilité des médecins et aux contreparties attendues.
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