Alea jacta est. Après près de quatre mois de négociation d’un avenant sur les assistants médicaux, les partenaires conventionnels avaient rendez-vous une ultime fois jeudi soir au siège de l’Assurance maladie. Censée se conclure mi-avril, la négo avait finalement été prolongée.
Lors de cette dernière réunion, la Cnam a présenté aux syndicats de médecins libéraux un dernier projet d’avenant intégrant les modifications actées mi-avril. La caisse avait alors accepté de financer un poste assistant pour un médecin dans les zones sous-denses, ce que réclamaient de longue date les syndicats.
Derniers points de blocages majeurs
La caisse fixe les gains de productivité attendus des médecins bénéficiant de ce modèle de financement dans ce document, dont Le Généraliste a eu copie. Estimant que ceux-ci étaient trop importants, les syndicats ont obtenu une légère modification (voir notre infographie).
Le conditionnement de l’attribution d’une aide financière au recrutement d’un assistant à la participation à une communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS), principal point de blocage selon les syndicats, reste toujours d’actualité, même si la caisse doit réécrire ce passage. La condition serait de participer aux missions d’accès aux soins des CPTS ou d’une autre organisation territoriale.
Bien que portant essentiellement sur le financement des assistants médicaux, cet avenant prévoit d’apporter quelques modifications à la convention médicale. Parmi celles-ci : l’intégration d’un indicateur relatif à l’exercice coordonné dans le forfait structure et la valorisation des soins non programmés. Sur ce dernier point, la profession espérait plus que les 490 euros annuels initialement proposés par la caisse. Jeudi, les syndicats ont demandé à l'Assurance maladie que les soins non programmés soient gérés par des organisations territoriales en lien avec le centre 15 et de revaloriser de 15 euros les actes de soins non programmés régulés. Ce qu’a fermement rejeté la Cnam. Celle-ci propose de valoriser cette mission 150 points dans le forfait structure (soit 1 050 euros par an).
Jusqu’au 15 juin pour signer
À l’issue de la séance, le directeur général de l'Assurance maladie s’est montré plutôt optimiste. « Je n’ai pas senti de points de désaccords majeurs », a assuré Nicolas Revel, même s’il concède que tous les points n’ont pas pu être réglés. « Je pense – j’espère – qu’il y a une conscience claire de l’enjeu. Au-delà des assistants médicaux et des CPTS, c’est la capacité de la médecine de ville à répondre aux attentes très fortes sur les questions de l’accès aux soins et de la coordination territoriale qui se joue », a confié le patron de la Cnam.
Désormais, les syndicats vont soumettre à leurs instances le texte définitif qui leur sera adressé dans le courant de la semaine prochaine par la Cnam. Nicolas Revel, a demandé aux organisations de médecins de statuer sur la signature avant le 15 juin.
Entrée en vigueur en septembre en cas de signature
De leur côté, les syndicats se montrent prudents quant à la signature de cet avenant. « Le principal défaut de ce texte est sa lisibilité, remarque le Dr Jacques Battistoni, président de MG France. En cas de signature, il va falloir faire tout un travail d’explications aux médecins. » Son syndicat prendra sa décision le 2 juin, lors de l’assemblée générale qui clôturera son congrès.
Le président des Généralistes-CSMF, le Dr Luc Duquesnel se félicite que la Cnam ait finalement accepté de financer un assistant pour un médecin dans les déserts et qu’elle accepte de reformuler l’obligation de participer à une CPTS pour toucher un financement. En revanche, il estime que les attentes en termes de gain d’activité sont trop élevées. « Ces objectifs peuvent être un frein rédhibitoire, souligne-t-il. Les médecins vont réfléchir plus d’une fois avant de se lancer dans le dispositif ». Surtout, le Dr Duquesnel juge que le dispositif va de fait s’adresser en priorité aux médecins à forte activité et aux horaires les plus denses, excluant les jeunes confrères qui sont selon lui nombreux à favoriser un exercice à temps partiel. Le Dr Yannick Schmitt, président de Reagjir (qui a assisté en tant qu'observateur à la négociation) se dit, lui, « assez dubitatif » car « les conditions du dispositif sont trop complexes » et car les contreparties sont trop élevées. « Trois quarts des jeunes médecins ne se voient pas recruter un assistant », affirme-t-il.
Le Dr Jean-Paul Hamon, président de la FMF, n’est quant à lui pas convaincu par la concession de la caisse sur l’obligation de participation à une CPTS : « Même s’il s’est montré rassurant à l’oral, cela devrait rester dans le texte ». Le généraliste clamartois regrette également la fermeté de Nicolas Revel sur la valorisation des soins non programmés. « Il y a des limites à la forfaitisation ! », s’exclame-t-il.
Enfin, le SML rappelle que « les assistants médicaux sont nécessaires » et souligne être « très favorable » à la création de ces postes. « Mais l’Assurance maladie n’a pas pris la mesure de ce sujet, ce qui a brouillé le message. Elle a joué sur tous les tableaux en y mêlant le sujet de la coordination et des CPTS », juge le syndicat présidé par le Dr Philippe Vermesch.
Si l’avenant était signé par les syndicats, l’accord conventionnel pourrait entrer en vigueur dès la rentrée de septembre, a indiqué Nicolas Revel. Le gouvernement table sur la création d'au moins 4 000 postes d'assistants d'ici à 2022.
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