Curieuse destinée que celle de l’enquête initiée par l’Unof, MG France et la FMF. Courant décembre, à la veille de l’adoption de la loi de santé par les parlementaires, les trois syndicats se sont réunis avec un objectif : relancer la mobilisation des généralistes. Qui plus est selon les attentes des médecins, sur le terrain. Luc Duquesnel, Claude Leicher et Jean-Paul Hamon ont ainsi adressé un questionnaire, par mail, à leurs adhérents afin de connaître les mots d’ordre susceptibles de répondre à leurs préoccupations.
Alors que la nouvelle année, synonyme de rentrée syndicale, vient de commencer et que les quelque 5 000 questionnaires reçus ont été dépouillés et analysés, aucune action commune ne semble pour l'heure être à l’ordre du jour.
5 000 généralistes remontés
Ils sont très exactement 4 984 généralistes à avoir répondu à la sollicitation des trois organisations. Et force est de constater que les médecins, sondage après sondage, restent sur le qui-vive. En effet, selon cette enquête, ils sont plus de la moitié à éprouver une forte envie de se mobiliser actuellement, tandis qu’un tiers qualifie encore cette envie de « moyenne », seul un généraliste sur dix la considérant comme « faible ».
Action tarifaire, non-application du tiers payant et grève administrative : ces trois mots d’ordre sont partagés par plus de la moitié de la profession. Mais difficile de se faire une idée précise sur la réelle capacité de mobilisation de la profession. Car, quand les mots d’ordre se font plus précis, l’adhésion semble augmenter. Ainsi, la « désobéissance civile » à l’égard de la dispense d’avance de frais totalise 80% d’intentions de participation. Et près de huit praticiens sur dix se montrent disposés à passer au C à
25 euros quand la proposition d’appliquer systématiquement un C à 28 euros séduit un peu plus de la moitié des répondants.
Mobilisations convergentes mais pas communes
Ces résultats confortent chacun des syndicats… Mais sans qu’une action commune ne soit annoncée, les uns et les autres communicant tour à tour chacun dans leur coin. « On a retrouvé la position de MG France », assure Claude Leicher qui a ravivé auprès de ses troupes la consigne du C à 25 euros, déjà lancée au printemps dernier. Quelques jours plus tard, l'Unof a appelé les généralistes non seulement à pratiquer le C à 25 euros mais également à refuser d’appliquer le tiers payant généralisé et à continuer la grève administrative. Autant d’actions impulsées en 2015. Un programme qui, selon Luc Duquesnel, n’empêche pas d’ « envisager d’autres actions tarifaires » car l’objectif de la CSMF est, rappelle-t-il, d’établir la « consultation de base (…) à 30 euros pour l’ensemble des spécialités médicales ». À la FMF, Jean-Paul Hamon confie qu’il y a eu « un vrai débat sur les appels à augmenter la consultation. Les généralistes (de la FMF) ne veulent pas uniquement un mouvement sur le C à 25 euros », poursuit-il, concédant que faire « un mouvement plus élevé, c’est faire au minimum 30 ou 40 euros, comme la moyenne européenne et, là, c’est un peu plus complexe à faire ».
Contrairement à ses confrères de MG France et de l’Unof, lui n’a pas encore donné de consigne à ses troupes. Question de timing apparemment, car le généraliste de Clamart prévient toutefois que « les vacances ne vont pas durer éternellement » et qu’il va
« donner un mot d’ordre avec une totale liberté d’action ». Et il n’oublie pas de souligner que, d’après le sondage, « 33% des médecins parlent de déconventionnement », sans compter les « 22% qui y pensent ». Quant à Éric Henry, il juge que « le calendrier n'est pas bon, les motivations sont légitimes mais à contretemps ». Le SML n'a donc pas lancé de mouvement... Mais n'exclut pas de le faire, à l'issue de la « grande conférence de santé » de Manuel Valls du mois prochain.
Du grain à moudre pour les négos
Un peu dispersés côté mobilisation, les syndicats semblent davantage unis côté négociation. Car si l’année commence par de nouvelles actions des médecins, sur le terrain, elle compte également au programme l’ouverture des discussions autour de la future convention, avec des premières directives posées par la ministre. Un texte vivement attendu, s’agissant notamment de son chapitre dédié aux modalités et montants de rémunération. Et sur la rédaction duquel les syndicats entendent peser. Les représentants de la CSMF, du SML, de la FMF, de MG France et du Bloc se sont ainsi réunis, peu avant la trêve des confiseurs, pour passer en revue leurs points communs de revendication.
Redonner du temps médical aux médecins, leur permettre d'engager un secrétariat, établir de nouvelles relations avec les caisses, améliorer la protection sociale des praticiens, garantir l’ASV… La sémantique diffère parfois d’une organisation à l’autre – certaines parlant, par exemple, de « forfait structure » quand d’autres s’abstiennent d’utiliser une telle formule tout en défendant une proposition sensiblement identique sur le fond –, ce qui n’empêche pas les syndicats de partager d’ores et déjà un certain nombre de propositions.
Unis pour le boycott de la Conférence Valls
Lors de leur première rencontre, mi-décembre, les responsables syndicaux ont abordé « les dix chapitres dont on souhaiterait parler dans les prochaines négociations », rapporte Claude Leicher. Un travail à dix mains car « on sera beaucoup plus forts unis », garantit Luc Duquesnel. Aux yeux d’Éric Henry, le chef de file du SML, la rencontre s’est révélée « très ouverte, chacun exposant ses positions, ses envies de faire ». Allant jusqu’à évoquer l’avènement « d’une nouvelle relation syndicale », Jean-Paul Hamon juge que cette réunion « était très intéressante et constructive, tout le monde s’est écouté ». Quelques autres réunions de travail sont prévues d’ici au 11 février, date à laquelle les syndicats présenteront leur plateforme commune de revendications, en marge de la « grande conférence nationale de santé ».
Tous ont en effet décidé de boycotter le rendez-vous instigué par le gouvernement, autre signe d’unité illustrant la détermination collective dont ils entendent faire preuve face à l’Assurance maladie.
« Ce que fait le député Garot, c’est du sabotage ! » : la nouvelle présidente de Médecins pour demain à l’offensive
Jusqu’à quatre fois plus d’antibiotiques prescrits quand le patient est demandeur
Face au casse-tête des déplacements, les médecins franciliens s’adaptent
« Des endroits où on n’intervient plus » : l’alerte de SOS Médecins à la veille de la mobilisation contre les violences