C'est parti ! La commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale entame ce mardi soir l’examen du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) 2024. Un marathon de trois jours, durant lesquels les oppositions vont proposer de nombreux ajouts et ajustements, avant l'examen du texte en séance publique. Florilège.
La régulation de l’installation repointe son nez
Dans un amendement porté par quelques députés LR dont Fabrice Brun et Véronique Louwagie, un dispositif de régulation de l’installation des médecins (généralistes comme spécialistes) et des chirurgiens-dentistes est à nouveau proposé. L’autorisation d’installation serait délivrée par l’ARS : sans condition dans les zones sous-denses ; dans les autres endroits, uniquement si elle fait suite à la cessation d’activité d’un praticien de la même spécialité. Cet amendement est aussi défendu par des députés socialistes dont Jérôme Guedj, qui reprennent l’une des propositions du groupe transpartisan mené par Guillaume Garot.
Sanctionner les patients qui posent des lapins !
Le Pr Philippe Juvin (et les élus LR) veulent réduire les rendez-vous non honorés. Un amendement prévoit « les modalités et les conditions d’indemnisation du médecin au titre d’un rendez-vous non honoré par l’assuré social et les conditions dans lesquelles les sommes ainsi versées sont mises à la charge de ce dernier ». Le RN fait la même proposition, précisant qu’il s’inspire du code de déontologie belge. Un autre LR, Emmanuel Maquet, a écrit un autre amendement sur le même sujet, qui, lui, « insère un nouvel article dans le code de la santé publique, autorisant les médecins à prendre l'empreinte bancaire des patients au moment de la réservation du rendez-vous, dans le but de procéder à leur indemnisation en cas d'annulation tardive ou de rendez-vous non honoré. » Cette indemnisation n’est toutefois pas un honoraire, précise-t-il.
Sus au porno
Le RN, notamment la Dr Joëlle Mélin, a écrit un amendement d’appel permettant de mettre sur la table le sujet du porno. Elle veut taxer l’industrie pornographique via un prélèvement spécifique et fléché vers la Cnam « afin de donner les moyens aux professionnels de santé qui devront faire face aux atteintes du développement normal de l’enfant (suite à une exposition à des images pornographiques) ». En pratique, 0,5 % du bénéfice global d’une année fiscale des plateformes en ligne au contenu pornographique serait alloué à l’Assurance maladie.
Des mesures plus dures en cas de fraude des soignants ?
Les députés socialistes, dont Jérôme Guedj, veulent aller plus loin que le gouvernement sur la fraude en rendant automatique l’annulation par l’Assurance-maladie des cotisations sociales prises en charge au bénéfice du professionnel reconnu coupable. Dans un second amendement, les socialistes visent à récupérer l’ensemble des cotisations sociales prises en charge par la Sécu. Un dernier amendement prévoit d'« appliquer une pénalité financière pour le professionnel de santé reconnu coupable de faits à caractère frauduleux ». À noter : le généraliste et député Pierre-André Colombani (Liot) demande à supprimer l’article visant à pénaliser les soignants.
Une volonté de contourner le système conventionnel ?
Le PLFSS marque-t-il la tentation du gouvernement de se substituer au dialogue conventionnel ? L'article 22 prévoit en tout cas d'inscrire dans le droit commun des expérimentations article 51 sur les parcours coordonnés renforcés. Or, des montants forfaitaires de rémunération seraient fixés par arrêté. Pour plusieurs députés LR, il s'agit d'un contournement d’un système conventionnel, d'où des amendements de suppression. D'autres élus de la majorité comme Jean-Carles Grelier (Sarthe) proposent de « mieux coordonner les différents acteurs autour de ces parcours et de renforcer les équilibres locaux de chaque filière d’offre de soins régionale ».
Cystite, angine : prudence sur la délivrance directe d'antibios
Le PLFSS entérine la délivrance d’antibiotiques contre les cystites aiguës simples et les angines par les pharmaciens sans passer par la case médecin, après avoir réalisé un test rapide d'orientation diagnostique (Trod). Cet élargissement de compétences des officinaux, mal perçu par les syndicats de médecins, fait aussi tiquer l'opposition. Des élus LR ou LIOT (Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires) refusent que cette mesure de prétendue simplification soit systématisée. Elle ne devrait s'appliquer qu'en « l’absence de médecin traitant ou de médecin régulateur », capables d’accompagner le patient et ce, afin « de limiter la systématisation de cette mesure à l’avenir et les possibles erreurs pouvant potentiellement menacer la santé des patients ».
Des rendez-vous de prévention réalisés par des kinés ?
C’est un amendement rédigé par des élus LR : inclure « pleinement et explicitement les kinésithérapeutes dans les rendez-vous de prévention, les consultations de prévention et les séances d’information, d’éducation pour la santé, de promotion de la santé et de prévention prévus pour les adultes aux âges clés de la vie », écrivent-ils dans l’exposé des motifs. Leur contribution sera majeure pour prévenir le développement des troubles musculosquelettiques, précisent-ils.
D’autres députés veulent ouvrir les rendez-vous de prévention à d’autres professions comme la médecine scolaire, la PMI et la médecine du travail. Les LR veulent élargir l’âge de ces rendez-vous de prévention aux moins de 18 ans. Consensus autour d’une inclusion de la santé mentale dans ces rendez-vous et sur le renvoi des tarifs aux négociations conventionnelles.
Réforme de la T2A : séances de dialyse au forfait ?
Le gouvernement veut diversifier les modalités de financement des activités hospitalières MCO en réduisant la T2A tout en accroissant les dotations sur des missions spécifiques, la part populationnelle et à la qualité. Plusieurs amendements issus des députés de la majorité et des centristes proposent en ce sens d'exclure les séances de dialyse du financement à l'activité. Selon les élus, malgré la diminution des tarifs des séances de dialyse en centre ou en unité de dialyse médicalisée, « les structures privées de dialyse à caractère lucratif conservent des marges bénéficiaires très élevées ».
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