Un rapport propose une recertification « light » des médecins tous les 6 ans dès 2021

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Publié le 05/11/2018
Agnès Buzyn

Agnès Buzyn
Crédit photo : Stéphane Lancelot

Le comité de pilotage chargé par Agnès Buzyn et Frédérique Vidal de formuler des propositions en vue de l’instauration d’une recertification périodique des médecins a rendu publiques ses conclusions, ce lundi. Pour la ministre de la Santé, la mise en place d'un tel dispositif est devenue une nécessité « pour que les médecins puissent exercer sereinement leur métier ». « Une recertification traduit de manière concrète le besoin de cimenter à intervalle régulier le lien de confiance sans lequel l’acte médical perd son sens », a-t-elle expliqué.

Le groupe de travail présidé par le Pr Serge Uzan, doyen honoraire de la faculté de médecine Sorbonne Université, suggère l'instauration d'un dispositif obligatoire de « certification et de valorisation » tous les six ans pour les médecins diplômés à partir de 2021, dans son rapport aux ministres de la Santé et de l’Enseignement supérieur, dont Le Généraliste a eu copie.

Réclamée par l’Ordre et encouragée par le gouvernement de Manuel Valls lors de la grande conférence de santé en 2016, l’idée d'une recertification des praticiens a fait son chemin, jusqu’à faire consensus dans la profession. Les 13 syndicats représentatifs consultés par le comité de pilotage ont ainsi reconnu « le bien-fondé et la nécessité de cette mesure » qui doit permettre aux praticiens d’exercer une médecine de qualité. « Les médecins sont demandeurs de cette démarche qui traduit leur idéal déontologique et ne peut que renforcer la confiance que leur portent les patients », souligne en préambule le rapport du Pr Uzan.

Les syndicats avaient toutefois posé quelques conditions et le processus préconisé par le comité de pilotage, après onze réunions de concertation, se révèle au final assez peu contraignant pour les médecins. « Les pistes de recertification que vous avez dégagées sont extrêmement riches, a déclaré lundi Agnès Buzyn. Elles permettent d’envisager en France ce qui se fait déjà dans de nombreux pays, et je me réjouis donc de voir la France rejoindre ce groupe. »

Un dispositif facultatif pour les médecins déjà en exercice

En effet, les praticiens ayant obtenu leur diplôme avant 2021 n’auront aucune obligation de passer par la recertification. Le dispositif ne sera impératif que pour les médecins titulaires des nouveaux diplômes d'études spécialisées (DES). Et ce, même si le rapport souligne dans son étude des dispositifs à l’étranger, qu’une « procédure simplement volontaire conduit à une faible mobilisation, souvent inférieure à 30 % ». Tous les médecins inscrits à l’Ordre seront fortement encouragés à s’engager dans cette démarche, précise néanmoins le rapport.

Une certification quasi-automatique

La certification et valorisation périodique devra se faire tous les six ans, durée correspondant à deux périodes triennales de DPC. « On estime que tous les cinq à six ans, 50 % des connaissances d’un médecin ont évolué, a souligné la ministre de la Santé lors de la remise du rapport. Dès lors, la confiance n’exclut pas le contrôle. »

Le rapport préconise de ne pas mettre en place un modèle « unique, rigide et obligatoire » de certification. Les médecins n’auront ainsi pas à passer de nouvel examen. La procédure sera ainsi intégralement dématérialisée. Le rapport du comité de pilotage suggère en outre d’adopter un système « largement fondé sur l’autoévaluation », afin que celui-ci soit efficace.

Pour être recertifié, un praticien devra se former tout au long de sa carrière (actions de DPC, FMC, DU, participation à des congrès, activités de recherche et de formation…). Le comité de pilotage estime possible de parvenir à l’objectif de 15 à 30 jours de formation par an (sous toutes ses formes). Les médecins devront maintenir une activité régulière (trois à quatre demi-journées hebdomadaires minimum) et s’engager dans des démarches d’amélioration de la relation médecin-patient et de sa qualité de vie et de santé. L’absence de signaux négatifs (condamnation, interdiction d’exercer, insuffisance professionnelle…) sera également nécessaire.

Toutes ces informations figureront dans un espace personnel numérique. Les médecins devront consacrer moins de 3 heures par an pour la collecte des données. Cet espace personnel doit « permettre d’obtenir très simplement et rapidement une certification ». « Le processus aboutira, pour plus de 90 à 95 % des médecins, à une certification quasi-automatique enregistrée au CNOM », estime le comité de pilotage.

Des alertes doivent permettre à un médecin ne remplissant pas toutes les conditions de la certification de rectifier le tir.

Les CNP gardent la main

Les conseils nationaux professionnels (CNP) et le Collège de la médecine générale resteront les garants de la qualification et de la compétence dans chacune de leur spécialité. La commission présidée par le Pr Serge Uzan recommande la création d'un Conseil national de Certification et de Valorisation (CNCV) qui sera responsable de l'aspect technique du processus. Elle pourrait lancer dès 2019 les premières expérimentations.

Enfin, le Copil enjoint les ministres de la Santé et de l'Enseignement supérieur à consacrer des moyens financiers suffisants. « Sinon il restera deux solutions : qualité médiocre ou contrôle partiel aléatoire tout aussi démotivant », avertit le comité.

Agnès Buzyn a indiqué qu'elle prendrait prochainement, avec Frédérique Vidal, des initiatives pour organiser la phase de mise en œuvre et de traduction opérationnelle des recommandations du groupe de travail.


Source : lequotidiendumedecin.fr