C’est ce qui s’appelle avoir le nez creux. Dès le lendemain de la série d’annonces surprises du Premier ministre destinées à améliorer l’accès aux soins – qui n’en finit pas d’agiter les médecins libéraux et leurs représentants syndicaux -, l’Union régionale des professionnels de santé (URPS) médecins libéraux d’Île-de-France a dégainé, ce lundi, les résultats de son enquête Flash qui porte précisément sur l’une de ces mesures : la fameuse « taxe lapin ». Près de 2 000 médecins de ville, soit 10 % de la population médicale libérale francilienne, ont répondu au questionnaire qui leur a été soumis entre le 12 et le 16 février. Dans le détail, les répondants se composent à 43 % de généralistes et à 57 % de spécialistes. 52 % exercent en secteur 1 ; 14 % en secteur 2 avec Option de pratique tarifaire maîtrisée (Optam) ; et 33 % sont en secteur 2.
Un à quatre rendez-vous non honorés tous les jours
Premier enseignement, près de neuf praticiens sur dix (89 %) sont favorables à la mise en place « d’un dispositif de responsabilisation financière des patients qui n’honorent pas leurs rendez-vous ». Une prise de position somme toute assez logique, puisque les médecins répondants déclarent subir un à quatre « lapins » par jour. À noter que parmi ces derniers, 84 % sont utilisateurs d’une plateforme de prise de RDV en ligne et 62 % ont déjà « mis en place un système de filtrage des patients qui n’ont pas honoré leurs RDV ».
Pour autant, les avis des docteurs d’Île-de-France sont plus partagés sur la forme que devraient prendre les modalités de ces sanctions pécuniaires. Si une petite majorité d’entre eux (53 %) se prononce pour la formule « empreinte bancaire et prépaiement », ils sont 23 % à lui préférer une déclaration du rendez-vous non honoré à la caisse primaire d’assurance-maladie. À charge pour cette dernière de retenir un montant de pénalité « sur le prochain remboursement du patient ». L’URPS francilienne souhaite quant à elle aller plus loin et rajoute la piste « du dépassement exceptionnel à la consultation suivante », dont le montant, (comme dans l’hypothèse de l’empreinte de la carte bancaire), serait laissé au libre choix du médecin.
Sur cette question d’un montant décidé par les praticiens, Gabriel Attal en a manifestement décidé autrement. Les assurés qui n'honorent pas leur rendez-vous médical (sans avoir prévenu au moins 24 heures à l'avance) devront s’acquitter de cinq euros de sanction qui seront directement versés au médecin. En revanche, ce dernier conserve le libre choix d'appliquer ou non la pénalité financière. Reste cependant à en préciser les modalités techniques. Prévue pour une entrée en vigueur en janvier 2025, cette mesure, qui elle aussi laisse circonspects les syndicats de médecins libéraux, doit cependant encore faire l’objet d’un texte législatif ad hoc.
Enquête Flash menée entre le 12 et le 16 février 2024 auprès des 20 000 médecins libéraux d’Île-de-France, ayant obtenu 2 000 réponses. Les répondants sont représentatifs des médecins libéraux franciliens
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