Alors que l’examen du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS 2025) a repris depuis lundi à l’Assemblée nationale, les députés des groupes Socialistes et apparentés et de La France insoumise (LFI) sont parvenus en commission à supprimer l’article 3 Quater A bénéficiant aux médecins en cumul, contre l’avis du nouveau rapporteur général du texte, Thibault Bazin (Droite Républicaine). Cet article, qui avait été adopté en novembre par le Sénat et soutenu par le précédent gouvernement Barnier, prévoyait une exonération de cotisations d’assurance-vieillesse pour les médecins en cumul emploi/retraite souhaitant continuer à exercer en désert médical (sous réserve que leur revenu non salarié soit inférieur à un montant fixé par décret).
L’examen de cet article a donné lieu à une offensive organisée du groupe socialiste, qui a dénoncé son inefficacité supposée. La députée Sandrine Runel (PS, Rhône) a ainsi justifié cet amendement de suppression en expliquant d’abord que cette exonération de cotisations retraite instaurée de manière temporaire pour 2023 avait eu l’effet inverse à celui recherché. « Il y a eu moins de médecins retraités actifs en 2023 qu’en 2022 », a-t-elle affirmé (le taux de praticiens en retraite active parmi l’ensemble des médecins retraités étant passé de 19,7 % à 19,5 %). De surcroît, insiste-t-elle, « cet article creuserait mécaniquement le déficit de la branche maladie, en se privant de précieuses cotisations sociales ».
Défendant un amendement similaire de suppression du groupe écolologiste et social, le député Hendrik Davi (Bouches-du-Rhône) a pointé du doigt les contradictions du gouvernement, puisque cette exonération de cotisations impacte directement les comptes de l’assurance retraite. « On ne peut pas dire, d’un côté, qu’on n’a pas d’argent pour abroger la réforme des retraites et, au détour d’un amendement, prévoir des exonérations », s’est-il agacé. Ce qui semble le gêner le plus est que cette incitation bénéficierait aux seuls médecins à la retraite et « non pas d’autres catégories de salariés ». « Les médecins retraités ont des revenus suffisants et peuvent parfaitement payer ces cotisations », a-t-il évacué.
Un effet d’aubaine ?
La députée Karen Erodi (LFI, Tarn) n’a pas mâché ses mots en présentant l’amendement de suppression de son groupe, là encore similaire. Elle a exhorté le gouvernement Bayrou à faire barrage à ces mesures d’incitation socio-fiscale, « une impasse » à ses yeux pour résoudre les questions de pénurie médicale. Elle a cité une étude de la Drees (ministère) ayant démontré que de telles exonérations de cotisations « ont un effet d’aubaine pour les médecins en zone urbaine et ne sont pas utiles à la désertification médicale ». « Plutôt que de repousser nos aînés à travailler jusqu’à 75 ans, attardons-nous sur de vraies solutions », a martelé la députée, citant l’ouverture de places dans les universités, la régulation de l’installation (en adoptant la proposition de loi transpartisane sur l’accès aux soins) ou encore la régularisation « urgente » des praticiens à diplôme hors Union européenne (Padhue).
Face à cette offensive de la gauche, le rapporteur général du budget de la Sécurité sociale, Thibault Bazin (Meurthe-et-Moselle, DR), a ménagé la chèvre et le chou. Il a reconnu que cette exonération de cotisation retraite pourrait entraîner « un déséquilibre financier de la Carmf (Caisse autonome de retraite des médecins de France) qui est aujourd’hui dans une équation démographique compliquée ». Mais, « en même temps, il y a des médecins retraités qui souhaitent reprendre une activité » (et ne veulent pas cotiser sans droits), a-t-il ajouté.
Sur ce fil délicat, Thibault Bazin a invité les députés à travailler « d’ici à la séance publique » à partir du 3 février à « un dispositif incitatif et équilibré ». En attendant, les amendements de suppression de la gauche ont été adoptés, supprimant l’exonération de cotisations retraite pour les médecins « cumulards ».
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