Tarifs en berne, activité chronophage : au fil des ans et des conventions, le nombre de visites classiques à domicile n'a cessé de s'éroder. Depuis 2017, la visite longue et complexe (VL) monte en puissance mais ses modalités restent très (trop ?) encadrées.
Alors qu'il y a 20 ans, les visites à domicile représentaient un quart à un tiers de l'activité clinique d'un médecin généraliste, leur nombre n'a cessé de décliner depuis 2002, à la faveur notamment d'un accord conventionnel qui visait à réduire significativement le nombre de visites inutiles (au profit de revalorisations tarifaires).
Les visites de « confort » ont disparu mais la chute a été brutale. En 2010, les visites ne représentaient plus que 12 % de l'activité d'un médecin de famille. Et sur le mois de novembre 2019, la CNAM ne comptabilisait plus que 1,5 million de visites facturées – à comparer encore avec les 2,5 millions de novembre 2016… Le tarif, épousant celui de la consultation, est passé de 30 euros en 2002, à 33 euros en 2011 puis à 35 euros en 2017 (avec 10 euros de déplacement). Pas de quoi inciter aux déplacements...
VL, extension à petits pas
Cette raréfaction des visites classiques a été très partiellement compensée par l'essor de la visite longue, introduite pour la première fois en 2012 au tarif de 56 euros (dont 10 euros de majoration de déplacement), en présence des aidants naturels et une seule fois par an pour les patients atteints de maladie neurodégénérative.
Ce cadre a été légèrement assoupli et valorisé en novembre 2017, au tarif de 70 euros (dont 10 euros de déplacement), trois fois par an et avec la suppression de la notion de présence des aidants obligatoires. En février 2019, l'avenant 6 a étendu cette VL aux soins palliatifs et aux nouveaux médecins traitants pour les patients ne pouvant se déplacer – en ALD ou de plus de 80 ans. Ces améliorations successives ont permis une montée en charge de la visite longue, de 5 000 VL par mois fin 2016/début 2017 à plus 35 000 début 2020 (avant le confinement).
Deux options majeures, des moyens limités
En négocation, l'avenant 9 pourrait marquer une étape clé. Lors de la séance de négociations sur ce sujet, la CNAM a mis sur la table plusieurs pistes concrètes, pas forcément cumulables dans le cadre d'un budget contraint, ce qui fait craindre aux syndicats un « saupoudrage ».
L'extension du périmètre de la VL fait partie des scénarios les plus sérieux. La visite longue pourrait s'appliquer aux sorties d'hospitalisation pour les patients de plus de 75 ans – environ 700 000 par an – pour un coût de 25 millions d'euros. Autre option : son élargissement dans le cadre du maintien à domicile des patients de plus de 85 ans en ALD trois fois par an (82 millions d'euros) ou même à ceux de plus de 75 ans en ALD et toujours trois fois par an (140 millions).
L'autre proposition sur la table consisterait à revaloriser de 10 euros la majoration de déplacement (MD) qui, selon les hypothèses, serait donc tarifée à 20 euros pour les patients en ALD (135 millions d'euros de coût pour 13,5 millions de visites concernées), les personnes âgées de plus de 85 ans (82 millions d'euros) ou les personnes de plus de 85 ans en ALD (68 millions d'euros). Une ouverture de la visite longue (ainsi que la majoration de déplacement) aux gériatres non-médecins traitants est également envisagée, pour un coût de 500 000 euros.
Mais pour les syndicats de médecins libéraux, ces propositions restent très insuffisantes à l'heure du virage ambulatoire revendiqué. Tous demandent une extension de la visite longue à une large palette de situations, sans limitation à trois par an, arguant que les visites courtes ou de confort n'existent plus… MG France plaide depuis longtemps pour une extension de la VL à toutes les visites du médecin traitant pour des patients dépendants. Les Généralistes-CSMF comme la FMF souhaitent une VL ouverte à tous les déplacements, soulignant leur caractère chronophage. Au SML, on vise au minimum les patients de plus de 70 ans en ALD ou qui ne peuvent pas se déplacer.
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