La date n'a pas été choisie au hasard. À la veille de la présentation du bilan, un an après sa mise en place, de l'Agence nationale du développement professionnel continu (ANDPC), quatre syndicats de médecins libéraux ont étrillé le dispositif. Dans un communiqué commun, la CSMF, la FMF, MG France et le SML dénoncent « la dégradation régulière » de leur capacité de DPC depuis la disparition de la formation professionnelle continue (FPC) mise en place en 1991.
Sur le fond, ils déplorent « l'étatisation » de la formation continue, sortie du champ conventionnel, et son insuffisance budgétaire. L'enveloppe allouée au DPC des médecins a ainsi été fixée à 83,7 millions pour 2017 (contre 100 millions il y a quelques années). « Sur les 10 millions d'euros de reliquat de 2016 répartis entre les différentes professions de santé, les médecins n'ont disposé que de 28 % de l'enveloppe, ce n'est pas normal », s'insurge le Dr Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF.
Le forfait individuel des praticiens libéraux – dont la limite maximale a été ramenée de 3 700 euros à 2 950 euros par an – permet de financer au mieux 21 heures de formation chaque année. Or, selon les syndicats, « les médecins ont un besoin absolu d’accéder à 40 heures de formation par an, standard européen ». Selon ces organisations, il est indispensable d'adapter le budget de formation « avec une enveloppe dédiée, notamment en utilisant la surtaxe de l’industrie pharmaceutique, initialement fléchée à cet effet » mais qui n'a jamais été affectée au DPC.
Règles trop sévères
Un second sujet cristallise la colère de la profession : la gestion des liens et conflits d'intérêts. Une analyse du comité d'éthique a révélé que trois généralistes titulaires et trois suppléants de la commission scientifique indépendante (CSI) des médecins étaient concernés par des liens d'intérêts les empêchant de siéger. Ces praticiens avaient quitté les instances dirigeantes d'un organisme depuis moins de cinq ans (une limite ramenée à trois ans). Les syndicats dénoncent des règles trop strictes « reflet d’une volonté d’exclure la profession de la gestion de sa propre formation continue » : « C’est incohérent, et désormais inacceptable. »
Depuis quelques semaines, les 12 membres de la section professionnelle médecins de l’ANDPC ont décidé de suspendre leurs travaux. Les quatre syndicats cosignataires réclament un arbitrage à la ministre de la Santé. « Il faut qu'Agnès Buzyn se prononce pour trouver une sortie de crise en assouplissant la réglementation ou en faisant en sorte qu'elle ne soit pas rétroactive », affirme le Dr Jean-Paul Ortiz.
Un dossier prioritaire pour l'agence
Lors d'une conférence de presse, ce jeudi, le président et la directrice de l'agence nationale ont concédé que le bilan du DPC était « contrasté » et ont prôné l'apaisement. Le président Éric Haushalter a assuré que l'agence travaillait sur la question des conflits d'intérêts. « C'est un dossier prioritaire à traiter avant l'été », a-t-il affirmé.
Michèle Lenoir-Salfati ne souhaite pas prendre de décision arbitraire, comme elle l'avait déjà indiqué au « Quotidien ». « Le ministère de la Santé a demandé à l'agence de proposer des solutions pour résoudre la crise, a déclaré ce jeudi la directrice de l'ANDPC. Nous devons évoquer les solutions possibles avec les acteurs, cela prendra un peu de temps. » Quant au sujet du financement, les responsables de l'agence ont estimé qu'il nécessiterait des « ajustements ».
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