Synonyme de mobilité, d’indépendance ou bien sésame pour décrocher un emploi, le permis de conduire constitue un élément essentiel dans la vie de tous les jours. Néanmoins, l’obtenir ou le conserver peut nécessiter le passage devant un médecin agréé du permis de conduire que ce soit pour des raisons règlementaires (visites périodiques ou après certaines infractions) ou pour des motifs médicaux liés à la santé de l’usager.
Bien que ce type d’exercice s’éloigne de la médecine traditionnelle car il n’y a pas de soins à apporter aux patients, il attire des médecins de tous horizons « qui veulent changer leur quotidien et voir des usagers qu’ils ne connaissent pas » explique le Dr Dominique Richter, président du Syndicat des médecins agréés pour le contrôle médical d'aptitude à la conduite (SMACMAC). Outre les généralistes et médecins du travail, majoritaires dans cette spécialité, « nous formons énormément de médecins : des ORL, des ophtalmologues, des neurologues, des dermatologues... » continue-t-il.
Examiner et prévenir
L’enjeu est d’évaluer au cours d’une consultation de vingt minutes les capacités physiques et psychologiques des usagers à prendre le volant. Au cours de l’examen et sur la seule déclaration du patient, « on va s’intéresser à leurs pratiques quotidiennes, leur acuité visuelle, leurs troubles neurologiques éventuels ou encore leurs réflexes », détaille le Dr Richter. À l’issue de la consultation, le patient reçoit un document Cerfa à remettre au préfet de son département, avec l’avis médical (apte/inapte). La décision finale relève de ce dernier seul habilité à valider ou pas le permis de conduire.
Un exercice de la médecine au premier abord administratif et procédural qui procure néanmoins des satisfactions. « On parle à la fois de mobilité, de santé et surtout d’humain, précise Philippe Lauwick, président de l’Automobile-club de France (ACMF). Nous prenons parfois des décisions lourdes de conséquence comme lorsqu’on reçoit une personne âgée qui, sans son permis, peut perdre son autonomie ». Le rôle du médecin du permis de conduire va encore plus loin. « Notre mission n’est pas d’interdire la conduite à un usager, sauf dans des cas particuliers, il y a tout un aspect de prévention et d’insertion » énonce le Dr Lauwick. Cela consiste notamment à repérer les comportements à risque, éviter les récidives ou dépister certaines pathologies entraînant un risque pour les autres usagers sur la route. « C’est notre rôle d’éveiller l’attention des gens en les incitant à la prudence et à consulter un spécialiste si nous constatons un problème comme une baisse de l’acuité visuelle par exemple » complète Dominique Richter.
Agrément nécessaire
Même si le médecin traitant à un rôle à jouer dans le dépistage des affections empêchant la conduite et l’information du patient, seuls les médecins agréés ont la possibilité de donner un avis sur l’aptitude à la conduite. Cet agrément est accordé par le préfet de chaque département à la suite d’une formation spécifique ouverte à tous les praticiens de moins de 75 ans qui ne font pas l’objet de condamnation ordinale sur une période de 5 ans avant l’obtention de l’aptitude.
Durant 9 heures, elle évoque l’ensemble des problématiques de la sécurité routière comme les données épidémiologiques, les connaissances du cadre règlementaire de cette discipline, des outils de repérage des conduites et situations à risques ou encore les aspects administratifs. Valable 5 ans, l’agrément doit être renouvelé par la formation continue afin que les médecins agréés « se tiennent au courant des évolutions à la fois réglementaires et scientifiques » indique Philippe Lauwick.
Manque de personnel
Son aptitude en poche, le médecin peut la faire valider par le préfet. Il peut ainsi choisir entre deux types d’exercice complémentaires, ou faire les deux : exercer au sein des commissions préfectorales ou bien dans son cabinet d’exercice. Dans le dernier cas, les médecins recevront les conducteurs professionnels soumis à l’obligation de visite médicale et les personnes soumises à des pathologies ou handicaps afin d’évaluer leurs capacités d’accès à la conduite. De leur côté, les commissions préfectorales, composées de deux médecins, prennent en charge les conducteurs ayant commis une infraction liée à la consommation d’alcool ou de stupéfiant.
Malgré l’apport financier procuré par ces consultations supplémentaires (*36 € pour une consultation en ville, 25 € par médecin en commission) et la possibilité de changer son quotidien, cette spécialité souffre d’une crise de vocation. Depuis le Covid, les médecins généralistes sont déjà débordés et n’acceptent plus de nouveaux patients, ils n’ont pas le temps de voir d’autres personnes » estime le président du SMACMAC. D’autant plus que l’exercice peut s’avérer difficile face à des patients inconnus car « les médecins n’ont accès ni au fichier national du permis de conduire (malgré les demandes répétitives du SMACMAC) ni aux antécédents de la personne qui les consulte ». Malgré tout, « l’avenir n’est pas sombre sous réserve qu’on se donne les moyens et de mieux rétribuer les médecins » conclut Dominique Richter.
Exergue : Tous les praticiens de moins de 75 ans qui ne font pas l’objet de condamnation ordinale peuvent être agréés
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