LE QUOTIDIEN : Vous entamez une mandature d'un an. Quelle est votre priorité ?
Dr ÉTIENNE FOURQUET : Je vais poursuivre le travail de base avec les institutions, les sociétés savantes et les relations avec la caisse, mais aussi commencer à préparer les élections aux URPS de 2021. Il y a un gros chantier pour les spécialistes, car lors des prochaines élections, le collège plateau technique disparaît, et avec lui notre visibilité. Or, si on analyse les précédentes conventions, tout a été fléché vers les médecins généralistes et les chirurgiens. Le volet spécialiste a été oublié, et notamment l'anesthésie-réanimation, alors que nous sommes une spécialité transversale, au carrefour de plusieurs autres.
Que revendiquez-vous pour les professionnels libéraux ?
Les anesthésistes-réanimateurs veulent plus de reconnaissance pour leur travail, qui a évolué depuis que la nomenclature (CCAM) a été mise en place. Notre charge de travail et le nombre de patients ont augmenté, nous atteignons des limites. La CCAM technique est devenue pour l'assurance-maladie un moyen de régulation de nos revenus, qui sont souvent en haut de l'échelle. La valeur de notre acte de base (anesthésie générale ou locorégionale, 48 euros) est désormais inférieure à une consultation de spécialiste ou à la consultation créée pour les généralistes pour le suivi des patients Covid positifs [55 euros, NDLR], et c'est la plus faible d'Europe.
De même, pour moi, il manque une lettre à l'OPTAM-CO [option qui permet depuis 2016 des dépassements tarifaires maîtrisés pour les chirurgiens et les obstétriciens, NDLR]. C'est mal vécu, d'autant que nous avons les mêmes contraintes de bloc opératoire, de gardes, d'astreintes et d'urgences. Cela a eu pour conséquence un développement du secteur II chez les anesthésistes-réanimateurs, alors que nous étions beaucoup en tarifs opposables. Cela crée aussi des tensions sur les parcours des patients, qui vont être pris en charge à 100 % sur l'acte de chirurgie en OPTAM-CO, alors qu'ils auront un reste à charge en anesthésie et ce, alors que nos tarifs n'ont pas changé. Nous ne voulons pas être une variable d'ajustement !
Quelles leçons tirez-vous de la crise sanitaire ?
Les tutelles doivent mieux prendre en compte le service rendu au patient, la qualité des soins et des prises en charge, et non plus les seuls coûts. Il faut toujours rester humble quand on édicte des normes, nous l'avons vu avec la crise : de nombreuses directives se sont succédé, contredites et ont été remises en question l'instant d'après. Il a parfois été difficile pour les médecins de connaître la bonne attitude à adopter.
La reprise d'activité est aussi accompagnée de ce genre de préconisations. Par exemple, avec les risques d'aérosolisation, nous devons adapter les salles de réveil, attendre un renouvellement de l'air, suivre des procédures de lavage du matériel utilisé… C'est moins de patients vus alors qu'il y a très peu de chance de faire entrer des malades Covid au regard des précautions prises par les établissements.
Pour conclure sur un message plus positif, je veux dire enfin que nous avons une spécialité magnifique. Elle est de plus en plus choisie par les internes, et j'espère que notre rôle majeur pendant la crise permettra de créer de nouvelles vocations.
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