Retour à la normale, ou presque, pour les institutions de prévoyance (IP) après deux ans de crise Covid. Le bilan de l'année 2021 présenté, mardi, par les assurances complémentaires gérées par les partenaires sociaux montre un phénomène de rattrapage des soins qui s'est, par ailleurs, largement porté sur les paniers du 100 % santé dans les secteurs concernés. Autre enseignement : le niveau toujours conséquent des prestations en arrêts de travail (presque aussi élevées qu'en 2020).
D'une manière générale, les prestations santé versées ont rebondi de 6,4 % entre 2020 et 2021 pour atteindre les 5,8 milliards d'euros après avoir reculé de 4,6 % sur l'exercice précédent. Dans le détail, 13,7 % de cette enveloppe est venu rembourser des soins médicaux, 15,8 % des soins hospitaliers, 20,2 % des équipements optiques et 23,5 % des soins dentaires.
Et si on enjambe l'année 2020 – forcément atypique – on constate un recul des remboursements de médicaments (- 3,4 % entre 2019 et 2021), une progression modérée des dépenses pour les soins médicaux (+ 2 % sur la même période), mais plus importante pour les soins hospitaliers (+ 7,5 %) et encore davantage pour les soins dentaires (+22,6 %). « Les IP ont été affectées, comme le reste du secteur de l'assurance, par l'effet de rattrapage des soins et par la réforme du 100 % santé », note Bertrand Boivin-Champeaux, directeur prévoyance et retraite supplémentaire du Centre technique des institutions de prévoyance (Ctip, qui réunit 38 organismes de prévoyance, couvrant 13 millions de salariés à travers 2 millions d’entreprises). Des paniers sans reste à charge sur lesquels ses assurés se sont rués, et que les IP ont pris en charge à hauteur de 70 à 80 %, pour un montant de près de 300 millions d'euros.
Dynamique des arrêts courts et longs
Par ailleurs, les prestations versées aux entreprises et aux salariés du privé pour les arrêts de travail sont restées à un niveau élevé, souligne le Ctip, pour un coût de 4,2 milliards d'euros (à peine -0,6 % par rapport à 2020). Ces dépenses correspondent pour partie aux arrêts prescrits en raison du Covid notamment au cours du premier semestre 2021. Mais pas uniquement : les institutions de prévoyance constatent, avec des disparités selon les branches professionnelles, une progression du nombre des arrêts « aussi bien courts que longs », en particulier de façon assez inédite chez les moins de 45 ans.
Bien que mal expliqué à ce stade, faute de données précises, le phénomène pourrait être lié à une dégradation de la santé mentale des salariés, suppose le Ctip. Quoi qu'il en soit, l'organisation professionnelle mise sur la prévention, domaine où elle dispose d'atouts dans la mesure où les IP gèrent surtout des contrats de groupe. « Pour nous, c'est un sujet majeur quand on voit la dérive du volume des arrêts de travail, note Marie-Laure Dreyfuss, déléguée générale du Ctip. Nous sommes un vrai laboratoire pour la prévention car nous avons des volumes d'assurés importants, des populations ciblées et des datas. Certains de nos membres ont mis en place des programmes de prévention. Nous aimerions pouvoir co-construire ce sujet avec le nouveau gouvernement. »
Contractualisation avec les médecins ?
Dans le même ordre d'idées, le Ctip envisage de développer ses relations directes avec les professionnels de santé libéraux « afin de renforcer l'efficience de notre protection sociale », argumente Marie-Laure Dreyfuss. En 2018 déjà, la CSMF avait signé avec cette fédération de complémentaires un accord-cadre national de partenariat afin de favoriser le développement de contrats entre médecins libéraux et institutions de prévoyance, notamment pour prendre en charge des consultations longues de prévention.
Malgré la pandémie qui a fortement ralenti le mouvement, « à peu près 200 médecins libéraux ont été formés, confie au « Quotidien » le Dr Jean-Paul Ortiz, ancien président de la CSMF. Et il y a eu entre 500 et 1 000 consultations de prévention réalisées pour des chauffeurs routiers. Les patients ont été ravis de la démarche et les médecins qui se sont lancés étaient très contents ». Une analyse d'impact est en cours, mais la CSMF estime déjà qu'il « s'agit de quelque chose qu'il faudrait développer beaucoup plus. »
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