Médecine environnementale à Marseille.

Un rôle de sentinelles pour les généralistes

Publié le 05/12/2013
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Crédit photo : PHANIE

› DE NOTRE CORRESPONDANTE

LES MÉDECINS le clament avec force, ils sont confrontés tous les jours à des pathologies liées à l’environnement. « Au cours de leurs consultations, explique le Dr Joël Spiroux de Vendômois, président de la commission santé/environnement URPS de Haute Normandie, qui co-organise avec l’URPS PACA ce congrès, les médecins constatent une augmentation vertigineuse des pathologies allergiques, bronchiolites, asthme, etc, une hypofécondité, cancers, stérilité, sans compter une kyrielle de maladies orphelines. Les pathologies allergiques touchent plus de 25 % de la population et les prévisions sont au doublement dans les 20 ans à venir. » Et il poursuit sur des chiffres toujours plus alarmants : « En France la prévalence de l’asthme est passée de 3 à 7 % en 15 ans, les malformations néonatales ont doublé en 20 ans en région parisienne et les cancers ont progressé de plus 50 % en France en 20 ans. À partir de ces constatations, un nouveau concept est né, celui de pathologies environnementales, soit des pathologies causées ou liées à des modifications de notre environnement. »

L’industrialisation dès le XIXe siècle a profondément modifié les milieux de vie et déjà à l’époque, certains scientifiques s’étaient émus des modifications de la nature, en corrélation avec ces changements. Il faudra bien plus d’un siècle pour percevoir et mesurer les effets sur la santé. « Nous lançons dans la nature des milliers de tonnes de produits chimiques et de molécules inédites sans nous préoccuper de l’effet sur notre santé », confirme Joël Spiroux de Vendômois. Et d’ajouter : « Trois millions de tonnes en 1930, 420 millions en 2010 de ces produits chimiques qui sont persistants et se bio-accumulent dans l’environnement, finissent par aboutir dans notre assiette par concentration dans la chaîne alimentaire, sans compter l’air de nous respirons », poursuit-il.

La toxicologie n’est plus adaptée.

Tout ce qui a trait à l’environnement biologique certes mais pas seulement, l’environnement physique, sensoriel ou socio-anthropologique doit être pris en compte et évalué. Mais personne ne sait vraiment faire le lien entre la santé et l’environnement. La multicausalité de différentes pathologies en fait un domaine encore à explorer. « L’épidémiologie qui a été mise au point pour suivre des liens causaux directs et binaires entre un agent causal et une pathologie bien définie ne fonctionne pas pour des pathologies environnementales », explique le Dr Spiroux de Vendômois. Par ailleurs poursuit-il, « la toxicologie n’est plus adaptée et il va falloir développer des recherches sur les effets à faible dose, des effets cocktails, de la bioaccumulation, des effets vie entière… Il va falloir changer notre regard sur la place de l’Homme dans son milieu. »

Selon cet expert, également président du Comité de recherche et d’information indépendant sur le génie génétique, compte tenu de cette nouvelle donne environnementale, il est de plus en plus nécessaire d’anticiper la survenue de pathologies plutôt que d’essayer de les soigner. « Le 21e siècle doit devenir le siècle de l’hygiène chimique, de la préservation des milieux et de la prévention », souligne-t-il. C’est avec tous ces éléments de réflexion qu’a été conçu ce congrès. « Nous voulons sensibiliser les professionnels de santé à tenir leur rôle de sentinelle et valoriser leur rôle d’acteurs de la veille sanitaire », assure le Dr Jean-François Giorla, président de l’URPS PACA.

À noter que le 7 décembre, les interventions sur les problématiques liées à l’air et à l’eau seront également ouvertes au grand public. Renseignements au http://www.congres-sante-environnement-paca.org/

 HÉLÈNE FOXONET

Source : Le Quotidien du Médecin: 9286