Alors que les effets cardiovasculaires, en particulier l'insuffisance cardiaque, des anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) sont connus depuis plus d'une dizaine d'années, il existe peu de données sur l'impact individuel de chaque type d'AINS et la relation dose-effet de ces médicaments.
Une équipe européenne de chercheurs vient de publier, dans le « BMJ », une étude sur les liens entre le risque d'hospitalisation pour insuffisance cardiaque et la consommation de 27 AINS différents (23 AINS classiques et 4 inhibiteurs de COX-2). La relation dose réponse entre consommation de ces anti-inflammatoires et risque d'insuffisance cardiaque a également été évaluée.
Des risques significatifs pour 10 AINS
Pour ce faire, l'équipe de Giovanni Corrao a utilisé les informations, collectées entre 1999 et 2010, de cinq bases de données électroniques provenant de quatre pays : Italie, Allemagne, Pays-Bas et Royaume-Uni. Au total, 92 163 cas d'hospitalisation pour insuffisance cardiaque ont été comparés à 8 246 403 cas contrôles. L'âge moyen était de 77 ans pour les cas et de 76 ans pour les contrôles ; tous étaient utilisateurs d'AINS.
Les scientifiques se sont ainsi aperçus que la consommation récente (inférieure à 14 jours) de certains de ces anti-inflammatoires était associée à un risque d'hospitalisation pour insuffisance cardiaque accru de 19 % par rapport à une utilisation plus ancienne (de plus de 183 jours) de ces médicaments. Ce risque était augmenté pour 2 inhibiteurs de COX-2 (etoricoxib et rofecoxib), pour 7 des 23 AINS classiques utilisés (diclofenac, ibuprofène, indométhacine, ketorolac, naproxène, nimesulide et piroxicam) et probablement pour la nabumetone. Il doublait avec la consommation à très haute dose (supérieure ou égale à deux fois la dose journalière équivalente) de diclofenac, etoricobix, indométhacine, piroxicam et rofecoxib. Pour l'indométhacine et l'etoricoxib, il était augmenté même à dose moyenne (0,9 à 1,2 dose journalière équivalente). En revanche, l'étude n'a pas mis en évidence de risque accru lié à l'utilisation de celecoxib aux doses communément utilisées ; mais elle ne permet pas d'écarter ce risque pour des doses supérieures. Enfin, les chercheurs se sont aperçus que le risque d'insuffisance cardiaque était augmenté même chez les individus n'ayant pas d'antécédent pour cette pathologie.
Améliorer la pratique clinique
Selon les auteurs, « les estimations de risques fournies par cette étude pourront servir dans la pratique clinique et dans le travail réglementaire ». Ils soulignent cependant que leur étude, entre autres limites, ne s'est intéressée qu'aux AINS prescrits sur ordonnance ; pas à ceux en vente libre. Cela pourrait avoir pour conséquence une sous-estimation des valeurs de risque calculées.
D'après le Pr Peter Weissberg, un expert indépendant de la British Heart Foundation : « L'étude vient rappeler aux médecins qu'ils doivent faire attention lorsqu'ils prescrivent des AINS et des anti-COX-2, et aux patients qu'ils doivent prendre la plus petite dose efficace pendant la période la plus courte. »
Le Dr Tim Chico, de l'Université de Sheffield, s'est pour sa part efforcé de rassurer les patients : « les risques d'un traitement à base d'ibuprofène sur une courte période chez des personnes sans risque cardiaque évident restent faibles », relève-t-il.
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