LE QUOTIDIEN - Quelles seront à vos yeux les conséquences de l’application de l’avenant 8 ?
DR MICHEL LEGMANN - Cet avenant donne aux caisses des pouvoirs exorbitants et supprime des garanties que les médecins avaient. Quand les caisses pointaient du doigt un médecin pour excès d’honoraires, elles commençaient par avertir le conseil départemental qui convoquait ce médecin pour conciliation. Dans la plupart des cas, le médecin étant averti, l’affaire rentrait dans la normale. Ce processus est supprimé et la machine à sanction est en marche. On ne peut d’ailleurs écarter l’hypothèse d’une double peine. Une première infligée par la caisse, puis une poursuite disciplinaire devant l’Ordre. Mais ce n’est pas à moi de remettre en cause la signature des syndicats admis comme représentants officiels des médecins.
Vous doutez de la légalité des nouvelles règles en matière d’appréciation des dépassements. Que voulez-vous dire ?
On ne peut pas se baser sur quelque chose de flou pour prendre des sanctions. Or, la limite de deux fois et demi le montant des honoraires opposables doit encore faire l’objet d’aménagements, en fonction des régions et des spécialités. Les bases juridiques pour poursuivre les praticiens ne sont donc pas claires.
Cela pourrait-il vous amener à intenter un recours contre cet avenant ?
Tout à fait, sur les bases de l’imprécision des données sur lesquelles les caisses vont s’appuyer pour poursuivre certains médecins. Mais nous attendrons que des cas se présentent pour en décider.
L’Ordre n’a-t-il pas perdu la main sur ce dossier du contrôle des dépassements ?
Il est évident que nous perdons des prérogatives que nous avions, car le directeur de caisse pourra poursuivre seul un médecin, sans tenir compte de l’avis de sa commission paritaire, ni de celui de l’Ordre.
Les médecins « pigeons » vous reprochent de vous taire sur tous les sujets sensibles du moment...
Je n’ai pas de compétence sur ce qui n’a pas trait à la déontologie et je ne suis pas un syndicat. Mais je suis en liaison permanente avec tous les syndicats et leurs représentants. Les chirurgiens connaissent parfaitement mon point de vue. Je suis scandalisé par le fait que les honoraires des chirurgiens n’aient pas été revalorisés depuis plusieurs décades. Le fait que l’acte des généralistes soit aussi bas est une honte, c’est le plus bas d’Europe. Une consultation à 23 euros ne permet pas à un généraliste d’exercer à Paris. Le premier désert médical, c’est Paris. Comment voulez-vous qu’un généraliste se paye un cabinet, un secrétariat, et un appartement, à ces tarifs-là ? S’il y a un secteur II, c’est bien parce qu’il y a un secteur I qui n’est pas rémunéré. Le secteur II a été conçu par Raymond Barre comme une soupape. Si on veut supprimer cette soupape, il faut préalablement revaloriser les actes du secteur opposable. Ce n’est pas le cas, donc la crise demeure. Quand on supprime la soupape, ça finit par imploser.
Que vous inspire la proposition de loi sur les réseaux de soins mutualistes ?
C’est pire que tout. Je ne peux imaginer que la liberté de choix des patients soit remise en question. Je reconnais que la ministre de la Santé a eu un discours relativement précis en disant qu’elle était opposée à cette direction-là, sauf pour le dentaire et l’optique. Il faut s’opposer à ce projet de loi le plus vigoureusement possible.
Quatre généralistes font vivre à tour de rôle un cabinet éphémère d’un village du Jura dépourvu de médecin
En direct du CMGF 2025
Un généraliste, c’est quoi ? Au CMGF, le nouveau référentiel métier redéfinit les contours de la profession
« Ce que fait le député Garot, c’est du sabotage ! » : la nouvelle présidente de Médecins pour demain à l’offensive
Jusqu’à quatre fois plus d’antibiotiques prescrits quand le patient est demandeur