• Trois mois de retard... au moins
Deux raisons expliquent le report de trois mois du calendrier (du 1er juillet au 1er octobre). La première tient au retard pris par l’assurance-maladie pour lancer ce dispositif, plus complexe que prévu. La CNAM, de l’aveu de son patron, a sous-estimé le temps nécessaire pour d’une part colliger les données 2012 individuelles tous régimes sur les pratiques tarifaires, et d’autre part les traiter avant de constituer chaque dossier (le médecin devant se prononcer en connaissance de cause). Un trimestre a été perdu au démarrage. Les visites des délégués de l’assurance-maladie pour promouvoir le CAS sur le terrain n’ont commencé au mieux que fin mars. À ce jour, les délégués n’ont rencontré que la moitié des médecins libéraux concernés...
La deuxième raison tient au « torpillage » syndical qui a entouré le lancement du contrat présenté comme un « piège » pour les secteur II. Outre les critiques du BLOC ou de la FMF, l’unité de façade qui entourait la signature de l’avenant 8 s’est lézardée avec le revirement stratégique du SML. « Il y a eu un déficit de pédagogie », euphémise le directeur général de la CNAM.
• Des caisses inégalement impliquées
Le niveau d’adhésion des médecins de secteur II se révèle très disparate sur le territoire (carte).
Seuls 23 départements ont dépassé la moitié de leur objectif de recrutement (un tiers de médecins éligibles) en deux mois. Ces résultats s’expliquent en partie par l’inégale implication des caisses, mais aussi par le bouche à oreille local, parfois négatif. « On avance très bien à Nice, Perpignan, Bastia ou les Hauts-de-Seine », explique le directeur de la CNAM. Au contraire, certaines CPAM, dans l’ouest ou les DOM, ont pris du retard. « Dans les départements où l’assurance-maladie s’y est pris tôt avec l’aide de la CSMF, les résultats sont là, affirme le Dr Jean-François Rey, président de l’UMESPE, branche spécialiste de la CSMF. Dans les Alpes-Maritimes, où les dépassements sont importants, nous avons signé 270 contrats sur un objectif de 330. Au 1er juillet, nous aurons rempli notre objectif. » Paradoxalement, les adhésions seraient moins nombreuses dans les départements où il y a peu de dépassements - bon nombre de médecins ne se disant pas concernés.
• MEP et cliniciens ouverts, chirurgiens pas à bloc
Les praticiens de secteur II les plus intéressés par le contrat ne sont pas les spécialistes des plateaux techniques lourds, pourtant la cible prioritaire. L’assurance-maladie a enregistré « quelques centaines d’adhésions en chirurgie », a annoncé au « Quotidien » son directeur général, Frédéric van Roekeghem.
En revanche, la CNAM souligne...« les très bons retours chez les généralistes de secteur II et les MEP » mais aussi dans certaines spécialités cliniques comme la pédiatrie. Pas certain que l’objectif soit atteint.
« Les cliniciens ont compris leur intérêt à adhérer, explique le Dr Rey. Il suffit qu’ils dépassent plus mais sur moins d’actes ». Le discours sur la prise en charge des charges sociales sur la part opposable n’a guère séduit les chirurgiens. Pas davantage que le caractère réversible du dispositif. « Ils ne sont pas intéressés car ce contrat ne correspond pas à leurs pratiques », résume le Dr Philippe Cuq, coprésident du BLOC.
• Les syndicats placés devant leur responsabilité
Un médecin éligible sur huit a signé le contrat. Ce résultat jette un doute sur le portage de l’avenant 8 par les syndicats. Cet accord de régulation tarifaire (assorti de revalorisations) a été signé par trois organisations (CSMF, SML et MG France) mais il n’en reste qu’un seul, la CSMF, pour promouvoir le contrat sur le terrain (MG France est peu concerné par ce volet de l’accord). Le directeur de la CNAM pointe surtout la responsabilité du BLOC, non signataire, accusé de « troubler » les chirurgiens par des « messages contre-productifs ». « Le BLOC n’a pas interdit aux gens d’adhérer, l’adhésion est individuelle, réplique Philippe Cuq. Si les chirurgiens n’ont pas signé, c’est parce que le contrat n’est pas adapté à la chirurgie ». Selon le Dr Cuq, « il faut reprendre les discussions pour revaloriser les tarifs opposables et faire en sorte que les complémentaires prennent en charge les compléments d’honoraires ». Le Dr Roger Rua, président du SML, ne regrette pas d’avoir pris ses distances avec le CAS malgré l’engagement de son prédécesseur. « Ce contrat n’apporte rien aux spécialistes de secteur II et il fallait avertir les confrères des dangers », assume-t-il.
• Le spectre de la loi
Le report du lancement du contrat est forcément un mauvais signal pour ses défenseurs. « Cela me dérange un peu, explique le Dr Rey. Les sprinteurs vont jusqu’à la ligne d’arrivée avant de relever la tête. Cette décision peut démotiver et inciter les médecins à attendre un peu plus ». Les praticiens de secteur II signataires devront patienter pour bénéficier des revalorisations des tarifs opposables et des exemptions de cotisations sociales sur leur activité aux tarifs Sécu. « Ce sont trois mois de perdus », estime le Dr Rey. Politiquement surtout, mettre une nouvelle date au 1er octobre, en plein budget de la Sécu, pour réguler les dépassements, apparaît dangereux. « Si on ne remplit pas le contrat, le PLFSS risque d’être rude », concède un leader syndical. En cas d’accord bancal, les parlementaires pourraient reprendre la main.
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